(c) Jean-Marie Marion |
Il a tourné avec Yves Boisset, Jacques Rivette, Pierre Granier-Deferre, Jean-Luc Godard, François Truffaut ou Claude Lelouch, joué au théâtre, mais Jean-Pierre Kalfon n'a jamais caché sa passion pour la musique. Après avoir créé plusieurs groupes de rock, participé au premier festival punk de Mont-de-Marsan en 1976, gratté de la guitare auprès de Jacques Higelin et Louis Bertignac, enregistré quelques 45 tours, un LP intitulé "Black Minestrone"... il a attendu l'âge respectable de 83 ans pour sortir "Méphistofélange". Un bel album rock qui lui ressemble et dont il a signé tous les textes. Son timbre rocailleux et sûr nous embarque dès la première écoute sur des titres comme "Noire la nuit", "Costard", "Plus d'états d'âme", "Gypsies Rock'n'Roll Band", "Train fantôme"...
Souvent cantonné dans les rôles de méchant, on découvre un homme prévenant, rieur et élégant dans le café du XVIIIème arrondissement, où il a ses habitudes. Entretien avant son concert parisien au Petit Bain, le 12 décembre prochain.
- On parle d'un premier album mais il y a eu un précédent, non ?
C'est vrai mais celui-ci est le premier que j'ai pu contrôler du début à la fin. Dans "Black Minestrone", il y avait des chansons merveilleuses mais c'était un peu laborieux et bancale. Et on ne chantait pas très bien. J'ai pris des cours depuis...
- Vous l'avez dédié à Amy Winehouse ?
Parce que la première fois que je l'ai entendue, j'ai pris une claque. Surtout quand j'ai réalisé qu'elle n'avait que 20 balais ! J'ai eu envie de lui rendre hommage car j'ai toujours été sensible aux voix de femmes, aux belles âmes, dans la musique.
- Sur le livret de l'album, on découvre une sorte de galaxie avec votre photo et celle de vos musiciens ?
Ce disque, c'est notre planète. On m'a dit que cela faisait aussi penser à Jésus et ses apôtres car nous sommes treize ! Les musiciens sont de vraies pointures et nous avons bien rigolé. On utilise toujours le terme jouer pour un acteur ou un musicien. J'aime cette référence à l'enfance.
- C'est vrai que vous avez payé vos premiers cours de théâtre avec votre cachet de boy aux Folies Bergère ?
J'ai fait le boy durant 5 mois. On avait des smokings de toutes les couleurs et j'adorais me balader dans la rue avec des costards roses, jaunes ou verts. Les cachets m'on en effet permis de payer quelques cours de théâtre mais ça ne m'a pas beaucoup servi.
- Pourquoi ?
J'ai quitté le lycée en 3ème et je n'ai pas eu le temps d'acquérir une grande culture. Quand on me donnait une scène à jouer, j'apprenais juste le passage concerné mais je ne me donnais même pas la peine de lire la pièce. Cela s'appelle un imposteur !
- En parlant de costard, celui que vous vous taillez dans la chanson du même nom, n'est pas à votre avantage ?
Je ne me traite pas de tête à claque ou de tronche de cake tous les jours devant ma glace. Il y a même des matins où je me trouve pas trop mal. C'est important, d'être capable de se moquer de soi et de se flageller un peu. J'ai essayé de le faire sans grossièretés, avec une certaine élégance.
(c) Jean-Marie Marion |
- Vous avez signé tous les textes de l'album. Quelle est la part de fiction et de vécu ?
Dans "Méphistofélange", tout est personnel. Il y a des bouts de moi dans chaque chanson. On écrit avec ce qu'on est. Alors qu'au cinéma, on endosse le costume d'autres personnages. J'ai quand même joué le rôle de Louis XIV (NDLR dans "Saint-Cyr" de Patricia Mazuy, en 2000) !
- Avant de jouer de la guitare, vous avez fait de la batterie, non ?
Oui, parce que je ne sais pas lire la musique mais cela a toujours été ma passion. Etre acteur, ce n'était pas forcément mon désir. c'est pour ça que je suis parti en Belgique quand j'avais 15/16 ans. J'avais entendu dire qu'il y avait à Bruxelles un endroit qui s'appelait La Cave et qui ressemblait au Tabou de Saint-Germain-des-Prés. Je me suis fait arrêter avec de faux papiers d'étudiant et j'ai fait de la prison à Bruges. Après, j'ai essayé de me reconstruire pour prouver à ma mère que je n'étais pas un voyou.
- Le texte de "Noire la nuit" n'est pas celui que vous aviez initialement prévu ?
Quand j'ai commencé à écrire cette chanson, je pensais à la nuit parisienne et à tous ces endroits que j'ai beaucoup fréquentés et qui ont n'existent plus. Aujourd'hui, le monde de la nuit est réduit à sa plus simple expression. Puis il y eu ces images de la guerre en Ukraine et j'ai été bouleversé. J'ai conservé le titre et j'ai réécrit le texte.
- Cet album est résolument rock avec des sonorités blues ?
C'est ce que je voulais et je me suis fait plaisir. Ce qui m'a motivé, c'est de retrouver le plaisir de l'écriture. Je me vois un peu comme un rock'n'roll bluesman. D'ailleurs, avec "Méphistofélange", je n'ai pas dit mon dernier mot !
- C'est-à-dire ?
Dans le prochain album, je vais chanter des blues que j'ai adaptés en français mais en respectant évidemment les textes. Notamment le titre "Help The Poor" de B.B. King et Eric Clapton qui raconte l'histoire d'un homme qui demande à une femme de partager ses rêves. Il faut juste que celui-ci marche bien car je ne suis pas un perdreau de l'année !
- Vous avez le trac, à quelques jours de ce concert à Paris ?
Oui, parce que j'ai peur qu'il n'y ait pas de monde ! J'ai beaucoup travaillé pour cet album mais les gens me connaissent comme acteur et pas comme chanteur.
- Album "Méfistofélange" (Deviation Records/L'Autre Distribution), disponible depuis le 21 octobre 2022.
- En concert, le 12 décembre 2022, à 20 heures, au Petit Bain, 7 Port de la Gare, 75013 Paris. www.petitbain.org
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