24 déc. 2014

Le charme espiègle et pétillant des Swinging Poules

(c) Marie-Béatrice Seillant

Avec leurs jupes à pois bouffantes, elles affichent un petit côté désuet, très années cinquante. Côté répertoire, elles puisent dans des standards de la chanson française mais ont aussi déniché quelques perles méconnues (ou presque)  comme « Stop » d’Aimé Barelli ou « Neurasthénie » de Ricet Barrier (et B. Lelou).
Aguicheuses, drôles, faussement ingénues et parfois vraiment féroces, ces demoiselles se livrent sur scène à de délirantes joutes musicales, taillant au passage quelques costards à la gent masculine. A la fois chanteuses et comédiennes, Florence Andrieu, Charlotte Baillot et Caroline Montier n’ont pas grand-chose à voir avec les gallinacées dont elles ont emprunté le nom. A l’évidence, ces poules là ont davantage fréquenté les scènes lyriques que les basses-cours ! On retiendra notamment une reprise décapante de « Fever », le poétique « Syracuse » où elles prennent des poses de cartes postales ou encore la version féminisée de « Tu t’laisses aller ». Sur des arrangements originaux et avec la complicité de leur pianiste (pas toujours à la hauteur vocalement) les Swinging Poules nous offrent ici un spectacle rythmé aussi réjouissant que réussi. Et, lorsqu'elles revisitent le fameux "Dansez sur moi" de Nougaro, on ne résiste pas à l'envie d'abandonner son siège. A voir absolument pour oublier, l’espace d’une heure, la morosité ambiante…
Annie Grandjanin

Jusqu’au 4 janvier, les samedis et dimanches, à 18 heures,  au Grand Point Virgule, 8 bis, rue de l’Arrivée, 75015 Paris. Tél. : 01.42.78.67.03. www.legrandpointvirgule.com


9 déc. 2014

Julia Sarr : « J’ai emmené le piano au milieu de la savane !»


(c) Joseph Johansson
Originaire de Dakar et installée à Paris depuis de nombreuses années, Julia est à la croisée de l’Afrique et de l’Occident. A l’image de son très bel album afro-jazz « Daraludul Yow » dans lequel sa voix pure s’élève pour évoquer, en wolof, la condition des femmes, les enfants et l’exil. Après avoir chanté aux côtés de Lokua Kanza, Richard Bona, Youssou N’Dour, Salif Keita, Oumou Sangaré, Alpha Blondy ou MC Solaar, elle a décidé d'enregistrer ses propres chansons (dont elle a signé la plupart des textes et musiques). Elle est accompagnée ici  de cinq solides pianistes : Jean-Philippe Rykiel, Bojan Z, Mario Canonge, Fred Soul et Samuli Mikkonen. Rencontre avec une belle artiste à découvrir d'urgence.
On évoque une gestation de plus de 5 ans pour « Daraludul Yow ». C’est un peu long, non ?
J’ai pris beaucoup de temps car il s’agit d’une autoproduction enregistrée avec des moyens artisanaux. J’ai du procéder étape par étape. Je n’ai jamais eu l’occasion de lui dire mais je remercie Christophe Maé que j’ai accompagné comme choriste durant 5 ans en tournée. Grâce à mes cachets, j’ai pu financer l'album !
Que signifie le titre ?
Il veut dire : rien d’autre ni personne que toi. C’est la complainte d’amour d’une femme désespérée qui demande à son mari de ne pas prendre une seconde épouse.
Vous avez choisi de privilégier le piano. Pourquoi ?
J'aime dire que j’ai emmené le piano au milieu de la savane ! C’était un pari. On m’a découragée au début en me disant que cela sonnerait trop jazz. La viole d’amour, la kora, le ngoni ou les chœurs donnent une touche organique à l’ensemble. Je trouvais que l'idée de la musique africaine autour du piano était originale. J’évoque souvent ma « presque » double culture. La musique de Ravel me fait autant voyager que celle des griots. Un seul genre musical ne suffit pas à nourrir mon âme.
Pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec Miriam Makeba ?
J’ai accompagné Lokua Kanza à Johannesburg. Il avait réalisé un album («Homeland ») pour elle et j’avais fait la voix témoin, en « yaourt ». Au départ, je devais participer aux chœurs. Une fois là-bas, j’ai eu l’opportunité d’écrire deux couplets en anglais sur le titre « Lindelani » car le texte initial ne plaisait pas à Miriam Makeba. Je conserve le souvenir d'une femme malicieuse, d'une maman. Elle m’a offert un bijou pour mon anniversaire. Je n’ai réalisé son statut d’icône que lorsque je l’ai vue sur scène.
 Quel a été le déclic pour tenter l'aventure en solo ?
J’avais déjà enregistré un disque chez No Format. J'aime aussi être choriste, cela me pousse à être polyvalente. Je vais travailler prochainement avec Francis Cabrel et j’ai hâte d’entrer dans son univers, sa maison.  Mais j'ai toujours besoin d'explorer d'autres territoires dans la chanson. Dans "Daraludul Yow" je raconte mes histoires, avec mes émotions et mes mots.
Propos recueillis par Annie Grandjanin

Le 18 décembre, à 20h30 au Théâtre Cinéma de Fontenay-le-Fleury et le 30 janvier 2015 à 20h30, à l’Alhambra (Festival « Au fil des Voix »), 21, rue Yves Toudic, 75010 Paris. Tél. : 01.40.20.40.25. www.alhambra-paris.com
Album « Daraludul Yow » (L’Autre Distribution).


6 déc. 2014

Des élans… surréalistes



« Dans nos métiers, le plaisir n’a de sens que s’il est partagé » confie Laurent Serrano qui a signé l'adaptation et la mise en scène de ce spectacle baptisé « Les élans ne sont pas toujours des animaux faciles ». 
Et le plaisir est bien là. Celui du public, à l'évidence, mais aussi celui d’Emmanuel Quatra, Benoît Urbain et Pascal Neyron qui évoluent, avec aisance, dans cet univers absurde et décalé. Vêtus de costards-cravates, les trois complices, un verre à la main, devisent sur Verlaine que l’un prétend avoir croisé la veille, le cinéma japonais, le choix du pop-corn sucré ou salé ?, les hauts et les bas d’une ex-petite amie, ce bout d’arc-en-ciel à vendre…sans oublier un plan drague calamiteux où l’objet des élans…amoureux est en fait un proto-type (mi-homme, mi-femme ) !
Mais au-delà de ces sketches que certains comparent volontiers aux fameux « Diablogues » de Roland Dubillard, la jubilation vient surtout avec les intermèdes musicaux. A cappella ou s’accompagnant à la guitare, au piano et au valisophone (un instrument trafiqué à partir d’un manche en bois planté dans une valise), les comédiens-chanteurs ponctuent leurs échanges verbaux…et verbeux, de reprises réussies et très personnelles de « Chanson d’automne » (P.Verlaine/C.Trénet),  « Summertime Blues » d’Eddy Cochran, « They can’t take that » (I. et G. Gershwin) ou « Une bouteille à la mer » (C. Nougaro et M.Vander). Le tout, entrecoupé de compositions originales de Benoît Urbain comme  le surprenant « Extraterrum ». Logique, puisque le trio aborde aussi la question des extra-terrestres...
Annie Grandjanin

Du mardi au vendredi à 21 heures, le samedi à 16h30 et 21 heures, au Théâtre Michel, 38, rue des Mathurins, 75008 Paris. Tél. : 01.42.65.35.02. www.theatre-michel.fr

26 nov. 2014

Mélanie Dahan: « Keys »

Revisiter des standards est toujours un exercice périlleux. Rares sont les artistes qui parviennent à imposer leur « patte » ! Pour un Jeff Buckley dont la superbe reprise d’« Halleluja »  nous a presque fait oublier la version originale de Leonard Cohen, on ne compte plus les pâles copies… 
Avec ce nouvel opus, Mélanie Dahan s’est attaquée à de sacrés morceaux ! De « Everytime we say goodbye » de Cole Porter à « What’s new » de Bob Haggard en passant par « Never said » d’Herbie Hancock et Stevie Wonder  ou encore « Whisper not » de Benny Golson, la vocaliste française n’a manifestement pas joué la facilité. Mais le résultat est à la hauteur: technique vocale irréprochable, arrangements ciselés et une approche résolument contemporaine et inventive.
Pour faire bonne mesure, la demoiselle a eu la bonne idée de faire appel à cinq pointures du piano : Baptiste Trotignon, Pierre de Bethmann, Manuel Rocheman, Franck Amsallem et Thomas Enhco, à charge pour chacun d’entre eux de proposer deux relectures inédites de ces succès du répertoire américain. Le batteur cubain Lukmil Perez et le contrebassiste Thomas Bramerie complètent harmonieusement l’ensemble.
Annie Grandjanin
  
Les 27 et 28 novembre, à 21 heures, au Sunset, 60 rue des Lombards, 75001 Paris. Tél. : 01.40.26.46.60. Prix : 25 €. http://www.sunset-sunside.com/concert/2014/11/
Et les 23 et 24 janvier 2015, au Duc des Lombards, 42, rue des Lombards. Tél. : 01.42.33.22.88. 
Album « Keys » (L’Autre Distribution).




18 nov. 2014

Lokua Kanza : « Je n'oublierai jamais Jean-Louis Foulquier »


Les années qui passent semblent n’avoir aucune prise sur lui. Et la notoriété n’a pas non plus abîmé sa belle simplicité. « Je n’ai jamais fait partie du star-system » confie Lokua Kanza qui fête cette année ses vingt ans de carrière. Et lorsqu’on l’interroge sur sa trop rare production (son dernier opus « Nkolo » est sorti en 2010),  il répond en riant : « Enregistrer un album demande beaucoup de maturité. Il faut du temps... »
On se souvient de ses débuts, lorsqu’il chantait en s’accompagnant à la guitare dans les rues de la Rochelle, tandis que ses aînés se produisaient au Festival des  Francofolies. Impossible de ne pas s’arrêter pour découvrir ce jeune zaïrois au timbre cristallin.
Quelques années plus tard, Jean-Louis Foulquier choisira de le mettre en vedette lors d’une soirée baptisée « La fête à Lokua ». « Je n’oublierai jamais cet homme.  A l’époque, il a dit : je veux mettre ce garçon sur la grande scène. Il m’a offert le plus beau des cadeaux. ». Même émotion, lorsque le chanteur a assuré la première partie de Jean-Louis Aubert au Zénith. Même si là, le cadeau semblait un peu… empoisonné ! « Quand tu commences à jouer et que tout le monde se met à crier « casse-toi ! », c’est plutôt dur, mais j'ai continué". Au bout d’une ou deux chansons, le public tombe sous le charme et la tournée se poursuivra avec succès.
Le succès, l'ancien musicien de la diva Abeti l'a rencontré dès la sortie de son premier disque éponyme en 1993. On dit volontiers que sa vocation est née en écoutant Miriam Makeba. Mais on oublie parfois qu’il  a eu le bonheur de donner la réplique à la star sud-africaine dans l’album « Homeland » et qu'il lui a écrit trois chansons. Et il demeure à ce jour l’un des rares artistes africains (sinon le seul) a avoir composé pour Nana Mouskouri (« Chemin de la joie »). Il a également coiffé la casquette de producteur pour Sara Tavares (« Mi Ma Bo ») et Pedro Guerra (« Tan Cerca de Mi »), sorti un bel album collégial "Toto, Bona, Lokua" (avec Gérald Toto et Richard Bona), chanté en français dans "Plus vivant" concocté avec la complicité d'auteurs comme Camille, Belle du Berry ou Marie Nimier, a reçu deux prix pour des musiques originales de films...
Chanteur, musicien, arrangeur, compositeur, producteur… Lokua possède bien des talents. « Je ne sais pas tout faire ! Mais certaines choses sont venues naturellement, parfois malgré moi. Quand tu es un jeune artiste et qu’on te demande combien tu as vendu de disques avant d’accepter de travailler avec toi…tu es bien obligé de t’y coller tout seul  et d’assumer». Assumer, il a appris à le faire dès son plus jeune âge « J’étais l’aîné de la famille et je suis devenu assez vite le « papa » de mes frères ». Un sens des responsabilités et de l'engagement qui l’ont conduit naturellement à défendre la cause des femmes violées en Afrique. Il a récemment signé la musique d’un reportage qui dénonce ce fléau. « Je suis allé dans un hôpital où l’on soigne les blessures physiques et psychologiques subies par ces femmes. J’ai parfois honte d’être humain » confie-t-il.
Citoyen du monde, il revient de Rio où il a vécu plus de deux ans. « A chaque fois que l’on se frotte à une autre culture, il en ressort quelque chose. J’ai travaillé là-bas avec de nombreux artistes réputés. Leur musique et leur simplicité m'ont touché. On se retrouvait souvent entre nous, juste pour le plaisir de jouer ensemble. Au Brésil, j’ai retrouvé l’Afrique mais avec davantage d’harmonies ». Il songe d'ailleurs à franchir l’Atlantique pour s'immerger dans la culture américaine. Mais c'est une autre histoire...
Pour l'instant, Lokua Kanza a repris le chemin des studios pour l’enregistrement d’un album qui devrait marquer ses vingt ans de carrière (sortie prévue en 2015). Il a déjà réuni autour de lui Ray Lema, Manu Dibango, Richard Bona, Wasis Diop, le batteur et percussionniste de jazz Paco Sery…  « De grands artistes que j’adore. Cela devrait bouger ! J’y mets beaucoup de mon cœur et de mon âme.» Comme dans tout ce qu'il a produit depuis ses débuts…
Annie Grandjanin

12 nov. 2014

Le pessimisme heureux de Fabien Martin


C’est un peu le retour de Martin… puisque le chanteur a attendu pas loin de sept ans après l’album « Comme un seul homme » pour sortir, en mai dernier un EP baptisé « Littoral ». Comme par le passé, il évoque le temps qui passe, le spleen d’un homme pas toujours à l’aise dans ses baskets et dans son époque, avec une poésie et un humour au second degré que l’on avait pu apprécier dans son premier opus « Ever Everest ».
Symboliquement emmenées  par le bien-nommé « Le phare », des chansons comme « La croisière s’emmerde », « J’aime pas »  « La touche étoile » ou « Ciel de traine » balisent un univers intemporel dont  Fabien Martin dessine les creux et les reliefs avec une nonchalante mélancolie, teintée d’élans joyeux . « De la variété mal rasée » comme il la définit lui-même, qui lorgne du côté de la pop anglo-saxonne et dont il a signé paroles et musiques. Parmi les musiciens figurant sur l’EP, on découvre le copain Mathieu Boogaerts à la batterie. Et c’est un autre copain qui a eu la bonne idée de lui ouvrir son appartement pour une série de concerts privés et intimistes « In the Loft », présentés cet été. Il investit demain une « vraie » scène pour un tour de chant qui mêlera anciens et nouveaux titres et peut être, en primeur, un ou deux morceaux de son nouvel album annoncé pour début 2015.
Annie Grandjanin
 
Le 13 novembre, à 20 heures, aux Trois Baudets, 64, bd de Clichy, 75018 Paris. Tél. : 01.42.62.33.33. www.lestroisbaudets.com

8 nov. 2014

« Qui chante ce soir ? », par Jean-Claude Barens

 
Auteur de ces fragments biographiques (presque) imaginaires, Jean-Claude Barens qui fut notamment le directeur du FestiVal-de-Marne, de 1993 à 2012 nous propose un ouvrage aussi passionnant qu’insolite.
Plutôt que de brosser des portraits traditionnels (souvent redondants), il livre  ici des petits instantanés de vie, laissant au lecteur le choix de démêler la fiction de la réalité.
Vingt profils suivis de photographies (réalisées par Francis Vernhet), le tout présenté dans un joyeux désordre. Le but ? Associer le texte et l’image. Au hasard des pages, on découvre ainsi la diva de Savoie, une Madelon dévergondée dont le papa tenait le pupitre des saxophones ou des clarinettes à l'Orchestre du Capitole, une diplômée d’urbanisme bercée par les musiques orientales et passionnée de country américaine des années 40, un petit auroch chez les Amerloques, Féfé ou encore un frenchy rencontré sur les bancs du Berklee College of  Music …
Catherine Ringer
(c) Francis Vernhet
Bon prince, l’auteur parsème ses énigmes d’indices qui devraient permettre au lecteur de ne pas se précipiter page 139 où se trouvent les solutions. Alternant le je et la position de l’observateur, Jean-Claude Barens séduit et intrigue avec ce procédé original et une écriture dont la savoureuse poésie fleure bon sa Gascogne natale.
Allain Leprest
(c) Francis Vernhet
« Les mots ont un pouvoir magique et la politesse élémentaire de la musique, c’est de donner de l’énergie » confie l’un des personnages dans « Qui chante ce soir ? ». 
Et il y a assurément de la magie, de la musique et de l’énergie dans ce livre. De la tendresse aussi pour ces artistes qui ont croisé la route de cet amoureux de la chanson. On soupçonne qu'après avoir créé et présidé une bonne douzaine de festivals (Chantons sous les pins, La Parade des cinq sens, les Océaniques, les Tempos du monde...) il a d’autres souvenirs dans sa besace…alors on attend la suite avec impatience !
Annie Grandjanin

Editions/Productions jcbarens 2014, 20 €



7 oct. 2014

La virtuosité vocale de Cinq de Cœur: un atout imparable

(c) Charlotte Spill
Comme le Quatuor ils puisent dans un vaste répertoire qui va du classique au rock en passant par le lyrique, la variété ou le jazz. Mais alors que leurs illustres aînés sont des musiciens accomplis…eux n’ont pas d’autre instrument que leur voix ! Cinq plus exactement : deux sopranos, une alto, un ténor et un baryton. Après « Chasseurs de Sons » et « Métronome » Cinq de Cœur présente son nouveau spectacle « Le concert sans retour », mis en scène par Meriem Menant, (alias Emma la Clown). Coincé dans un programme romantique allemand, le quintet ne tarde pas à se saborder, jetant aux orties robes longues et smokings noirs, pour s'échapper vers des contrées plus souriantes. Une boule à facettes apparaît alors sur scène, donnant le ton d’un concert totalement débridé où les partitions de Saint-Saëns, Brahms et Bizet croisent le fer avec des titres de Léo Ferré,  Scorpions, Simon & Garfunkel, Francis Lopez,  Mylène Farmer, dans des joutes musicales de haute portée ! On salue au passage l’arrivée de deux nouvelles recrues : Hélène Richer et Fabian Ballarin. La première, membre fondateur de la Compagnie Soleil de Nuit, rayonne littéralement sur scène tandis que le second, adepte de la beatbox, nous enchante dans le rôle du rockeur-séducteur. Les « anciens » Pascale Costes, Sandrine Mont-Coudiol et Patrick Laviosa sont toujours excellents. On regrettera peut-être l’absence de décors qui auraient pu ajouter quelques touches de folie, mais les fidèles, et ils sont nombreux, vous diront que leur virtuosité vocale est leur plus bel atout...
Annie Grandjanin

Du mercredi au samedi à 21 h, mat. dim. à 17 h, au Théâtre le Ranelagh, 5, rue des Vignes, 75016 Paris. Tél. : 01.42.88.64.44. www.theatre-ranelagh.com

1 oct. 2014

Jean Guidoni: "Avec Leprest, j'ai retrouvé le plaisir et l'envie".

(c) Chloé Jacquet
Après le spectacle  « Où vont les chevaux quand ils dorment  », Jean Guidoni s’offre un nouveau voyage dans la poésie d’Allain Leprest avec « Paris-Milan ». Un bel album de chansons inédites, mises en musique par Romain Didier, dans lequel il donne notamment la réplique à Juliette sur « Trafiquants ».  Rencontre avec l’artiste avant son retour attendu sur la scène du Théâtre de la Ville.
Comment est née l’idée de cet album ?
Le producteur Didier Pascalis m’a dit qu’il avait 3 textes inédits d’Allain et il m’a demandé si je voulais les enregistrer. Puis, il m’a rappelé pour me dire qu’il y en avait davantage et qu’on pouvait faire un disque. A l’époque, j’avais d’autres projets mais je n’ai pas réfléchi et j’ai dit oui tout de suite. J’avais déjà baigné dans cette atmosphère avec le spectacle « Où vont les chevaux quand ils dorment » que j’ai chanté avec Yves Jamait et Romain Didier. Il y a chez cet artiste quelque chose d’universel. Chacun peut se prendre son Leprest !
Il a pourtant eu une reconnaissance tardive, voire posthume ?
Cela me fait râler qu’il ne soit pas reconnu à sa juste valeur. C’est une grande injustice car c'était un vrai poète. Je le compare un peu à Prévert. Pour moi, c’est aussi grand. A la lecture de ses textes, j’éprouve  la même émotion que celle que j’ai eue avec Pierre Philippe. J’ai retrouvé le plaisir et l’envie.
Tu ne souhaites pas que l’on parle d’hommage ?
Je n’aime pas trop cette idée.  J’ai eu envie de faire ce travail, comme s’il était encore là, dans le respect de l'homme et de l'artiste. C'est pourquoi, je n'ai pas voulu interpréter des chansons trop intimement liées à sa vie.
Tu l’avais déjà rencontré ?
Oui. La première fois, nous avions été invités par Yves Mourousi pour un gala au profit des infirmières. Et la dernière fois que je l’ai vu, c’était lors d’un co-plateau au festival d’Aubervilliers. Nous avions une manière différente d’aborder ce métier. Je ne suis pas sûr qu’il aimait la scène autant que moi. Il était plus bohème.
On sent une belle complicité dans le duo avec Juliette sur « Trafiquants » ?
Nous avions déjà chanté ensemble « La chasse à l’enfant » de Prévert. Juliette est quelqu’un qui fait  partie de ma famille !
Peux-tu nous parler de ce nouveau spectacle ?
Le répertoire sera évidemment en grande partie celui de l’album « Paris-Milan », avec quatre de mes anciennes chansons dont « Djemila » et « Je marche dans les villes » et d’autres d’Allain qui ont surtout été interprétées par Romain Didier. Je serai accompagné de quatre musiciens dans une mise en scène de Gérard Morel avec qui j'ai déjà eu le plaisir de travailler.
Pourquoi as-tu choisi la chanson « Paris-Milan » pour le titre de l’album ?
J’aime bien cette idée d’un voyage simple, sans bling-bling, un peu à l’image d’une humanité en désarroi. Et ce refrain dans la chanson qui dit : « horizontalement le sablier ne sert à rien, c’est renversant… ». J’ai toujours été touché par la manière dont il maniait le verbe et les mots. La grandeur d’Allain Leprest est tellement humaine…
Peut-on espérer un prochain spectacle de Guidoni chantant Guidoni ?
Le projet est toujours là mais j’ai de plus en plus de mal à accoucher de nouvelles chansons…
Propos recueillis par Annie Grandjanin

Le 14 octobre, à  20 h 30, au Théâtre de la Ville, 2, place du Châtelet, 75004 Paris. Tél. : 01.42.74.22.77. www.theatredelaville-paris.com

Album « Paris-Milan » (L’Autre Distribution), sortie prévue le 13 octobre.

22 sept. 2014

Bruno Guglielmi, un artiste pas ordinaire...




« Depuis une dizaine d’années, je joue mes chansons partout où il y a de la lumière » explique cet auteur compositeur qui  a donc sillonné les routes pour se produire dans les bars et les festivals. Une chance que ce batteur de formation ait finalement opté pour la guitare ! Son instrument en bandoulière, il n’a pas non plus attendu que les majors lui fassent les yeux doux pour graver ses chansons (dans son appartement) sur un premier album autoproduit « La vie ordinaire de Bruno Guglielmi ». Un opus, porté par le single « Le rire des balançoires » qui a notamment attiré l’attention de Maxime Le Forestier. Ce dernier l’a ainsi invité aux « Nuits de Champagne » puis en première partie de ses concerts au Casino de Paris (en septembre 2013).
Il a y quelques jours, Bruno Guglielmi a sorti « Empaillé », un second disque acoustique, toujours autoproduit, mais enregistré cette fois dans la maison de campagne de Maxime. Onze chansons dont certaines ont été écrites avec la complicité d’Arthur Le Forestier (le fils de Maxime) et Jean-François Pifferi. D’aucuns évoquent à son sujet une filiation avec Souchon, Biolay ou Renan Luce. Mais Bruno a incontestablement une identité artistique, une originalité et une poésie bien à lui. Et, lorsqu’il nous chante ses tranches de vie (pas si ordinaire !) dans lesquelles il rêve de finir debout et fier dans son salon (« Empaillé »), dans la peau d’un pigeon pour courtiser sa belle depuis le balcon  (« Le pigeon »), parle sans pathos de l’absence (« La petite lâcheuse ») ou demande à son amour (en duo avec Alizé Oswald) de fuir avant la tempête et la tiédeur dans le titre « Va-t-en », on se dit qu’il est grand temps que cet artiste sensible et inspiré ait les honneurs des projecteurs et des grandes scènes. Pour l’heure, il part à l’abordage de la  jonque chinoise de la Dame de Canton. On promet d’être sur le pont !
Annie Grandjanin


Album « Empaillé », disponible depuis le 15 septembre. En concert, le 24 septembre, à 20 h 30 (avec Artur Le Forestier en première partie), à la Dame de Canton, Quai François Mauriac, 75013 Paris. Tél. : 01.53.61.08.49. www.damedecanton.com

16 sept. 2014

Beau succès pour Caroline Loeb et... George Sand !

(c) Pauline Belmonte
Séances de rattrapage pour celles et ceux qui l’ont ratée à Paris puis au Festival d’Avignon cet été ! 
Caroline Loeb est de retour sur la scène du Théâtre du Gymnase avec « George Sand, ma vie, son œuvre » (voir article du 8 mars dernier sur ce blog).  Mêlant théâtre et chansons, références littéraires et anecdotes, elle rend ici un bel hommage à l'écrivain mais aussi à celle qui fut de tous les combats pour la défense des femmes ou contre l’esclavage. Un spectacle, à la fois joyeux et émouvant, qui nous rappelle que la Bonne Dame de Nohant ne fut pas seulement l’auteur de « La Mare au diable» ou de « La Petite Fadette ».
Annie Grandjanin

Jusqu’au 27 décembre 2014, les jeudis, vendredis et samedis, à 19h45, au Théâtre du Gymnase, salle Marie Bell, 38 boulevard Bonne Nouvelle, 75010 Paris. Tél. : O1.42.46.79.79. www.theatredu gymnase.com



24 juil. 2014

Danielle Thiéry: "Je suis farouchement libre !"

(c) Versilio
Première femme à accéder en France au grade de commissaire divisionnaire, Danielle Thiéry est l’auteur d’une vingtaine de romans policiers et de la série télévisée « Quai n°1 ». En 2013, elle a reçu le Prix du Quai des Orfèvres pour « Des clous dans le cœur ». Dans son dernier ouvrage « Echanges », un polar sombre et captivant, elle met une nouvelle fois en scène son héroïne Edwige Marion. Victime d’hallucinations après avoir reçu une balle dans la tête, l'enquêtrice de la Crim s’attache pourtant à résoudre une affaire vieille de vingt ans.  Les 6 et 7 septembre prochains à Fouras, l’auteur coiffera cette fois la casquette de marraine pour le lancement du Festival « Tribus Polar ».  
En acceptant d’être la marraine de cette première édition, vous affirmez votre esprit pionnier, non ?
Sans doute. Je déteste mettre mes pieds dans des pantoufles et emprunter des sentiers battus. J’aime les défis parce qu’il y a toujours quelque chose à la clef. On va tout mettre en œuvre pour qu’il y ait une deuxième, une troisième édition, etc… Pour moi, c’est un honneur. Je serai une marraine présente et attentive.
Vous avez participé à de nombreux jurys. Quels sont vos critères pour juger un polar ?
Je ne juge jamais mais un auteur qui prend des libertés. Je pratique moi-même la licence littéraire. Mais si l’on fait parler un médecin, même pour deux ou trois phrases, il faut éviter de lui faire dire des bêtises.  Lorsque je mets le nez dans un bouquin, j'attends qu'il soit bien écrit, qu'il y ait un vrai travail éditorial. Après, c’est le page-turner, le mouvement…
Justement, on reproche souvent aux séries policières françaises de manquer de rythme ?
Il y a comme une malédiction sur le sujet. Il y a des années, je me suis fait jeter lorsque j’ai proposé un concept sur la police scientifique. On m’a répondu que ce n’était pas l’avenir ! On prétendait que ce n'était pas visuel et que les téléspectateurs risquaient de d’ennuyer. A l’époque, on ne voyait que par les profilers. Les anglais savent faire de bonnes séries, raconter une histoire, faire monter la tension. On n’a pas forcément besoin de faire des trucs décalés. Pourquoi, par exemple,  aller chercher des flics en fauteuil roulant ?
Comment expliquez-vous cet engouement pour le polar qui fut longtemps considéré comme un genre mineur ?
C’est vrai qu’à une certaine époque on parlait de sous-littérature, de romans de gare. Le succès commercial n'est pas forcément synonyme de qualité ! IL y a eu un signal important lorsque de plus en plus d’auteurs se sont lancés dans la littérature policière. Le genre s’est aussi enrichi avec les écrivains du Nord. Cela relève de la fascination parce qu’on touche à la mort. On porte tous une certaine violence en nous.  
« Echanges » est la dixième aventure d’Edwige Marion. Son parcours professionnel ressemble un peu au vôtre ?
Oui, sauf que moi, je n’ai jamais travaillé au 36 ! On met tous un peu de nous dans les bouquins. Mais je songe de plus en plus à me séparer d’elle.
Vous allez la tuer ?
Un personnage récurent est un confort mais c’est aussi pesant. J’ai un lectorat fidèle et lorsque j’ai émis l’idée de la faire disparaître, il y a eu des réactions surprenantes. Un éditeur allemand a dit que si elle mourait, il ne poursuivrait pas sa collaboration avec nous. On n'est pas dans Conan Doyle mais quand il a tué Sherlock Holmes, il a bien été obligé de le faire revivre avec des bouts de ficelle. Les gens s'attachent et cela n'est pas sans conséquences. Alors, non, je ne vais pas la tuer mais je vais probablement cesser d’écrire sur elle. Edwige m'empêche de dévier vers d'autres choses. Et je suis farouchement libre !
Propos recueillis par Annie Grandjanin
  
«  Echanges » (Editions Versilio)
Festival « Tribus Polar », les 6 et 7 septembre 2014, sur la presqu’île de Fouras (près de la Rochelle). Infos sur la page Facebook "Festival Tribus Polar".


21 juil. 2014

Mouloudji: vingt ans après...

« Longtemps, longtemps, longtemps après que les poètes ont disparu, leurs chansons courent encore dans les rues… » chantait Trénet. Pourtant, vingt ans après la mort de Marcel Mouloudji, on peut s’interroger sur la place qu’il occupe encore dans les mémoires. Pour certains, il demeure l'interprète de « Comme un p’tit coquelicot ». Une chanson qu’il n’a pas écrite (le texte est de Raymond Asso) mais qui est marquée, de manière indélébile, par son timbre si particulier. Les cinéphiles avertis se souviendront de ses talents d’acteur (« Les disparus de Saint-Agil » de Christian-Jaque, « Nous sommes tous des assassins » de Cayatte…), les amateurs de l’esprit rive gauche rappelleront sans doute ses tours de chant consacrés à Vian ou Prévert au Vieux-Colombier…mais le public a parfois oublié le peintre, le producteur et éditeur qui lança notamment la carrière de Graeme Allwright, l’homme de convictions qui chantait dans les usines et participa notamment à un gala de soutien à la gauche chilienne, l’auteur d’ « Enrico », un ouvrage de mémoire, écrit alors qu’il avait tout juste 20 ans, couronné par le Prix de la Pleiade ou encore le pacifiste qui interpréta pour la première fois « Le déserteur » en 1954, le jour même de la chute de Diên Biên Phu.
«Je voulais faire découvrir aux jeunes générations l’artiste qu’il a été » confiait récemment Annabelle Mouloudji, lors de la présentation de l’album « Hommage à Mouloudji – En souvenir des souvenirs… » et du livre « Mouloudji, athée ô grâce à Dieu » dédiés à son père. Un travail auquel elle s’est attelée avec son frère Grégory et la complicité artistique de Laurent Balandras.
Au travers d’anecdotes, de documents exclusifs et de photos inédites, l'ouvrage permet aux enfants de Mouloudji  de raconter ce père avec lequel le dialogue s’est interrompu le 14 juin 1994. « Il est toujours avec moi » ajoute Gregory dont le timbre et les traits rappellent étrangement la figure paternelle. Plus jeune, Annabelle a moins de souvenirs mais elle a réécouté tous ses vinyles pour le choix des chansons de l’album réalisé et arrangé par Frédéric Lo. Ce dernier lui donne d’ailleurs la réplique sur « Enfin, tu me viendras » (la chanson préférée d’Annabelle !). « Vous dites Mouloudji et aussitôt, on vous accueille avec bienveillance » explique Laurent Balandras. Louis Chedid, Christian Olivier (des Têtes Raides), Alain Chamfort, Daphné, Jil Caplan…ont volontiers participé à cet hommage en revisitant des titres tels que « Un jour tu verras », « Faut vivre », « L’un à l’autre étranger »… et des raretés comme « Six feuilles mortes de San Francisco »,  Un disque qui se termine par «Il est né à Paris » un texte de Mouloudji, lu par son fils.
D’autres événements comme la réédition d’ « Enrico » ou la sortie chez Universal,  des concerts au Théâtre de la Renaissance en 1975, devraient célébrer le vingtième anniversaire de la disparition de celui qui se définissait ainsi: « Catholique par ma mère, musulman par mon père. Un peu juif par mon fils, bouddhiste par principe. Alcoolique par mon oncle, névrosé par grand-mère. Sans classe par vieille honte. Dépravé par grand-père. Athée, ô grâce à Dieu ! »…
Annie Grandjanin

Album « Hommage à Mouloudji - En souvenir des souvenirs... » (Discograph) et livre « Mouloudji, athée ô grâce à Dieu » (Editions Carpentier).



8 juil. 2014

Thomas de Pourquery : « Sun Ra était un punk avant l’heure ! »


(c) Sylvain Gripoix
Avec sa barbe et sa stature imposante, on l’imagine volontiers dans un remake de "Raspoutine" ou endossant le maillot d'un pilier de rugby. Mais c'est sur la scène des festivals ou dans les clubs que ce fougueux musicien donne la pleine mesure de ses multiples talents et de son goût pour le jazz, la pop, le rock ou le funk. Saxophoniste, chanteur, compositeur... Thomas de Pourquery rêvait en fait de jouer de la trompette ! «Lorsque je suis allé dans un magasin d’instruments de musique, avec mes parents, il n’y en avait plus, alors je suis reparti avec un saxophone » se souvient-il. Plus tard, Stefano Di Battista est passé par là et il a délaissé le ténor au profit de l’alto. Voilà pour la petite histoire. La grande histoire étant bien sûr « Play Sun Ra », son premier disque en tant que leader, couronné par une Victoire du Jazz 2014 dans la catégorie "album de l'année". Un album qui a bien failli ne jamais voir le jour. Victime d’un cambriolage, Thomas s’est fait voler son ordinateur et le disque dur contenant tout son travail. « Il y avait là tous les arrangements des morceaux que nous devions répéter 15 jours plus tard. J’ai passé une semaine de désespoir total. Puis, j’ai décidé de réécouter Sun Ra, juste pour voir ce qui allait se passer. Un peu comme on fait son deuil. Cela a duré deux jours et je me suis laissé emporter. C’était complètement mystique. J’ai eu un nouveau coup de foudre » confie-t-il. D’aucuns évoqueront plutôt un coup de génie car Herman Poole Blount, dit Sun Ra est un compositeur mal connu dont la musique est réputée « injouable ». «C’était un alchimiste. Il créait ses morceaux en fonction de la fréquence de telle ou telle note. Nous l’avons vérifié. Dès que l’on commence à jouer, il se passe un truc incroyable, comme une transe » explique Thomas. Alors qu’on célèbre cette année, le centenaire de sa naissance, Sun Ra, demeure pour beaucoup un personnage cosmique, une sorte de gourou qui prédisait l'arrivée des extra-terrestres. « Il faisait partie de l’afro-futurisme. Il prétendait qu’il venait d’une autre planète (Vénus) pour gommer toute idée de race. Comme tous les génies, il avait cette part de folie. C'était l'un des pionniers de l'électronique, même si son moteur était Duke Ellington. Il a produit dans tous les genres, du hardcore aux chansons pop et inspiré des groupes comme Sonic Youth. Le cantonner au free jazz, comme c'est souvent le cas, est assez réducteur. Si je devais le définir, je dirais que c’était un punk avant l’heure !».
Accompagné du groupe Supersonic, six musiciens venus d'horizons divers ("MegaOctet", "Sacre du Tympan", "Poni Hoax"...) qui sonnent comme un véritable big band, Thomas s’est attaché à retranscrire, presque amoureusement, la flamboyance et la poésie de Sun Ra. Une musique dans laquelle il a baigné très tôt puisque sa mère le berçait déjà avec «Enlightenment ». Mais il n'aime pas trop que l'on parle d'hommage: « Je trouve cela un peu morbide. L’idée est de jouer, de fêter un compositeur, comme on le fait pour Bach ou Mozart ».
 Lorsqu’il n’est pas en tournée, Thomas de Pourquery joue aussi … devant une caméra ! «C’est la cerise sur mon grand gâteau. J’ai fait un moyen métrage «Il est des nôtres » (de Jean-Christophe Meurisse) qui a été un peu remarqué. J'ai eu la chance d'être bien dirigé. Du coup, on m’a ensuite proposé « Tristesse Club », avec Ludivine Sagnier et Laurent Lafitte et je tourne actuellement avec Izia Higelin et Fred Poulet ». Le film devrait sortir cet hiver, à la la même période que son premier album de chansons pop en anglais, enregistré avec le groupe Viking.
Boulimique ? Eclectique ? Thomas de Pourquery est surtout un passionné qui refuse de bouder son plaisir et de se laisser enfermer dans un genre. « Je rêve de festivals où l’on jouerait aussi bien des sonates de Bach que de l’électro et de la pop. Mon plus grand fantasme : le jour où il ne restera que la musique… »
Annie Grandjanin

Album "Play Sun Ra" sorti le 6 janvier dernier. 
En tournée: Le 13 juillet, The Endless Summer, Festival Chauffer dans la noirceur, à Montmartin-sur-mer, 29 juillet, Festival de Jazz à Vannes, le 30 juillet avec Médéric Collignon et Vincent Artaud à Toulouse, le 19 août avec Andy Emler au Festival Jazz de Cluny, le 22 août avec Supersonic au Festival de Malguenac, le 9 sept. avec Viking au Cabaret Sauvage, Festival Jazz à la Villette, le 20 sept. avec Supersonic au Festival Tribu de Dijon....







26 juin 2014

Bénabar: «Je n’ai jamais cherché à être quelqu’un d’autre ! »

(c) Levillain/Kovalsky
Trois ans après « Les bénéfices du doute », Bénabar a repris le chemin des studios pour enregistrer l'album « Inspiré de faits réels » dont la sortie est prévue le 25 août prochain. Douze chansons dans lesquelles on retrouve son goût et son talent pour raconter des tranches de vie  poétiques ("Le regard", "Les couleurs", "Belle journée"), drôles ("Gilles César", "Coming In",) et tendres ("Titouan"). Rencontre avec un artiste qui a conservé la simplicité de des débuts. A l'époque où il chantait avec "ses associés".
Peut-on se fier au titre de l’album ?
Tout est quasiment autobiographique. Et si ce n’est pas moi, c’est assumé. Je dirais même que c’est revendiqué. On m’a parfois reproché de trop m’attacher au quotidien. Là, j’enfonce le clou !
Ton album précédent s’est un peu moins vendu, non ?
Je comprends tout-à-fait qu’il y ait des disques plus ardus, intermédiaires. Cela ne me fait pas peur, du moment que ça repart !
Tu ne te sens pas « d’occase », comme tu le chantes dans « Paris By Night » ?
J’ai toujours la pêche quand je sors un disque ! Et celui-là est joyeux, plutôt lumineux. On a bien travaillé avec les musiciens qui m'accompagnent en tournée. Je n’ai pas cherché à trouver une couleur. C’est la raison pour laquelle je n'ai pas pris de réalisateur.
La chanson « La forêt » n’est pas vraiment joyeuse ?
Cela faisait un moment que je voulais évoquer le côté psychanalytique des cauchemars de l’enfance. Ces angoisses que tu peux ressentir dans le noir, dans un environnement où tout semble hostile.
Rien à voir avec le petit côté Broadway de « Sur son passage » ?
C'est vrai qu'on s'attend presque à me voir descendre un escalier, entouré de girls. C'est un de mes fantasmes !
Avec « Coming In », tu abordes la discrimination à l’envers ?
Prendre le contre-pied permet de parler de l’homosexualité avec humour. L’égalité passe aussi par là...
Tu as eu de bonnes critiques pour tes premiers pas au cinéma. D'autres projets ?
J'ai eu la chance du débutant ! Cela m'a beaucoup plu mais j'ai du refuser d'autres propositions. Je suis toujours sur les routes et c'est compliqué de bloquer plusieurs mois pour un tournage. Je me prépare pour le Palais des Sports au début de l'année prochaine et une tournée des Zénith de France. Nous allons lancer un pack famille à 100 € pour 4 personnes. Comme beaucoup d'artistes de ma génération, je milite pour que le prix des places reste accessible au plus grand nombre.
Avec ce nouvel album, tu confirmes également ton attachement à la chanson française ?
J'ai toujours défendu la chanson française et le côté chanteur populaire. Un peu en dehors du culturellement correct tout de même ! Je n'ai  pas eu le fantasme gainsbourien de faire un album de reggae. Même si je trouve cela très bien. Paradoxalement, avoir été la cible de toute une frange de journalistes et de chanteurs en vogue, cela m’a aidé à me situer. J'assume la constance d'être dans le même sillon et de ne copier personne. Je n'ai jamais cherché à être quelqu'un d'autre...
Propos recueillis par Annie Grandjanin

Album « Inspiré de faits réels » (Jive/Epic). Sortie le 25 août.
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2 juin 2014

Le monde selon Ernest

(c) DR

Sur scène, le chanteur apparaît en redingote et chapeau haut-de-forme dans un décor qui emprunte à l’imaginaire de Jules Verne et aux personnages de Tim Burton. Les instruments sont customisés et les musiciens portent d'étranges patronymes tels que Le Marin Mary, Docteur Wetterer, Le Barbier Bernhardt... Dès les premières notes, on entre dans l'univers fantasmagorique d'Ernest, un auteur- compositeur qui confesse sa passion pour le XIXème siècle, les impressionnistes, Gainsbourg et Hans Christian Andersen ! L'écrivain danois lui a en effet inspiré les chansons de l’album « Les Contes Défaits ».  Ainsi, de « L’Epouvantail » à « La p’tite aux allumettes » en passant par « Les cygnes sauvages », il nous raconte, d'une voix puissante et légèrement éraillée, des histoires à la fois poétiques et cyniques où l'on croise Boucle d'Or et la petite sirène, où les petites filles se réchauffent avec du crack, où la princesse au petit pois attend son prince charmant retenu sous d'autres draps...
 On aura beau chercher des filiations, l'artiste ne ressemble décidément à personne. Et ce n'est pas la moindre de ses qualités ! Après une  reprise réussie d'Elisa" de Serge Gainsbourg, il annonce une chanson drôle sur ce sentiment d'être moyen ("La valse des moyens"). Aucune crainte pour Ernest qui ne devrait pas tarder à jouer dans la cour...des grands !
Annie Grandjanin

Le 13 juin, à 22 heures, au Sentier des Halles, 50, rue d’Aboukir, 75002 Paris. Tél. : 01.42.61.89.90. Places : en prévente 11 €, sur place 13 € et adhérent 10 € ; www.lesentierdeshalles.fr. Et le 25 septembre, à 20 heures, aux Trois Baudets, 64, bd de Clichy, 75018 Paris.

Album « Les Contes Défaits » (L’Autre Distribution) ‘

30 mai 2014

Agnès Bihl, la frondeuse


(c) Magali Bragard
A ses débuts, elle affichait un petit côté « L’école est finie » avec ses couettes et sa sage jupe plissée. Mais on imagine que, dès son plus jeune âge, la blondinette était  déjà plus attentive aux autres qu’à la couleur de ses socquettes !
En cinq albums, Agnès Bihl s’est  imposée comme l’une des plus jolies et insolentes plumes de la chanson française. Une plume incisive, voire corrosive qui met aussi l’accent sur les vertus de la tendresse et de l’humour. A l’image de son spectacle « 36 heures de la vie d’une femme » (parce que 24 c’est pas assez) qu’elle présentait lundi dernier aux Bouffes Parisiens.
 « Je suis une chanteuse engagée » clame-t-elle sur scène. Et engagée, elle l’est assurément : contre l’injustice, le racisme, le sexisme, les petites et grandes lâchetés du quotidien...
Qu’elle évoque la délation avec le poignant « Baiser de la concierge » ou fasse le compte des promesses non tenues dans « Bla bla bla », ses chansons sonnent comme un rappel à l’ordre ou plutôt aux désordres du monde. Au passage, la chanteuse s’autorise des moments de franche rigolade en brocardant l’ex de son amoureux, de tendresse filiale pour « La plus belle c’est ma mère », tout en nous invitant à partager la nostalgie des stars du grand écran de son « Ciné-Club ». Et parce qu’elle revendique son statut de femme moderne, elle n'hésite pas à interpeller le public avec son joyeux « Faites l’amour pas la vaisselle ».
« J’ai des humeurs très entières. Je ne connais pas la tiédeur des choses » confiait-elle récemment en interview. De fait, durant son tour de chant, elle fait constamment souffler le chaud et le froid, le tragique et le comique. Et lorsqu’elle chante « ça n’est jamais pour du beurre les petits bobos, les petits bonheurs » on se dit que s'il y a une artiste qui ne compte pas pour du beurre dans le paysage musical, c'est bien Agnès Bihl...
Annie Grandjanin

Album « 36 heures de la vie d’une femme ( parce que 24 c’est pas assez) » (Banco Music) et recueil de nouvelles (Ed. Don Quichotte), sortis en octobre dernier.

4 mai 2014

Do Montebello: "les mots, je les écoute comme des notes"


(c) Vincent Copyloff
Elle se rêvait musicienne… alors elle joue de sa voix comme d'un instrument ! Et nous transporte, avec une rare musicalité,  dans l’ «Allée des Calfats » (« Travessa dos Calafates ») là où les artisans réparaient les barques pour la pêche, au Minas Gerais (« Minas ») ou encore sur les traces de « Hilda Francisco Acena », une jeune femme déracinée, comme tant d’autres, rencontrée lors d’un séjour aux Caraïbes… Des escales comme autant de partitions poétiques et humanistes que l’on retrouve dans le disque « Adamah » dont le titre, en hébreu, désigne la terre, le sol, l’argile. "Les mots, je les écoute comme des notes. Pour moi, le langage est un chant" confesse Do.
Citoyenne du monde par convictions, artiste par passion, elle nous interpelle en chansons sur l’urgence qu’il y a à préserver la vie, les arbres, les océans... Et Do sait évidemment de quoi elle parle ! Née à Albi, élevée en Algérie, elle a étudié à Paris avant de sillonner la planète, des Caraïbes aux Etats-Unis, en passant par le Brésil. Durant ces périples, elle revisite dans des clubs, des standards du jazz et de la musique populaire brésilienne. A son retour en France, elle s'entoure alors de musiciens et compositeurs tels que Patrick Favre, Sergio Farias ou Ivan Silva pour enregistrer "Adamah" dont elle a signé l'essentiel des textes. Un projet qu'elle porte en elle depuis une quinzaine d'années, comme un hymne à la terre et aux hommes...
Annie Grandjanin
 
Le 7 mai à 21 heures, à l’Européen, 5, rue Biot 75017 Paris. Places : 25 € et 20 € (tarif réduit). Tél. : 01.43.87.29.89. www.leuropeen.info
Et les 18 mai, 22 juin, 21 septembre et 19 octobre, à 21 heures, au Théâtre de Nesle, 8, rue de Nesle, 75006 Paris. Tél.: 01.46.34.61.04. www.theatredenesle.com


22 avr. 2014

Daniel Lavoie: "La Licorne Captive" est une œuvre d’amour !



(c) Josep Molina
Cela fait bien trente ans que le public français est tombé en amour pour le chanteur québécois. Auteur de tubes comme « Ils s’aiment », « Je voudrais voir New York », « Qui sait », il a également endossé avec succès les costumes de Frollo pour Notre-Dame de Paris, de l’aviateur du Petit Prince de Saint-Exupéry, d’Eugène Delacroix dans « Sand et les romantiques »… Cette fois, on le retrouve dans un répertoire aussi dense qu’inattendu pour « La Licorne Captive ». Des contes et légendes, à la croisée du baroque et du médiéval, écrits (sauf deux poèmes de Rimbaud) et composés par Laurent Guardo. Rencontre avec deux artistes entre qui l’alchimie est évidente.
Il paraît que la genèse de ce projet remonte à une quinzaine d’années ?
Laurent Guardo : J’ai commencé en 1999 et j’ai travaillé dessus jusqu’en 2010. Entretemps je composais des indicatifs pour la radio et la télévision à Montréal. Alors que j’étais un illustre inconnu, je me suis permis de rêver en envoyant le disque à Daniel.
Vous avez adhéré tout de suite à ce projet qui sortait un peu de vos cordes ?
Daniel Lavoie : J’ai été un peu dérouté au début mais je suis vite tombé sous le charme. « La Licorne Captive » est une œuvre d’amour. Je n’avais jamais eu la chance de travailler avec des instruments comme les violes de gambe, les gongs tibétains, l’archiluth…C’est aussi gratifiant que difficile. Les violes sont écrites comme à la Renaissance et il fallait trouver sa note. Il est plus facile de mettre de l’emphase dans sa voix que de la retenir. Laurent a hypothéqué sa maison trois fois pour faire ce disque. Moi, je n’ai rien hypothéqué !
Vous prenez quand même le risque de dérouter votre public ?
D.L.. :  Ne croyez pas ça. J’ai la chance d’avoir un public curieux et qui me suit. J’ai choisi ce métier pour la liberté qu’il m’offre et j’ai toujours évité de me mettre trop de chaînes. De toute manière, quand nos enfants respectifs ont été séduits, j’y ai vraiment cru. Il ne peut que plaire à ceux qui ont de bonnes oreilles. Ici, la musique permet de voyager dans un univers à la fois magique, étrange et inattendu. Ce n’est pas un album de musiques anciennes mais contemporaines, avec du baroque, de la renaissance, de la world…
Il y a aussi deux poèmes intitulés « Ophélie » et « Le Bal des Pendus ». C’est la première fois que vous chantez du Rimbaud ?
D.L.: : Oui, et j’espère que ce n’est pas la dernière !  
Envisagez-vous d’emmener cette « Licorne Captive » sur scène ?
D.L. : Probablement. Nous avons fait une présentation sur scène à Montréal et les gens semblaient hypnotisés.  Devant un public, le conte devenait réel.
L.G. : C’était fascinant. Sur scène, on a senti quelque chose qui s’ouvrait. Daniel a réussi à communiquer le plaisir que nous avons eu à faire l’album. Le public lui mangeait littéralement dans la main ! On a tous réalisé qu’en fait, il était un chanteur baroque !
Propos recueillis par Annie Grandjanin


- Album « La Licorne captive » (Le Chant du Monde/Harmonia Mundi), sorti le 25 mars 2014.

15 avr. 2014

Les chansons vitaminées de Gatane


(c) Noémie Lantil/Marie Neubauer
Il a fait des études théâtrales, musicales et mathématiques, mais sur scène, il se présente  comme un thérapeute. Sa spécialité ? Un cocktail vitaminé d’histoires drôles, de swing et de chansons. Une prescription à prendre évidemment par voie auditive ! Et, le 10 avril dernier, les patients en mal d’humour se sont bousculés dans la salle d’attente du Théâtre des Déchargeurs puisque son spectacle « Live Therapy » affichait complet. Auteur-compositeur, ce marseillais installé à Paris a débuté comme pianiste dans des clubs de jazz avant de se lancer dans des spectacles à mi-chemin entre concert et stand-up. Il touche parfois là où ça fait un peu mal comme dans « Dorian Gray », qui évoque les tourments de l’âge et du temps qui passe. Mais l’essentiel de son show est aussi joyeux que déjanté avec des titres comme « Mon ostéopathe est un psychopathe », « Le point G », « Je suis l’homme idéal »…Sans oublier l'addictif "Je marchais dans Paris". Et lorsque pour « Ma meilleure copine se marie » il fustige les perfidies des filles il sait aussi leur rendre un poétique hommage avec « Daltonian Song ». Accompagné d’un batteur et d’un bassiste, le chanteur crée une véritable interaction avec le public qui est même invité à choisir le rythme du dernier morceau entre salsa, rock, reggae, rap…Sur son dernier EP « Gatane 500 mg », il est précisé que parmi les effets secondaires, il faut s’attendre à une rébellion soudaine contre toute forme de musique déprimante. Un artiste à découvrir d’urgence pour se lever de bonne bonne humeur le matin…
Annie Grandjanin

Le 28 mai, à 21h30, au Théâtre des Déchargeurs, salle Vicky Messica, 3, rue des Déchargeurs 75001 Paris. Tél.: 01.42.36.00.50. www.lesdechargeurs.fr
« Gatane 500 mg », nouvel EP en solution Mp3, Lez’Artis Diffusion. Dates des concerts à venir sur le site www.gatane.com

9 avr. 2014

"Les cigales ne passent jamais l'été", par Wladimir Pandolfo


Et si un jour vous receviez une demande d’amitié sur facebook de la part d’une ancienne petite amie décédée il y a plus de 15 ans ? Tel est le point de départ de l’intrigue imaginée par l’auteur.
Directeur artistique d’une maison de disques, enseignant à Sciences Po, Wladimir Pandolfo signe ici son premier roman. « J’ai eu envie d’écrire dans l’esprit d’une série américaine. Que le lecteur reste sur sa faim à chaque fin de chapitre » explique-t-il.
Et le résultat est à la hauteur de l’intention ! Outre une écriture moderne et une description passionnante des quartiers nord de Marseille, on suit avec intérêt les déboires de Gabriel, jeune homme apparemment tranquille, victime de ce qu’il imagine être une mauvaise blague. Très vite, il va replonger malgré lui dans un passé qu’il avait tenté d’oublier. Lorsqu’il disparaît, sa compagne Clara, une jeune journaliste plus habituée aux défilés de mode qu’aux enquêtes d’investigation décide de partir à sa recherche au cœur de la cité phocéenne. Une ville où tout s’est joué il y a une quinzaine d’années…
L’occasion de multiples aller-retour dans le temps, où le virtuel supplante le mode épistolaire, où l’insouciance fait place aux interrogations de l’âge adulte, où les histoires d’amour s’entremêlent, où les fautes d’hier vous rattrapent inexorablement…
Tandis que le titre du livre revient au fil des pages comme une étrange malédiction, l’auteur nous tient en haleine jusqu’au dénouement. « Cette histoire, c’est un peu la chronique d’un échec annoncé » confesse Wladimir. Rien à voir avec l’accueil que les lecteurs devraient réserver à ce polar captivant.
Annie Grandjanin

Parution le 10 avril. Aux Editions Bruit Blanc, Collection Bruit Noir. 236 pages, 14 €.

6 avr. 2014

L'Afrique rêvée de Rivière Noire

(c) Mathieu Simonet

En janvier dernier, le premier album éponyme de Rivière Noire avait créé la surprise. Treize titres métissant folk mandingue et sonorités brésiliennes, enregistrés entre Paris et le studio Moffou de Salif Keita à Bamako.
 A l’origine de ce projet : le chanteur brésilien Orlando Morais (qui a notamment collaboré avec Caetano Veloso et Maria Bethania), Jean Lamoot (basse, guitare, programmation et réalisateur d’albums pour Alain Bashung, Salif Keita, Noir Désir…), un breton qui a passé son enfance entre le Burundi, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Rwanda et enfin le guitariste et chanteur Pascal Danae, d’origine guadeloupéenne. Ensemble, ils imaginent un retour aux sources de leurs aspirations musicales, leur « Afrique rêvée » confie Pascal. 
On attendait évidemment la formation sur scène et c’est dans un Café de la Danse « sold out » (le 1er avril dernier) qu’elle a fait une escale remarquée à Paris. Du somptueux « Bate Longe » à « Londres Paris », en passant par « Te Esperar », « Cuando » ou une superbe reprise du « Sodade » de Cesaria Evora, le groupe porté par le timbre mélodieux et puissant d’Orlando Morais a offert un concert d’une intensité quasiment mystique. Alternant complaintes et morceaux plus rythmés, en portugais et dialectes africains, instruments traditionnels et riffs de guitare électrique, incantations aux accents groovy et invitations à danser, Rivière Noire a embarqué le public dans un maelstrom d’émotions. Avec la complicité d’invités comme la chanteuse Sylvie Hoareau, le grand chanteur malien Kassé Mady Diabaté et Jean-Louis Aubert. Tout simplement magique !
Annie Grandjanin

Album « Rivière Noire », sorti le 20 janvier 2014 (Atmosphériques)
En tournée: le 14 juin Parc de la Mairie à Juvisy-sur-Orge (Fête de la ville), le 4 octobre Les Internationales de la Guitare à Lattes, le 11 oct. le Cap d'Aulnay-sous-ois, le 14 oct. Tourcoing Jazz Festival, le 16 oc. Nancy Jazz Pulsation, le 24 oct. L'ARC, Rezé, le 6 nov. le Rocher de Palmer à Bordeaux, le 8 nov. Le Florida à Agen, le 14 nov. la Citrouille à St Brieuc, le 6 mars 2015 Théâtre de Meaux...

13 mars 2014

L'univers fascinant et surréaliste de Klô Pelgag


Son timbre et son côté fantasque font inévitablement songer à Camille…avec l’accent en plus ! En effet, Klô Pelgag (contraction de Chloé Pelletier-Gagnon) nous vient du Québec. Et, dans ses bagages, outre une flopée de récompenses, on trouve un étonnant bric-à-brac d’accessoires comme ce kimono blanc à dentelle, ce sabre laser qu’elle brandit sur scène pour un numéro de magie avec son contrebassiste… et surtout « L’Alchimie des monstres », son premier album sorti en France le 3 mars dernier. Onze chansons aux mélodies pop, dont les textes ciselés nous plongent dans un imaginaire étrange et surréaliste. « Je n’aime pas la peinture figurative. Je préfère le monde de l’abstraction » confie volontiers cette demoiselle de 23 ans. Ainsi, au fil de morceaux comme «  La fièvre des fleurs », « Rayon X », « Taxidermie » ou  « Comme des rames », Klô nous parle de chimiothérapie, de disparitions, d’hôpitaux… avec des accents oniriques qui évitent tout pathos. Un exercice de haute voltige, à l’image de sa voix harmonieuse qui s’épanouit dans les aigus. Sur la scène des Trois Baudets, mardi dernier, première date de sa tournée dans l’hexagone, elle a débarqué comme un ovni, avec ses musiciens : un contrebassiste en combinaison-squelette, la bouche barrée par une épingle, un batteur et un trio féminin de cordes (violon, alto et violoncelle) affublé de robes de mariées et casquettes bicolores. Passant du piano à la guitare, la chanteuse nous transporte dans des contrées fantasmagoriques où l’on peut assister à des « Mariages d’oiseaux » et où « La neige tombe sans se faire mal ».
On parle déjà de l’univers « Pelgagien » !
Annie Grandjanin

Le 3 avril, à 19h30, au Café de la Danse, 5 Passage Louis-Philippe, 75011 Paris. Tél. : 01.47.00.57.59. Places : 16,80 € et 20 €. www.cafedeladanse.com

8 mars 2014

Caroline Loeb fait revivre George Sand


(c) Jean-Paul Lozouet
Après le très réussi « Mistinguett, Madonna et moi ! », Caroline Loeb se glisse cette fois dans le costume de George Sand, ou plutôt dans ceux de Jean-Paul Gaultier pour « George Sand, ma vie, son œuvre ». Un spectacle co-écrit avec la complicité d’Alex Lutz et Tom Dingler, dans lequel elle raconte et chante, accompagnée de deux musiciens (Gérald Elliott à l’accordéon et Patrick Laviosa, piano/guitare), sa fascination pour la Bonne Dame de Nohant.
 Tout a commencé, comme cela arrive parfois, par un rendez-vous raté ! « Je travaillais sur le projet d’un livre-disque sur Sand qui n’a pas abouti ». Un projet qui l’amène à s’intéresser à cette femme de lettres dont on sait qu’elle a vécu des histoires d’amours orageuses avec Musset et Chopin, écrit « La petite Fadette », « La Mare au Diable », transgressé les mœurs de son époque en portant le pantalon et en adoptant un prénom masculin…  « Je ne la connaissais pas davantage.  J’étais un peu dans la position de Swann qui tombe amoureux d’Odette dans l’œuvre de Proust. Ce n’était pas mon genre ! Ma fascination a été d’autant plus forte quand j’ai réalisé que, comme le lecteur lambda, j’avais des notions vagues et fausses sur sa vie» confesse Caroline. Sur scène, elle « réhabilite » donc Aurore Dupin, tout en dépoussiérant son image figée dans le XIXème siècle. Un hommage joyeux et érudit, qu’elle ponctue de chansons écrites avec la complicité de Thierry Illouz, Fred Parker, Gérald Elliott, Wladimir Anselme, Michèle Bernard et Pascal Mary.
 Habilement mise en scène par Alex Lutz, la Loeb (comme on l’appelle encore) fait revivre devant nous une visionnaire et militante qui a  défendu  la cause des femmes, l’abolition de l’esclavage ou encore la révolution de 1848.
Riche d’anecdotes et de références littéraires et historiques « George Sand, ma vie, son œuvre  » donne envie de (re)découvrir cette femme qui fut l’une des premières à vivre de sa plume. Et dont on apprend pourtant qu’à sa mort, les documents officiels mentionneront qu’elle était « sans profession » !
On retiendra également cette scène forte et émouvante dans laquelle la comédienne et chanteuse fait voler des feuilles en scandant  « Je veux me servir de ma plume comme l’ouvrier de l’enclume ! ». « Une vision chaplinesque des « Temps Modernes » qui résume bien notre fonction d’artiste. A l’heure où le cynisme est devenu un Dieu tout puissant, il est important de défendre ces envolées lyriques et humanistes. Ca nourrit ! » explique Caroline Loeb. En attendant, c’est elle qui nous nourrit avec ce spectacle drôle, touchant et incroyablement moderne.
Annie Grandjanin

Du 15 avril à fin juin, tous les mardis à 20 heures, au Théâtre Gymnase Marie Bell, 38, bd Bonne Nouvelle, 75010 Paris. Réserv. Au 01.42.46.79.79. www.theatredugymnase.com


28 févr. 2014

Le répertoire français "dynamité" par un trio suédois


(c) Alain Guizard
Pour l'état civil,To, Mär et Glär sont frère et sœurs. Sur scène, la fratrie est réunie sous le nom de «  Blond and Blond and Blond ». Après avoir séduit leurs compatriotes avec leur «HØmäj à la chonson française », ils investissent le Sentier des Halles avec ce show musical totalement déjanté. Avec eux « Au bal masqué » prend des accents lyriques, « Pandi Panda » se transforme en rap, avec cours d'anatomie à l'appui, et « Pull marine » donne l’impression d’être chanté sous l’eau. Et que dire de leur version hallucinée de « Banana Split » ? Entre deux sketches où ils délirent sur Jésus, leur enfance en Suède, les affres d’une femme accouchant d’un homard sur l’air de « Femme libérée », leur passion pour les textures… le trio nous embarque pour un « Voyage, voyage » aux allures de fable politico-sociale. Une fable illustrée de photos de boat people, de « La croisière s’amuse » et de personnalités politiques sur le thème de « t’as pas ton billet ». 
Un spectacle tellement original qu’on fait volontiers l’impasse sur quelques traits d'humour un peu douteux. Mais, ce qui est sûr, c'est que ces drôles de vikings détournent et dynamitent le répertoire français avec une liberté et une fantaisie qui forcent le rire.
Annie Grandjanin
Jusqu’au 30 juin, chaque lundi à 20 heures (à noter un concert supplémentaire le 30 mars à 17 h),  au Sentier des Halles, 50, rue d’Aboukir, 75002 Paris. Loc. points de vente habituels et par tél. au 08.92.68.36.22. Tarifs : 20 € sur place (14 € pour les adhérents et 15 € en prévente)
www.lesentierdeshalles.fr 

2 févr. 2014

Pierre Lapointe s'offre son premier Olympia

(c) David Romero

Véritable star au Québec, son nom n’avait encore jamais brillé sur le fronton du célèbre music-hall. Pourtant, après son concert mercredi dernier, Pierre Lapointe a largement gagné ses galons de vedette de ce côté-ci de l’Atlantique. Auteur compositeur, il avait séduit de nombreux aficionados avec des albums comme  «  La Forêt des Mal-Aimés » ou « Sentiments Humains », d’une poésie pointue et assez introspective. Avec « Punkt », son nouvel opus, le chanteur s’intéresse cette fois aux choses du sexe, qu’il commente longuement. Le tout teinté d'un humour un peu potache sans doute hérité de ses années d'étudiant aux Beaux Arts. Côté décor, un énorme « Punkt » en ballon gonflable rose bonbon qui s’illumine au gré des ambiances. Doté d'un sacré grain de folie, Lapointe s'amuse à dévoiler sur scène ses nouveaux titres comme « La Sexualité » ou « Nu devant moi » avant de renouer avec des atmosphères plus mélancoliques pour « Nos joies répétitives », ou l’émouvant « Tel un seul homme  » qu’il interprète en acoustique avec sa « gang ». Evitant la démonstration vocale, même s’il faut bien avouer que le chanteur possède un bien bel organe, il alterne pop, rock et ballades, avec une incroyable aisance scénique. Quittant la scène sur « Au Bar des suicidés » il revient en compagnie de M. (Matthieu Chedid) pour un duo magique  sur « Nostalgic du cool » puis enchaîne avec « Deux par deux rassemblés » tandis que Matthieu se joint aux musiciens.
Mais c’est seul au piano qu’il termine ce superbe concert en revisitant « C’est extra » de Léo Ferré.
Sous le charme, comme le public, on a bien du mal à quitter la salle…
Annie Grandjanin

Album « Punkt » (Audigram)
En tournée : le 5 février à Cenon (Rocher de Palmer), le 7 février à Plan des Ouates (Suisse), le 9 février à l’Aéronef de Lille, le 11 février à Caluire Et Cuire (Radian Bellevue), le 25 février au Théâtre Maisonneuve de Montréal…