22 nov. 2022

Christian Vander: "Magma n'a jamais composé en fonction des modes"

 

(c) Christophe Abramowitz

Fondé par Christian Vander, il y a plus de 50 ans, Magma s'est imposé d'emblée comme un groupe hors normes, dont l'univers musical s'est toujours affranchi des modes et des conventions. Après "Zëss", un album plutôt sombre, sorti en 2019, il revient avec "Kartëhl". enregistré entre mars et juin 2022. 
Soutenus par des choeurs masculins et féminins, et des musiciens virtuoses, les huit titres, dont deux bonus datant de 1978,  font toujours la part belle à la musique classique moderne et au jazz mais s'enrichissent aussi de sonorités brésiliennes avec "Irena Balladina". Un album que les néophytes jugeront sans doute plus "accessible" mais qui  trouvera évidemment un large écho auprès des fidèles de la première heure.
Rencontre avec Christian Vander, toujours farouchement attaché à sa liberté de création, avant un prestigieux concert avec l'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, à l'Opéra de Monte-Carlo le 27 novembre prochain et une tournée.

- Certains prétendent que votre musique s'adresse aux initiés. Qu'en pensez-vous ?
Je ne veux pas dire du mal de la variété mais certaines oreilles ne sont peut-être pas prêtes à écouter autre chose. C'est parfois une question de moment. Il y a des gens qui m'ont dit qu'ils avaient eu du mal avec notre musique et qu'un jour, ils ont pu entrer. C'est souvent le cas lorsque le public nous découvre en concert.

- Avec ce nouvel album, votre musique semble plus "accessible" ?
Nous avons toujours été ouverts ! On peut apprécier les oeuvres de Ravel ou de Debussy en étant totalement novice en matière de musique classique. Ce sont les gens qui s'enferment parce qu'il leur manque la clef. Il  suffit de chercher un peu pour la trouver.

- Stella Vander tient un rôle essentiel à vos côtés ?
Elle fait un magnifique boulot, en amont, avec les choeurs. Elle me libère et me permet de ne penser qu'à la musique. C'est une chance inouïe. Les choeurs sont importants, parce que le chant est important. Sur cet album, nous avons notamment découvert que Thierry Eliez qui assure les claviers est également un très bon chanteur. 

- "Kartëhl" est aussi un retour au groupe ?
C'est vrai. Avec Stella, nous avons décidé de faire un album de groupe. Ce que nous n'avions pas fait depuis "Üdü Wüdü" en 1977. Pour ce nouvel album, chacun a apporté sa contribution.

- Vous avez inventé un langage, le kobaïen. Une manière de ne pas parasiter la musique ?
Je n'ai jamais cherché à inventer un langage. Ce sont juste des sons qui viennent comme ça. Chaque morceau amène son lot d'expressions. C'est vrai que nous n'imposons pas une histoire aux gens. Nous laissons à chacun le soin de faire travailler son imaginaire et de créer la sienne.

- Cela permet aussi d'éviter la barrière de la langue lorsque vous vous produisez à l'étranger ?
Absolument. Seule, l'émotion subsiste. Nous avons récemment joué au Japon et le public chantait les sons avec nous. En France, on nous fait parfois ce reproche mais lorsqu'on écoute un saxo, cela n'empêche pas d'être touché, si la musique est suffisamment expressive.

- Mais vous avez quand même donné un titre à l'album ?
Forcément. Parce qu'en le réalisant, j'ai toujours l'idée de l'histoire que je vais raconter. Après, je laisse la musique parler. C'est ce que je travaille avec Magma. Il ne faut jamais chercher à faire de la musique.  C'est elle qui demande et on répond...


(c) Kamal Bahloul

 
- Les deux bonus composés en 1978, ne semblent pas datés ?
Tout simplement parce que Magma n'a jamais composé en fonction de l'époque et des modes !

- "Irena Balladina" est un titre en hommage à votre mère ?
Tout-à-fait. Elle adorait la musique brésilienne. J'ai composé ce morceau en pensant à elle.

- Il paraît que vous avez eu votre première batterie à 12 ans ?
Oui, grâce à Chet Baker. Nous avions eu l'occasion de faire des échanges sur des papiers buvard avec des balais ! Il trouvait que j'étais doué et il a décrété qu'il me fallait une batterie. A l'époque, il jouait dans un endroit qui s'appelait "Le chat qui pêche" et il m'a proposé de venir le rejoindre en taxi. Là, il a chargé une batterie dans le coffre. J'ai joué pendant deux ans, jusqu'à ce que des huissiers viennent frapper à notre porte car c'était une batterie de location ! A 14 ans, je suis passé au tribunal pour recel de batterie.  Cela ne s'est pas trop mal passé mais j'ai quand même été condamné à rembourser les traites...

- Pouvez-vous nous parler de votre prochain concert avec l'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo ?
Je trouve cela fantastique et, en même temps, je suis un peu angoissé car nous n'avons que deux jours de répétitions. Ces musiciens sont des virtuoses capables d'interpréter tous les répertoires, mais là, ils arrivent avec une partition qu'ils ne connaissent pas. De toute manière, nous allons nous adapter car lorsqu'on est dirigé par un chef, il ne faut pas le contrarier ! 


- Album "Kartëhl" (Seventh Records-Bertus), disponible depuis le 30 septembre 2022.
En tournée: le 27 novembre 2022 à l'Opéra de Monte-Carlo, le 1er février 2023 à Cholet, les 3 et 4 février à Bordeaux, le 16 février à Enghien-les-Bains, le 23 mai à Saint-Nazaire...

20 nov. 2022

Jean-Pierre Kalfon: "Avec l'album "Méfistofélange", je n'ai pas dit mon dernier mot !"

(c) Jean-Marie Marion

Il a tourné avec Yves Boisset, Jacques Rivette, Pierre Granier-Deferre, Jean-Luc Godard, François Truffaut ou Claude Lelouch, joué au théâtre, mais Jean-Pierre Kalfon n'a jamais caché sa passion pour la musique. Après avoir créé plusieurs groupes de rock, participé au premier festival punk de Mont-de-Marsan en 1976, gratté de la guitare auprès de Jacques Higelin et Louis Bertignac, enregistré quelques 45 tours, un LP intitulé "Black Minestrone"...  il a attendu l'âge respectable de 83 ans pour sortir "Méphistofélange". Un bel album rock qui lui ressemble et dont il a signé tous les textes. Son timbre rocailleux et sûr nous embarque dès la première écoute sur des titres comme "Noire la nuit", "Costard", "Plus d'états d'âme", "Gypsies Rock'n'Roll Band", "Train fantôme"...
Souvent cantonné dans les rôles de méchant, on découvre un homme prévenant, rieur et élégant dans le café du XVIIIème arrondissement, où il a ses habitudes.  Entretien avant son concert parisien au Petit Bain, le 12 décembre prochain.

- On parle d'un premier album mais il y a eu un précédent, non ?
C'est vrai mais celui-ci est le premier que j'ai pu contrôler du début à la fin. Dans "Black Minestrone", il y avait des chansons merveilleuses mais c'était un peu laborieux et bancale. Et on ne chantait pas très bien. J'ai pris des cours depuis...

- Vous l'avez dédié à Amy Winehouse ?
Parce que la première fois que je l'ai entendue, j'ai pris une claque. Surtout quand j'ai réalisé qu'elle n'avait que 20 balais  ! J'ai eu envie de lui rendre hommage car j'ai toujours été sensible aux voix de femmes, aux belles âmes, dans la musique. 

- Sur le livret de l'album, on découvre une sorte de galaxie avec votre photo et celle de vos musiciens ? 
Ce disque, c'est notre planète.  On m'a dit que cela faisait aussi penser à Jésus et ses apôtres car nous sommes treize ! Les musiciens sont de vraies pointures et nous avons bien rigolé. On utilise toujours le terme jouer pour un acteur ou un musicien. J'aime cette référence à l'enfance.

- C'est vrai que vous avez payé vos premiers cours de théâtre avec votre cachet de boy aux Folies Bergère ?
 J'ai fait le boy durant 5 mois. On avait des smokings de toutes les couleurs et j'adorais me balader dans la rue avec des costards roses, jaunes ou verts. Les cachets m'on en effet permis de payer quelques cours de théâtre mais ça ne m'a pas beaucoup servi.

- Pourquoi ?
J'ai quitté le lycée en 3ème et je n'ai pas eu le temps d'acquérir une grande culture. Quand on me donnait une scène à jouer, j'apprenais juste le passage concerné mais je ne me donnais même pas la peine de lire  la pièce. Cela s'appelle un imposteur !

- En parlant de costard, celui que vous vous taillez dans la chanson du même nom, n'est pas à votre avantage ?
Je ne me traite pas de tête à claque ou de tronche de cake tous les jours devant ma glace. Il y a même des matins où je me trouve pas trop mal. C'est important, d'être capable de se moquer de soi et de se flageller un peu. J'ai essayé de le faire sans grossièretés, avec une certaine élégance.


(c) Jean-Marie Marion


- Vous avez signé tous les textes de l'album. Quelle est la part de fiction et de vécu ?
Dans "Méphistofélange", tout est personnel. Il y a des bouts de moi dans chaque chanson. On écrit avec ce qu'on est. Alors qu'au cinéma, on endosse le costume d'autres personnages. J'ai quand même joué le rôle de Louis XIV (NDLR dans "Saint-Cyr" de Patricia Mazuy, en 2000) ! 

- Avant de jouer de la guitare, vous avez fait de la batterie, non ?
Oui, parce que je ne sais pas lire la musique mais cela a toujours été ma passion. Etre acteur, ce n'était pas forcément mon désir. c'est pour ça que je suis parti en Belgique quand j'avais 15/16 ans.  J'avais entendu dire qu'il y avait à Bruxelles un endroit qui s'appelait La Cave et qui ressemblait au Tabou de Saint-Germain-des-Prés.  Je me suis fait arrêter avec de faux papiers d'étudiant et j'ai fait de la prison à Bruges. Après, j'ai essayé de me reconstruire pour prouver à ma mère que je n'étais pas un voyou.

- Le texte de "Noire la nuit" n'est pas celui que vous aviez initialement prévu ?
Quand j'ai commencé à écrire cette chanson, je pensais à la nuit parisienne et à tous ces endroits que j'ai beaucoup fréquentés et qui ont n'existent plus. Aujourd'hui, le monde de la nuit est réduit à sa plus simple expression. Puis il y eu ces images de la guerre en Ukraine et j'ai été bouleversé. J'ai conservé le titre et j'ai réécrit le texte.




- Cet album est résolument rock avec des sonorités blues ?
C'est ce que je voulais et je me suis fait plaisir. Ce qui m'a motivé, c'est de retrouver le plaisir de l'écriture. Je me vois un peu comme un rock'n'roll bluesman. D'ailleurs, avec "Méphistofélange", je n'ai pas dit mon dernier mot !

- C'est-à-dire ?
Dans le prochain album, je vais chanter des blues que j'ai adaptés en français mais en respectant évidemment les textes.  Notamment le titre  "Help The Poor" de B.B. King et Eric Clapton qui raconte l'histoire d'un homme qui demande à une femme de partager ses rêves. Il faut juste que celui-ci marche bien car je ne suis pas un perdreau de l'année ! 

- Vous avez le trac, à quelques jours de ce concert à Paris ?
Oui, parce que j'ai peur qu'il n'y ait pas de monde ! J'ai beaucoup travaillé pour cet album mais les gens me connaissent comme acteur et  pas comme chanteur. 


- Album "Méfistofélange" (Deviation Records/L'Autre Distribution), disponible depuis le 21 octobre 2022.
- En concert, le 12 décembre 2022, à 20 heures, au Petit Bain, 7 Port de la Gare, 75013 Paris.    www.petitbain.org

17 nov. 2022

Jamie Cullum, Yaron Herman, Gonzalo Rubalcaba... à l'affiche du Festival "Pianomania" à Paris

Jamie Cullum (c) Edward Cooke

En 2019, Paris célébrait l'instrument cher à des artistes  tels que Fats Waller, Oscar Peterson, Thelenious Monk, Bill Evans, Art Tatum, Michel Petrucciani... avec la première édition du festival "Pianomania". Une belle initiative interrompue pour raisons sanitaires.

Dès demain, cette grande fête du clavier revient pour une seconde édition orchestrée par les programmateurs Reno di Matteo et Jean-Philippe Allard, présentée dans des lieux prestigieux de la capitale: la salle Pleyel,  les Bouffes du Nord, le Théâtre de l'Athénée et le Théâtre Marigny.

Coup d'envoi, le 18 novembre à Pleyel, avec le facétieux musicien et chanteur britannique Jamie Cullum, avant une soirée aux couleurs cubaines réunissant le virtuose Gonzalo Rubalcaba, en solo puis un trio mené par le bassiste Richard Bona et le pianiste Alfredo Rodriguez. Le 20 novembre, cap sur les Bouffes du Nord pour un programme marathon intitulé "Le jour et la nuit du piano", présenté par Laurent de Wilde. Dès 11 h du matin, pas moins de 13 pianistes se succèderont sur scène: Edouard Ferlet, Cheick Tidiane Seck, Leïla Olivesi, Bernard Lubat, Giovanni Mirabassi, Mario Canonge, Pierre de Bethmann..., avec en point d'orgue un duo entre le maître de cérémonie et Alain Jean-Marie. Le 21 novembre, place au "Piano Forte" à l'Athénée.  Et, pour le concert de clôture, au Théâtre Marigny, il ne faut pas rater la rencontre inédite entre le pianiste Yaron Herman et le rappeur Oxmo Puccino, suivie d'un concert de la chanteuse Ayo avec le pianiste Gaël Rakotondrabe.

- Du 18 au 22 novembre 2022, à 20h, sauf le 20 novembre à partir de 11h, salle Pleyel, Bouffes du Nord, Théâtre de l'Athénée et Théâtre Marigny à Paris. Programme complet sur le site www.pianomania.fr

16 nov. 2022

Les Wriggles: entre tendresse, humour grinçant et satires sociales

 

(c) Pidz



Depuis leurs débuts, il y a déjà 25 ans, les Wriggles enfilent leurs costumes rouges pour égayer un peu notre quotidien. Après s'être éclipsés en 2009, ils sont revenus, à quatre, neuf ans plus tard, plus en forme que jamais. Et le moins qu'on puisse dire est que leur répertoire n'a pas pris une ride !

Des mousquetaires (Stéphane Gourdon, Antoine Réjasse, Emmanuel Urbanet et Fabien Marais) capables de vanter le charme de "Sixtine", belle comme un Michel-Ange ou de nous toucher avec "Noce éternelle", mais qui n'hésitent pas à monter au créneau pour défendre les humiliés dans "Welcome", évoquer le réchauffement climatique avec le faussement festif "Barbeuc Party" ou les violences conjugales pour le bouleversant "Je vis toute seule avec un chien". "L'idée n'est pas de jouer les donneurs de leçons,  explique Antoine.  D'ailleurs, au début de la chanson sur la femme et son chien, le public a tendance à sourire avant de  prendre conscience du poids du texte"

Des chansons, écrites en "Visio" qui figurent dans le nouvel album "Quatre étoiles", "rodées" avec succès à La Scène Libre à Paris, l'hiver dernier. "Nous avons toujours fonctionné comme ça. Il nous est parfois arrivé de nous dire que nous n'avions pas fait le bon choix en fonction des réactions du public. De cette manière, quand on se retrouve en studio, les morceaux ont déjà pris une certaine maturité"





Entre tendresse, humour grinçant et satires sociales, les joyeux complices se sont taillé une solide réputation. " On jongle sur un sujet et dans la manière de l'aborder. Cela fait partie de l'ADN des Wriggles. Après on laisse à chacun la liberté d'interpréter".  Des jongleurs de mots qui s'accompagnent au ukulélé, à la guitare... sans oublier l'inimitable beatbox de Stéphane Gourdon.

Intitulé "Les Wriggles se mettent en quatre" et mis en scène par le créatif Sébastien Lalanne, leur spectacle fait également la part belle aux classiques comme "La petite olive", ou "La révolte des rennes" encourageant leurs congénères à se mobiliser pour obtenir le statut d'intermittent !


Sur l'affiche, ils portent un nez rouge, mais si les Wriggles aiment jouer les clowns, ils possèdent l'esprit  frondeur de chansonniers des temps modernes et un indiscutable talent pour mettre le doigt là où ça fait toujours un peu mal...

- Album "Quatre Etoiles" (Blue Line/Pias), disponible depuis le 14 octobre 2022
- le 19 novembre 2022, à 21h, au 13ème Art, Place d'Italie, Centre Commercial Italie II, 75013 Paris. Tél.:01.48.28.53.53. Loc. points de vente habituels. www.le13eart.com
- En tournée: le 13 janvier 2023 au Théâtre de Châtel-Guyon (63), le 14 janvier à Montluçon (03), le 15 janvier à Lyon, le 28 janvier à Bourg La Reine (92), le 18 mars à Aulnoy-Lez-Valenciennes (59), le 23 mars à Nantes, le 6 avril à Woincourt (80), le 8 avril à Langeais (37), le 27 mai à Saint-Vallier-de Thiey (06)... 


13 nov. 2022

Richard Gotainer: un loufoque et brillant conteur

(c) Léo Gotainer

Après une bien trop longue absence, le chanteur, auteur, acteur occasionnel, fantaisiste à plein temps, à qui l'on doit des tubes comme le fameux "Mambo du décalco" et des publicités comme "Buvez éliminez" pour Vittel, "Y'a des fruits, y'a de l'eau" pour Banga, "On se lève tous pour Danette"... revient enfin sur scène avec un spectacle intitulé "Gotainer ramène sa phrase".  Et comme, il ne fait décidément rien comme tout le monde, il propose ici un concept inédit puisqu'il revisite une vingtaine de chansons... sans les chanter ! 
Une idée qui a germé pendant le confinement. Afin de garder le contact avec l'extérieur et peut-être de préparer "le monde d'après", il s'est amusé à diffuser ses textes sur la toile. Résultat: plus de 3 millions de vues ! 
 Dans un décor "comme à la maison" version un peu kitch, avec tapis, guéridon, lampadaire... une guitare électrique donne le rythme d'un show qui s'annonce franchement rock'n'roll. Car l'autre bonne idée de l'ami Gotainer est d'avoir fait appel à Brice Delage, un guitariste hors pair et multi-facettes, (remarqué notamment aux côtés de Ramon Pipin ou lors d'un tribute à ZZ Top), capable de nous régaler de riffs ébouriffants ou d'imiter à la perfection les aboiements d'un chien. Après avoir salué les gars et les filles, Gotainer annonce : "ce soir, je ne chante pas, je raconte..."

Brice Delage et Richard Gotainer (c) Léo Gotainer


 Et quel conteur ! Avec une verve intarissable, il brosse, gestuelle à l'appui, le portrait du "béquillard des bois" qui traverse la vie en prenant des chemins de traverse, celui de trois vieux papis qui parlent de l'air et du temps, revient sur les talents cachés des "Femmes à lunettes", se lance dans une course-poursuite effrénée avec "Le moustique", se lamente sur "Quéquette blues", déclame un "Halléluya" pas très catholique, mime le papa gâteux devant son Youki, vante les délices du "Pâté de faon", s'amuse des dérives des hommes et des femmes au volant dans "Lautomodébile"...
 Alternant moments tendres, franche rigolade et parenthèses grivoises, il prend le public à témoin en s'interrogeant sur l'âge où il arrêtera de faire le couillon ! Avant de s'émerveiller sur le bonheur de sauter dans les flaques d'au et de rester un enfant.
A la fin, il remercie le public d'avoir été complice de ce pêché mignon qu'est la gourmandise des mots. Quant à nous, on redemanderait bien un peu de "rab"...

Jusqu'au 31 décembre 2022, les vendredis et samedis à 21h30 et les dimanches à 19h, au Lucernaire, 53, rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris. Réservations au 01.45.44.57.34 et sur le site www.lucernaire.fr

Daphné: un bouquet de chansons émouvantes et espiègles en hommage à Barbara

(c) David Desreumaux


"Barbara c'est un pays, à découvert, sans mensonge, un feu intime où tout nous appelle à être présents à ce qu'on vit, sans le fuir, quelle que soit l'émotion qui nous traverse. C'est un pays d'espérance, d'amour, qui nous prend la main, un pays où nos failles deviennent des ailes et nos joies des racines où s'ancrer..." confie Daphné. Un pays où la chanteuse révélée au public grâce à l'album "Emeraude", en 2005 et qui a notamment collaboré avec Benjamin Biolay, Bénabar, Neil Hannon de Divine Comedy..., s'était déjà aventurée il y a dix ans avec l'opus "Treize chansons de Barbara", suivi de 13 concerts. 

25 ans presque jour pour jour après la disparition de la longue dame brune (le 24 novembre 1997), Daphné vient de sortir "Dix fleurs d'amour de Barbara". Accompagnée d'une belle section de musiciens dont le créatif multi-instrumentiste et arrangeur Etienne Champollion (piano, guitare, vibraphone, accordéon, ukulélé, programmations...), la chanteuse explore cette fois des territoires moins connus. Outre des relectures sensibles de "Nantes" et "Vienne", son timbre d'une délicate musicalité nous emmène à la (re)découverte de chansons, de 1964 à 1973, dont Barbara fut parfois juste interprète. Que ce soit pour le désinvolte "Moi je me balance" de Georges Moustaki, les malicieuses "Fleurs de méninges" où François Morel lui donne la réplique ou encore "La ligne droite", un titre dans lequel  Thibaud Defever prête sa voix et sa guitare.

Un bouquet de chansons tour à tour émouvantes, mutines, vibrantes, espiègles, que Daphné présentera sur scène dans un spectacle intitulé "La légende de la femme-oiseau", qu'elle a écrit et imaginé autour du répertoire de Barbara.


- Album "Dix fleurs d'amour de Barbara" (EPM), disponible depuis le 4 novembre 2022. 

 - Spectacle en tournée:  le 19 novembre 2022 aux Bains-Douches à Lignières (18), le 9 décembre au Théâtre Auditorium de Poitiers (86), le 10 décembre à L'Espace Agapit de Saint-Maixent (79), le 15 décembre aux Franciscaines à Deauville (14), le 14 mars 2023 au Sémaphore à Cébazat (63)...

8 nov. 2022

François Morel célèbre le centenaire de Raymond Devos avec un spectacle pétillant d'intelligence et d'humour

(c) Manuelle Toussaint Paris

Le 9 novembre prochain, on fêtera le centenaire de la naissance de Raymond Devos. Un anniversaire que François Morel a choisi de célébrer en remontant sur les planches avec "J'ai des doutes" récompensé par le Molière du meilleur comédien dans un spectacle du théâtre privé, en 2019.

François Morel tient une place particulière dans le coeur de chacun d'entre nous. Un peu comme un grand frère que l'on suit les yeux fermés parce qu'il nous promet toujours de belles et passionnantes aventures. On le présente volontiers comme le digne héritier de Bourvil avec qui il partage le don de nous émouvoir et de nous faire rire. Alors, lorsqu'il met toutes ces qualités (et il n'a pas fini de nous surprendre !) au service d'un "monument" comme Raymond Devos, on peut s'attendre à tutoyer les sommets !


(c) Giovanni Cittadini Cesi
 

Dès les premières minutes, il nous entraîne dans l'univers du maître de l'absurde, des paradoxes et des jeux de mots. Pas question pour autant d'endosser le fameux costume bleu car si le comédien marche dans les pas du colosse franco-belge, il ne cherche jamais à l'imiter. Une escapade tendre et joyeuse qui débute dans les cieux lorsqu'il campe Dieu interpelant Saint-Pierre sur un tonitruant "Je m'ennuie, convoquez-moi Devos !". L'occasion de retrouver des morceaux savoureux comme "Caen", "Mon chien c'est quelqu'un", "J'ai des doutes" ou "Je hais les haies" dont le texte défile sur un écran, en fond de scène. Entre deux sketches, il nous régale de chansons courtes, donne la réplique à son facétieux complice, le pianiste (et compositeur) Antoine Sahler, nous rejoue quelques séquences du fameux Grand Echiquier de Jacques Chancel avec une marionnette..

Plus qu'un hommage à celui qui affirmait :"le rire est une chose sérieuse avec laquelle il ne faut pas plaisanter",  François Morel offre ici un spectacle pétillant d'intelligence et d'humour.  



En tournée: Les 8 et 9 novembre 2022 à Alès, le 10 novembre Le Thor, le 15 novembre à Fontenay aux Roses, le 18 novembre à Lempdes, le 16 décembre à Comines, les 20, 21, 22, 23, 30 et 31 décembre à Louvain, le 17 janvier 2023 à Millau, le 18 janvier à Onet Le Château, le 21 janvier à Saint-Raphael, le 26 janvier à La Ferté Bernard, le 28 janvier à Champigny, le 2 février à Saint-Quentin, le 3 février à Saint-Omer, le 4 février à Mons en Baroeuil... 

- Les 14 et 15 février 2023 au Théâtre des Champs-Elysées à Paris.                     

 

1 nov. 2022

Le swing joyeux et frondeur de "Drôle de Jam"

(c) Laurencine Lot

 Sur l'affiche, on peut lire que le spectacle est présenté "avec l'aimable participation de divers génies du jazz"... Un trait d'humour qui donne d'emblée le ton de cette "Drôle de Jam". Le chanteur et guitariste Bruno Buijtenhuijs (avec la collaboration artistique d'Agnès Boury) a en effet imaginé des textes en français sur des standards de Miles Davis ("So What"), Duke Ellington ("Good Indigo"), Charlie Parker ("Donna Lee"), Chick Corea ("Spain") ou encore Django Reinhardt ("Minor Swing"). Et le résultat est tout simplement réjouissant ! Il faut dire que le monsieur ne donne pas dans la morosité, tout comme ses complices: Franck Richard (contrebasse), Geoffroy Boizard (guitare) et les deux pétillantes chanteuses Rachel Pignot et Julie Costanza. 

Enchaînant des reprises "revisitées" et des chansons originales, le quintet nous embarque dès les premières notes dans un tourbillon de bonne humeur. Avec un côté joliment frondeur car se lancer dans la réécriture humoristique de titres cultes est tout de même assez "culotté" ! Quant aux demoiselles, ne comptez pas sur elles pour faire tapisserie dans cet hommage aux grands hommes du jazz ! Dans des tenues qui semblent tout droit sorties de comédies musicales des années 50, elles mettent très vite leur grain de sel lorsque leurs complices abordent des thèmes comme la vie d'une femme dans sa cuisine, le blues du mâle à la recherche de ses repères ou celui du contrebassiste dont l'instrument ne fait guère recette pour séduire les filles... 
Un peu chipies et franchement douées, les deux chanteuses se livrent aussi à quelques joutes vocales lorsqu'il s'agit de se disputer le même amoureux, scatent, imitent le son de la trompette tout en énumérant les ingrédients de la paella sur l'air du Concerto d'Aranjuez.

Pour ceux qui pensent encore que le jazz est un genre élitiste, il suffit d'aller découvrir "Drôle de Jam" pour réaliser à quel point faire swinguer les mots est une source de joie et de partage... 

 Jusqu'au 30 janvier 2023, tous les lundis, à 21h au Théâtre de l'Essaïon, 6 rue Pierre au Lard, 75004 Paris. Tél.:01.42.78.46.42. www.essaion.com