24 déc. 2014

Le charme espiègle et pétillant des Swinging Poules

(c) Marie-Béatrice Seillant

Avec leurs jupes à pois bouffantes, elles affichent un petit côté désuet, très années cinquante. Côté répertoire, elles puisent dans des standards de la chanson française mais ont aussi déniché quelques perles méconnues (ou presque)  comme « Stop » d’Aimé Barelli ou « Neurasthénie » de Ricet Barrier (et B. Lelou).
Aguicheuses, drôles, faussement ingénues et parfois vraiment féroces, ces demoiselles se livrent sur scène à de délirantes joutes musicales, taillant au passage quelques costards à la gent masculine. A la fois chanteuses et comédiennes, Florence Andrieu, Charlotte Baillot et Caroline Montier n’ont pas grand-chose à voir avec les gallinacées dont elles ont emprunté le nom. A l’évidence, ces poules là ont davantage fréquenté les scènes lyriques que les basses-cours ! On retiendra notamment une reprise décapante de « Fever », le poétique « Syracuse » où elles prennent des poses de cartes postales ou encore la version féminisée de « Tu t’laisses aller ». Sur des arrangements originaux et avec la complicité de leur pianiste (pas toujours à la hauteur vocalement) les Swinging Poules nous offrent ici un spectacle rythmé aussi réjouissant que réussi. Et, lorsqu'elles revisitent le fameux "Dansez sur moi" de Nougaro, on ne résiste pas à l'envie d'abandonner son siège. A voir absolument pour oublier, l’espace d’une heure, la morosité ambiante…
Annie Grandjanin

Jusqu’au 4 janvier, les samedis et dimanches, à 18 heures,  au Grand Point Virgule, 8 bis, rue de l’Arrivée, 75015 Paris. Tél. : 01.42.78.67.03. www.legrandpointvirgule.com


9 déc. 2014

Julia Sarr : « J’ai emmené le piano au milieu de la savane !»


(c) Joseph Johansson
Originaire de Dakar et installée à Paris depuis de nombreuses années, Julia est à la croisée de l’Afrique et de l’Occident. A l’image de son très bel album afro-jazz « Daraludul Yow » dans lequel sa voix pure s’élève pour évoquer, en wolof, la condition des femmes, les enfants et l’exil. Après avoir chanté aux côtés de Lokua Kanza, Richard Bona, Youssou N’Dour, Salif Keita, Oumou Sangaré, Alpha Blondy ou MC Solaar, elle a décidé d'enregistrer ses propres chansons (dont elle a signé la plupart des textes et musiques). Elle est accompagnée ici  de cinq solides pianistes : Jean-Philippe Rykiel, Bojan Z, Mario Canonge, Fred Soul et Samuli Mikkonen. Rencontre avec une belle artiste à découvrir d'urgence.
On évoque une gestation de plus de 5 ans pour « Daraludul Yow ». C’est un peu long, non ?
J’ai pris beaucoup de temps car il s’agit d’une autoproduction enregistrée avec des moyens artisanaux. J’ai du procéder étape par étape. Je n’ai jamais eu l’occasion de lui dire mais je remercie Christophe Maé que j’ai accompagné comme choriste durant 5 ans en tournée. Grâce à mes cachets, j’ai pu financer l'album !
Que signifie le titre ?
Il veut dire : rien d’autre ni personne que toi. C’est la complainte d’amour d’une femme désespérée qui demande à son mari de ne pas prendre une seconde épouse.
Vous avez choisi de privilégier le piano. Pourquoi ?
J'aime dire que j’ai emmené le piano au milieu de la savane ! C’était un pari. On m’a découragée au début en me disant que cela sonnerait trop jazz. La viole d’amour, la kora, le ngoni ou les chœurs donnent une touche organique à l’ensemble. Je trouvais que l'idée de la musique africaine autour du piano était originale. J’évoque souvent ma « presque » double culture. La musique de Ravel me fait autant voyager que celle des griots. Un seul genre musical ne suffit pas à nourrir mon âme.
Pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec Miriam Makeba ?
J’ai accompagné Lokua Kanza à Johannesburg. Il avait réalisé un album («Homeland ») pour elle et j’avais fait la voix témoin, en « yaourt ». Au départ, je devais participer aux chœurs. Une fois là-bas, j’ai eu l’opportunité d’écrire deux couplets en anglais sur le titre « Lindelani » car le texte initial ne plaisait pas à Miriam Makeba. Je conserve le souvenir d'une femme malicieuse, d'une maman. Elle m’a offert un bijou pour mon anniversaire. Je n’ai réalisé son statut d’icône que lorsque je l’ai vue sur scène.
 Quel a été le déclic pour tenter l'aventure en solo ?
J’avais déjà enregistré un disque chez No Format. J'aime aussi être choriste, cela me pousse à être polyvalente. Je vais travailler prochainement avec Francis Cabrel et j’ai hâte d’entrer dans son univers, sa maison.  Mais j'ai toujours besoin d'explorer d'autres territoires dans la chanson. Dans "Daraludul Yow" je raconte mes histoires, avec mes émotions et mes mots.
Propos recueillis par Annie Grandjanin

Le 18 décembre, à 20h30 au Théâtre Cinéma de Fontenay-le-Fleury et le 30 janvier 2015 à 20h30, à l’Alhambra (Festival « Au fil des Voix »), 21, rue Yves Toudic, 75010 Paris. Tél. : 01.40.20.40.25. www.alhambra-paris.com
Album « Daraludul Yow » (L’Autre Distribution).


6 déc. 2014

Des élans… surréalistes



« Dans nos métiers, le plaisir n’a de sens que s’il est partagé » confie Laurent Serrano qui a signé l'adaptation et la mise en scène de ce spectacle baptisé « Les élans ne sont pas toujours des animaux faciles ». 
Et le plaisir est bien là. Celui du public, à l'évidence, mais aussi celui d’Emmanuel Quatra, Benoît Urbain et Pascal Neyron qui évoluent, avec aisance, dans cet univers absurde et décalé. Vêtus de costards-cravates, les trois complices, un verre à la main, devisent sur Verlaine que l’un prétend avoir croisé la veille, le cinéma japonais, le choix du pop-corn sucré ou salé ?, les hauts et les bas d’une ex-petite amie, ce bout d’arc-en-ciel à vendre…sans oublier un plan drague calamiteux où l’objet des élans…amoureux est en fait un proto-type (mi-homme, mi-femme ) !
Mais au-delà de ces sketches que certains comparent volontiers aux fameux « Diablogues » de Roland Dubillard, la jubilation vient surtout avec les intermèdes musicaux. A cappella ou s’accompagnant à la guitare, au piano et au valisophone (un instrument trafiqué à partir d’un manche en bois planté dans une valise), les comédiens-chanteurs ponctuent leurs échanges verbaux…et verbeux, de reprises réussies et très personnelles de « Chanson d’automne » (P.Verlaine/C.Trénet),  « Summertime Blues » d’Eddy Cochran, « They can’t take that » (I. et G. Gershwin) ou « Une bouteille à la mer » (C. Nougaro et M.Vander). Le tout, entrecoupé de compositions originales de Benoît Urbain comme  le surprenant « Extraterrum ». Logique, puisque le trio aborde aussi la question des extra-terrestres...
Annie Grandjanin

Du mardi au vendredi à 21 heures, le samedi à 16h30 et 21 heures, au Théâtre Michel, 38, rue des Mathurins, 75008 Paris. Tél. : 01.42.65.35.02. www.theatre-michel.fr