21 juil. 2014

Mouloudji: vingt ans après...

« Longtemps, longtemps, longtemps après que les poètes ont disparu, leurs chansons courent encore dans les rues… » chantait Trénet. Pourtant, vingt ans après la mort de Marcel Mouloudji, on peut s’interroger sur la place qu’il occupe encore dans les mémoires. Pour certains, il demeure l'interprète de « Comme un p’tit coquelicot ». Une chanson qu’il n’a pas écrite (le texte est de Raymond Asso) mais qui est marquée, de manière indélébile, par son timbre si particulier. Les cinéphiles avertis se souviendront de ses talents d’acteur (« Les disparus de Saint-Agil » de Christian-Jaque, « Nous sommes tous des assassins » de Cayatte…), les amateurs de l’esprit rive gauche rappelleront sans doute ses tours de chant consacrés à Vian ou Prévert au Vieux-Colombier…mais le public a parfois oublié le peintre, le producteur et éditeur qui lança notamment la carrière de Graeme Allwright, l’homme de convictions qui chantait dans les usines et participa notamment à un gala de soutien à la gauche chilienne, l’auteur d’ « Enrico », un ouvrage de mémoire, écrit alors qu’il avait tout juste 20 ans, couronné par le Prix de la Pleiade ou encore le pacifiste qui interpréta pour la première fois « Le déserteur » en 1954, le jour même de la chute de Diên Biên Phu.
«Je voulais faire découvrir aux jeunes générations l’artiste qu’il a été » confiait récemment Annabelle Mouloudji, lors de la présentation de l’album « Hommage à Mouloudji – En souvenir des souvenirs… » et du livre « Mouloudji, athée ô grâce à Dieu » dédiés à son père. Un travail auquel elle s’est attelée avec son frère Grégory et la complicité artistique de Laurent Balandras.
Au travers d’anecdotes, de documents exclusifs et de photos inédites, l'ouvrage permet aux enfants de Mouloudji  de raconter ce père avec lequel le dialogue s’est interrompu le 14 juin 1994. « Il est toujours avec moi » ajoute Gregory dont le timbre et les traits rappellent étrangement la figure paternelle. Plus jeune, Annabelle a moins de souvenirs mais elle a réécouté tous ses vinyles pour le choix des chansons de l’album réalisé et arrangé par Frédéric Lo. Ce dernier lui donne d’ailleurs la réplique sur « Enfin, tu me viendras » (la chanson préférée d’Annabelle !). « Vous dites Mouloudji et aussitôt, on vous accueille avec bienveillance » explique Laurent Balandras. Louis Chedid, Christian Olivier (des Têtes Raides), Alain Chamfort, Daphné, Jil Caplan…ont volontiers participé à cet hommage en revisitant des titres tels que « Un jour tu verras », « Faut vivre », « L’un à l’autre étranger »… et des raretés comme « Six feuilles mortes de San Francisco »,  Un disque qui se termine par «Il est né à Paris » un texte de Mouloudji, lu par son fils.
D’autres événements comme la réédition d’ « Enrico » ou la sortie chez Universal,  des concerts au Théâtre de la Renaissance en 1975, devraient célébrer le vingtième anniversaire de la disparition de celui qui se définissait ainsi: « Catholique par ma mère, musulman par mon père. Un peu juif par mon fils, bouddhiste par principe. Alcoolique par mon oncle, névrosé par grand-mère. Sans classe par vieille honte. Dépravé par grand-père. Athée, ô grâce à Dieu ! »…
Annie Grandjanin

Album « Hommage à Mouloudji - En souvenir des souvenirs... » (Discograph) et livre « Mouloudji, athée ô grâce à Dieu » (Editions Carpentier).



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