28 févr. 2018

Le spleen flamboyant de Pierre Lapointe

(c) John Londono

Soyons clairs, malgré une homonymie avec notre célèbre chanteur de Pézenas, le répertoire de Pierre Lapointe n'est pas franchement à se rouler par terre de rire, même s'il n'a pas son pareil pour entrecouper ses chansons de considérations aussi drôles qu'insolites. Reconnu depuis une quinzaine d'années de ce côté-ci de l'Atlantique, cet auteur compositeur québécois s'est forgé une solide réputation en faisant rimer désamour avec toujours (ou presque !).
Avec lui, la carte du tendre prend mille et un détours pour nous emmener dans les sombres sentiers de "La forêt des mal-aimés" (son troisième album), nous faire découvrir l'histoire d'un mutant dans sa quête du bonheur ("Mutantès")... tout en affichant sa passion pour la pop, la littérature et les arts visuels.
Hasard du calendrier ou boutade digne de ce facétieux dandy, sa tournée a fait escale à la Cigale les 13 et 14 février derniers. Et passer la soirée de la Saint-Valentin avec ce poète du spleen, aussi flamboyant soit-il, aurait pu décourager les moins aguerris. Mais les deux concerts affichaient complets. Il faut dire qu'un artiste qui écrit : "...nous sommes deux rois, deux étalons fous, plus forts que tout. L'amour flotte dans la pièce, comme une messe, comme un vent doux. L'amour est un spasme qui grise et embrasse la vie..." a de quoi faire chavirer les coeurs.
Car outre un timbre prenant qui joue plus sur le registre de l'émotion que sur celui de la démonstration, la force et le talent de Pierre Lapointe est aussi de savoir débusquer les petits et grands travers de l'humain, les tourments de l'amour, pour en faire des chansons lyriques et bouleversantes, redoutables de cynisme parfois.
(c) John Londono
Constitué de titres extraits de ses deux derniers albums "Paris tristesse" et "La science du coeur" (enregistré notamment avec les cordes de l'Orchestre Symphonique de Montréal), le spectacle présente une oeuvre dense dans laquelle il met en musique (avec la complicité de David François Moreau) la moindre de nos pulsations défaillantes. Et lorsqu'il chante "Je t'écris cette chanson comme une lettre, une carte postale que tu liras peut-être, une photo qui j'espère mettra un peu de lumière sur les restes de nos joies...", on sent poindre juste ce qu'il faut d'espoir et de tendresse, pour ne pas sombrer dans une vaine mélancolie...

album "La science du coeur" (Columbia/Sony Music) sorti en octobre 2017
En tournée: le 9 avril 2018 au Havre (Le Tetris), le 10 avril à Sotteville Les Rouen (Festival Café de la Marine/Le Trianon Transatlantique), le 11 avril à Bruxelles (La Madeleine), le 13 avril à Genève (L'Alhambra/Voix de Fête), les 19 et 20 avril à Rennes (Festival Mythos /L'Aire Libre), le 29 juin à Toulouse (Théâtre Sorano), le 22 octobre à Paris (Salle Pleyel)...

12 févr. 2018

Ben l'Oncle Soul groove sur les succès de Sinatra

(c) Quentin Curtat
Après un concert sold out au Trianon en avril dernier, Ben l'Oncle Soul était salle Pleyel, vendredi soir, pour présenter les titres de l'album "Under My Skin" en hommage à Frank Sinatra (voir interview sur ce blog le 4 novembre 2016).
Toujours audacieux et décalé, on se souvient que le chanteur d'origine caribéenne avait rencontré un franc succès avec sa soul française. Cette fois, il a choisi de s'attaquer au répertoire d'un véritable monument !
Accompagné par un efficace combo de musiciens, le "Black Moon Band" (platines, guitares électriques, batteries, cuivres...), il évite le piège d'une relecture scolaire pour nous emmener sur des territoires inexplorés par le légendaire crooner américain.
De "My Way" à "I've got you under my skin" en passant par "Fly me to the moon" ou  "New York New York",  c'est tout un florilège de tubes incontournables qui flirtent ici avec le reggae, le blues, la soul, le funk-jazz ou le trip-hop.
Le résultat est d'autant plus saisissant que Ben l'Oncle Soul insuffle un incroyable groove à chacune de ses interprétations.
Au passage, l'artiste a remisé le look un brin rétro de ses débuts (noeud pap', costume et petit chapeau rigolo) pour endosser une tenue plus tendance: lunettes sombres, jean déchiré et blouson lamé.
Avec les années, le timbre a gagné en intensité et en profondeur. Et il faut avouer que ce show, qui tisse de solides passerelles entre les époques et les styles, est à la hauteur du challenge.
Les plus jeunes, nombreux dans la salle, ont ainsi découvert des chansons qui ne figuraient pas forcément dans leur iPod. Quant aux "anciens", les premiers instants de surprise envolés, ils ont manifestement apprécié ce vibrant hommage à celui que l'on surnommait "The Voice".

Album "Under My Skin" (Blue Note/Universal)
Dernières dates de la tournée en France: le 15 février 2018 au Centre Culturel de Provins (77), le 16 février au Centre Culturel Juliette Drouet à Fougères (35), le 17 février au Théâtre de Thalie à Montaigu (85) et le 6 mars au Théâtre Paul Eluard de Bezons.

8 févr. 2018

"Moustache Academy": un show drôle et percutant

(c) Stella K
 D'entrée de jeu, le trio donne le ton d'un spectacle qui se veut à la fois ludique et porteur de messages.
Une sorte de manuel du savoir-vivre ... ensemble !
Mais un manuel rigolo, percutant et musical à destination des plus jeunes. Rien à voir avec un cours ennuyeux et moralisateur puisque les joyeux complices s'expriment en rap et ne lésinent pas sur les loufoqueries en tous genres pour rappeler, s'il en était besoin, qu'il s'agit avant tout d'un divertissement.
Les plus grands se remémoreront les batailles à la cantine, les joies et les angoisses de la rentrée des classes, les rêves de devenir princesse ou Batman, les rivalités pour prendre la place du chouchou auprès de la maîtresse... Mais au-delà de la franche rigolade, "Moustache Academy" (un spectacle sous-titré "Back To School !") parle aussi de la tolérance, des chagrins d'amour, des conflits à la maison, d'écologie, de l'acceptation de l'autre et de ses différences.
(c) Stella K
Derrière les moustaches de cette drôle d'Academy se cachent Astien Bosche, Mathurin Meslay (les auteurs, sur des musiques de Jonathan Oberlander) et Ed Wood.
Avec leurs baskets colorées, ils ont déjà écumé les scènes du Théâtre du Rond-Point, des Trois Baudets, du Gymnase, de l'Européen ou du Festival d'Avignon avec "Le Grandiloquent Moustache Poésie Club".
Il n'y a évidemment rien de grandiloquent ni de paternaliste dans leur démarche mais plutôt une approche tendre, bourrée d'humour et d'intelligence pour lutter contre les clichés et évoquer le quotidien de certains gamins.
Des gamins difficiles à berner lorsqu'il s'agit de capter leur attention. Et à voir leurs bouilles réjouies, la spontanéité de leurs réactions et de leurs applaudissements, on se dit que le pari est gagné haut la capuche !

Jusqu'au 8 avril 2018, les dimanches à 15h30 (sauf le 25 février), au Grand Point Virgule, 8 bis, rue de l'Arrivée, 75015 Paris. Places à 20 € et 15 € (tarif réduit). Offre pack "famille" sur le site.
Infos au 01.42.78.67.03 et billetterie sur http://www.legrandpointvirgule.com/