31 déc. 2013

Max Zita & Gospel Voices: les élans du « chœur »

Lorsqu’il a choisi de se consacrer à la musique et plus spécialement au gospel, le guadeloupéen Max Zita n'imaginait sans doute pas célébrer à l'Olympia, le temple du music-hall, les 25 ans de Gospel Voices. Une formation qui lui a permis de porter sur de nombreuses scènes et festivals son message d’amour et de fraternité. On peut évidemment s’interroger sur le rayonnement du gospel venu des Antilles ! « Notre proximité avec les Etats-Unis a facilité la venue de pasteurs chez nous. Il ne faut pas oublier non plus que nous avons une grande majorité de protestants » explique Max qui peut se vanter d’avoir initié le mouvement gospel en France. Avec Gospel Voices (puis « Gospel pour 100 Voix ») il a ainsi chanté auprès d’artistes comme Nicoletta, Liz McComb, Rhoda Scott, Clyde Wright du Golden Gate Quartet, Lara Fabian, Cheb Mami, Amel Bent…
Pour ce concert anniversaire à l’Olympia, outre des invités comme Nicoletta, Yoann Fréget, Emmanuel Djob (et quelques surprises), il promet des gospels traditionnels, urbains, mais aussi des morceaux de variétés comme  « Quand on a que l’amour », un titre qui s’inscrit bien dans l’esprit de partage qui anime le chœur depuis un quart de siècle. « Ce que nous souhaitons, c’est apporter de la lumière aux gens » confesse Max Zita. En ces temps de crises et de dérives, applaudir des chanteurs qui prônent avec autant de ferveur les vertus de la spiritualité et de la tolérance, cela ne peut évidemment pas faire de mal…
Annie Grandjanin
Le 15 février, à 20h30, à l’Olympia, 28, boulevard des Capucines, 75009 Paris. Places : de 27,50 à 71,50 €. Tél. : 08.92.68.33.68. www.olympiahall.com

14 déc. 2013

Le magnétisme d'Alone & Me





(c) Remy Baudequin
La chanteuse arrive sur scène le visage dissimulé par une capuche et se déplace comme en apesanteur. Et c’est bien cet état d’esprit qui plane tout au long du concert d’Alone & Me. On pense à Sinead O’Connor ou Kate Bush mais la singulière Emilie Clem (son vrai nom) a un univers bien à elle, entre folk harmonieux et rock aux accents convulsifs. Installée devant deux micros dont elle s’empare indifféremment, seule avec sa guitare (une violoncelliste l’accompagne parfois), usant d’un looper qui multiplie les sons, elle distille de son timbre prenant les titres de son  album « My Fucking Project ». Des textes plutôt engagés, d’une belle richesse mélodique, qu’elle interprète en anglais. Outre la reprise épurée de « Selling Jesus » du groupe britannique Skunk Anansie, elle nous offre des morceaux captivants comme « Strange Day », « In The Air », « The Queen »  ou encore « Is That What You Want ». Elle a déjà remporté, à l’unanimité,  le « Tremplin Hard Rock Rising France » et fut l’une des belles découvertes de cette fin d’année au Sentier des Halles. Pour ceux qui ont raté cette perle brute à l’éclat magnétique, des séances de rattrapage sont prévues dès janvier.
Annie Grandjanin


A  partir du 14 janvier jusqu’au 1er juillet 2014, un mardi sur deux, à 22 heures, au Sentier des Halles, 50, rue d’Aboukir, 75002 Paris. Loc.  Fnac, Carrefour et par tél. au 08 92 68 36 22. http://www.sentierdeshalles.fr

6 déc. 2013

Michel Hermon retrouve ses vingt ans


Certains puristes considèrent encore que l’on ne peut chanter Brassens après Brassens, Brel après Brel ou Ferré après Ferré… Mais, pour quelques reprises malheureuses, doit-on figer ces artistes dans le temps ? Courir le risque que leurs œuvres deviennent « poussiéreuses » et échappent aux plus jeunes ? En découvrant Michel Hermon sur la scène du Hall de la Chanson où il vient de « recréer » le récital de Léo Ferré à Bobino en 1969, les chansons nous semblent plus vivantes que jamais. « C’est mon Léo Ferré à moi, celui que j’ai découvert sur scène à ce moment là, j’avais vingt ans, j’aimais ses chansons depuis toujours et j’ai eu ce soir-là, un des chocs artistiques et émotionnels de ma vie » explique-t-il.
 Metteur en scène, acteur, chanteur de cabaret, artiste lyrique, Hermon ranime la flamme de ce souvenir de jeunesse en y ajoutant sa sensibilité, son intensité dramatique, sans jamais trahir ni copier Ferré. A peine saisit-on quelques fugaces clignements d’yeux sur le bouleversant « Pépée ». Il a ainsi conservé l’ordre des 26 chansons du récital, dont 16 furent créées à Bobino cet hiver là.  Accompagné au piano par son complice Christophe Brillaud, Michel Hermon offre de magnifiques versions de « Vingt ans », « Petite »,  « Les anarchistes »… jusqu’au vibrant « Ni Dieu ni maître ». Seule petite entorse à l’histoire, la chanson de rappel « Avec le temps » qui n’est sortie qu’en octobre 1970 mais dont l’absence aurait sans doute déçu le public.
Annie Grandjanin
Prochain concert, le 19 mars au Sorano Théâtre de Toulouse

2 déc. 2013

Pour les DéSAXés, souffler...c'est jouer !



(c) Frédéric Chapotat

Dans l’esprit du Quatuor qui a marqué le genre, les DéSAXés sont quatre musiciens  (Samuel Maingaud, Guy Rebreyend, Frédéric Saumagne, Michel Oberli) qui ont pris la définition du verbe jouer, au pied de la lettre !
 Tous premiers prix de conservatoire, ils ont  vite renoncé aux salles de concerts classiques et aux pupitres pour donner libre cours à leur fantaisie débridée. Avec leurs précédents spectacles « Sax Machine » ou « Sea, Sax & Fun », ces saltimbanques dans l’âme ont montré l’étendue de leur répertoire et de leur humour en revisitant à leur sauce des « standards » du lyrique, du jazz, du rock, de la variété ou de la pop. Cette fois, pour leur dernière création « Mystère Sax ou l’incroyable histoire de l’inventeur du saxophone », ils ont choisi de célébrer le bicentenaire de la naissance d’Adolphe Sax (en 2014). Un anniversaire mis en scène par Philippe Martz et orchestré à la manière d’un film muet et burlesque (avec des dialogues défilant sur un écran). L’histoire débute dans l’atelier du facteur d’instruments. Ce dernier, installé devant un bureau renversé, écrit à son ami Hector Berlioz, reçoit la visite d’un huissier puis de cambrioleurs. Les gags s’enchaînent alors à un rythme plus soutenu. On retiendra notamment une belle interprétation des « Feuilles mortes » tandis que les musiciens marchent sur des partitions éparpillées sur le sol, un délirant tour du monde en montgolfière,  un numéro détonnant de beuverie musicale, un concert de batterie sur saxophones…et des morceaux qui passent allègrement de « La Moldau » de Smetana à «Comme d’habitude », du «Vol du bourdon » de Rimski-Korsakov à « La danse des canards ».  Le tout sous l’œil bienveillant d’Adolphe Sax dont le portrait géant trône sur la scène. Assurément, pour ces virtuoses du saxophone, souffler… c’est jouer !
Annie Grandjanin

Jusqu’au 12 janvier 2014, du mercredi au samedi à 19h30, matinée le dimanche à 15 h, au Vingtième Théâtre, 7, rue des Plâtrières, 75020 Paris. Tél. : 01.48.65.97.90. www.vingtiemetheatre.com

21 nov. 2013

Yanowski: sombre et fascinant



(c) Victor Quézada-Pérez
Dès qu’il arrive sur scène avec sa silhouette dégingandée,  l’œil charbonneux, Yanowski nous emporte, d’un coup de redingote, dans son univers halluciné et fantasque. Il y a chez cet artiste une intensité, une grandiloquence, une gestuelle théâtrale qui font songer à Brel.
Après une douzaine d’année au sein du Cirque des Mirages, avec son acolyte Fred Parker, un spectacle dans la veine des cabarets expressionnistes allemands, il a décidé de se lancer en solo avec « La Passe interdite », dont il a écrit et composé toutes les chansons.  Enfin pas tout-à-fait en solo puisqu’il a eu l’heureuse idée de s’entourer du grand pianiste Gustavo Beytelmann  (qui a notamment travaillé aux côtés d'Astor Piazolla, Catherine Ringer, Gotan Project…) et du virtuose violoniste Cyril Garac. Durant une heure trente, ce personnage aux allures de Méphisto nous invite à le suivre dans la chaleur moite et les odeurs de souffre des bouges de Buenos-Aires, nous guide au cœur d'un cabaret slave où, entre chien et loup, on donne un ultime concert, nous fait partager les angoisses d’un homme face à son miroir…
Doté d'un timbre puissant et prenant, il chante l’amour, la désillusion, la mort… mais s’envole aussi dans des pirouettes jubilatoires révélant cette dualité qui sommeille en chacun de nous. Une fascination pour l'ombre et la lumière qui nous fait passer, en un instant, de l'exaltation à la mélancolie. On sort de cette « Passe interdite », bousculé et transporté.
Annie Grandjanin

Les 29 et 30 janvier 2014, à 20 h 30, Salle Gaveau, 45-47, rue de la Boëtie, 75008 Paris. Tél.: 01.49.53.05.07 http://www.sallegaveau.com

20 nov. 2013

Le charme subtil et espiègle d'Enzo Enzo

(c) Martin Zayas
Depuis plus de vingt ans, cette artiste au timbre feutré et délicat nous emmène au gré de ses aventures musicales, de ses parenthèses d’actrice ou de conteuse pour les enfants…
 Il y a en effet belle lurette que l’ex-régisseuse du groupe Téléphone et bassiste du groupe Lili Drop a troqué sa panoplie de rockeuse contre une carrière solo consacrée à la chanson française. Un virage couronné  par deux Victoires de la Musique, en 1995, dans les catégories interprète et chanson de l’année, avec « Juste quelqu’un de bien » (écrit par Kent). « J’aime tenter de nouvelles expériences musicales mais j’ai définitivement renoncé à me lancer dans le rhythm’n’blues. Avec la voix que je trimbale, cela m’irait comme des moufles à une coccinelle » s’amusait-elle à l’époque. De coccinelles, il est d’ailleurs question dans la chanson « Fais-moi une fleur », mais aussi du « Goût de l’eau », de « Sablier » ….Des titres extraits du spectacle « Enzo Enzo chante Marie Nimier ». Hormis Art Mengo qui a composé l’essentiel des musiques (et la collaboration de Daniel Lavoie Jean Rouaud, Marc Estève…), ce cabaret littéraire est incontestablement une affaire de femmes ! Mise en scène par Isabelle de Botton, accompagnée par Delphine Gosseries (au violoncelle) et Hélène Weissenbacher (au piano), Enzo Enzo se balade avec une grâce subtile et espiègle dans les textes de Marie Nimier, alternant chansons et lecture d’extraits de romans. Ne prenez pas le risque de rater ce beau moment de poésie, à la fois moderne et intemporel, vous pourriez bien en rester « inconsolables »….
Annie Grandjanin

Le 29 novembre, à 20 heures, aux Trois Baudets, 64, boulevard de Clichy, 75018 Paris. Tél. :O1.42.62.33.33. www.lestroisbaudets.com. Et le 16 janvier 2014 au Jardin d’Acclimatation.

18 nov. 2013

Madeleine Besson: "je n'ai pas peur de me mettre à nu"



Son nom et son visage ne vous sont pas inconnus ? Madeleine est la fille de Benno Besson, metteur en scène, qui créa notamment le Berliner Ensemble avec Bertolt Brecht. Et elle a tenu le rôle de Marie dans  « 18 ans après » le film de sa maman Coline Serreau.
(c) Céline Sadonnet/Abacaba
Côté filiation musicale, en revanche, c’est le blues et le rock qui coulent dans ses veines. Qui bouillonne plutôt car, sur scène, cette artiste explose littéralement. Certains n’hésitent pas à évoquer Janis Joplin ou Aretha Franklin. Son timbre à la fois furieux et mélodieux, son incroyable énergie avaient déjà fait craquer le public des Musik’Elles où elle fut programmée en 2010 dans la catégorie « Coup de cœur ». Elle s’est également produite au Festival des Vieilles Charrues (où elle a croisé Lou Reed), a assuré les premières parties des BB Brunes ou encore de Cyndi Lauper à l’Olympia. « Voir mon nom sur le fronton de cette salle, c’était  magique » se souvient-elle. Alors, pourquoi Madeleine Besson n’a-t-elle pas encore les honneurs des grandes scènes en vedette ? Tout simplement parce que la demoiselle qui a beaucoup fréquenté les coulisses des théâtres et les plateaux de cinéma, connaît bien les pièges de ce métier. Fougueuse mais avisée, elle a travaillé « à l’ancienne », tout en écrivant et composant dans la solitude de sa chambre d’étudiante : formations à la Bill Evans Piano Academy, à l’école de Didier Lockwood, à la New York University for Jazz and Contemporary Music, concerts dans les bars, les clubs…… Bref, elle a cultivé ses atouts et enchaîné les expériences,  avant d’envisager l’enregistrement de ses chansons. « J’ai besoin d’avoir confiance. Aujourd’hui, je me sens plus mâture. Je n’ai pas peur de me mettre à nu. Les bases de ce métier, c’est d’essayer des choses et de gagner le respect de ses musiciens » confie-t-elle. En tout cas, elle a gagné celui de David Coulter (Arthur H, les Pogues, Tom Waits…) qui a réalisé « The Walker », un single sorti le 5 novembre dernier en attendant l’album prévu en mars prochain.  Des chansons essentiellement en anglais. « Je pense en français mais les mots sortent en anglais » explique Madeleine qui a passé son enfance à Los Angeles et revendique sa double culture. Cela dit, elle ne refuse pas l’idée de collaborer avec d’autres auteurs. « J’ai appris à être interprète. C’est un challenge qui me plaît. Comme de chanter devant des gens qui ne me connaissent pas et de les convaincre ».  Tout en confirmant un virage nettement rock-pop dans son répertoire, elle a eu la bonne idée de laisser tomber le perfecto pour une tenue plus glamour qui met en valeur les multiples facettes de son talent. Et du talent, elle en a à revendre !
Annie Grandjanin

« The Walker » (Abacaba). 

16 nov. 2013

La Famille Semianyki: une loufoque smala russe



Ils ont débarqué pour la première fois en France, en 2003, au Festival Off d’Avignon avant de tenir l’affiche pour une cinquantaine de dates au Théâtre du Rond-Point en 2011. Cette fois, c’est sur la scène du Palace que ces six clowns issus du fameux teatr Licedei de Leningrad, installent leur décor de bric-à-brac. Sans paroles, jouant essentiellement sur la gestuelle et le comique de situation, le spectacle donne l’image d’une famille ubuesque, totalement frappadingue : la mère enceinte jusqu’au cou joue de ses charmes volumineux pour retenir un mari picoleur qui menace constamment de faire sa valise, tandis que le passe-temps favori de leur marmaille (3 filles et 1 garçon) consiste à imaginer comment tuer le père tout en faisant tourner la mère en bourrique ! Avec sa couche-culotte et sa tétine, la petite dernière rappelle un peu Maggie Simpson. Au début, on a un peu de mal à entrer dans l’univers absurde de cette loufoque smala russe. Mais très vite, on se laisse emporter par l’enchaînement de gags de haute volée comme le numéro de chef d’orchestre du fils échevelé, celui du père, les bras immobilisés par un bâton de ski, tentant de boire sa vodka ou d’allumer une cigarette, la fille armée d’une lampe torche qui cherche son père dans la salle… jusqu’à la scène finale qui part totalement en vrille. Du grand art burlesque !
Annie Grandjanin
Jusqu’au 5 janvier au Palace, 8, rue du Faubourg Montmartre, 75009 Paris. Du mar. au sam. à 19 h 30, mat. sam. et dim. à 16 h. Tél. : 01.40.22.60.00. www.theatrelepalace.fr

15 nov. 2013

Parade Fauve: entre rire et émotion


(c) Pascal Lafay

Parmi toutes les commémorations qui entourent le centenaire de la Grande Guerre, cette « Parade Fauve » apparaît comme un témoignage rare puisqu’elle donne notamment la parole aux Poilus. Serge Hureau et ses complices du Hall de la Chanson, ont en effet effectué un véritable travail d’historien en sortant de l’anonymat des textes comme « Dans les tranchées de Lagny », sur l’air de « Sous les ponts de Paris » de Vincent Scotto. Dans un décor de camouflage dont on apprend que les motifs ont été inventés par les peintres d’avant-garde de 14-18, le spectacle démarre par des couplets revanchards : « Le rêve passe », « Ce que c’est qu’un drapeau », « le violon brisé »…
 Sur scène, Serge qui endosse aussi les rôles du narrateur ou du fameux comique-troupier, est accompagné par deux artistes talentueux : Manon Landowski et Olivier Hussenet. Au fil d’une revue qui passe de l’émotion au rire, du patriotisme au désespoir, on découvre des interprétations inédites de succès comme «Lied eines jungen wachtpostens », la version d’origine de Lili Marleen ou «  Quand Madelon », qui prend ici les accents d’une complainte. Soutenus par deux musiciens Cyrille Lehn (piano) et Lionel Privat (guitares et percussions) qui utilisent également des instruments de poilus, dont un reconstruit pour l’occasion, les artistes revisitent le répertoire de l’époque : « Au bois le Prêtre », «Avec Bidasse »… sans oublier le surprenant « Hanging on the Old Barbed Wire », d’un anonyme britannique, sur l’air de « The British Grenadiers » (dans la version textuelle du groupe Chumbawamba, 1988). 
Au-delà du spectacle, c’est toute une page de l’histoire qui est illustrée ici par le biais de chansons dont quelques-unes ont survécu au temps pour s’inscrire dans la mémoire collective.
Une parade qui se termine par le poème « Bleuet » de Guillaume Apollinaire (datant de 1917 et mis en musique par Francis Poulenc en 1939). Un clin d’œil, sans doute, à ces combattants qui sont peut-être partis « la fleur au fusil » mais qui, après quelques mois dans les tranchées, parlent aussi de la peur, du sacrifice et de la solitude.
Annie Grandjanin

Le 23 novembre à 20 h 30 et le 24 novembre, à 16 h, Hall de la Chanson, Pavillon du Charolais, 211, avenue Jean-Jaurès, 75019 Paris. Tél. : 01.53.72.43.01. www.lehall.com
(ce spectacle a reçu le label "centenaire" délivré par la Mission du Centenaire de la Première Guerre Mondiale).

8 nov. 2013

Bertrand Louis électrise la poésie de Philippe Muray

(c) Thibaut Derien

Dans ses précédents albums, Bertrand Louis nous régalait volontiers de citations littéraires. Avec « Sans moi », il s’est plongé dans l’univers de l’essayiste Philippe Muray. Douze textes extraits du recueil « Minimum Respect », paru en 2003, peu de temps avant la mort de l’auteur. Un auteur qui toute sa vie a porté un regard perçant, désabusé et ironique sur le monde et ses contemporains.
Étrangement, le premier roman de Muray s’intitulait « Chant pluriel »...Le résultat de cette œuvre commune puisque Bertrand a composé toutes les musiques est d’une rare et belle intensité. Sur scène, entre ballades envoûtantes et envolées très électriques, grâce à la complicité de l’excellent guitariste Jérôme Castel, le timbre prenant du chanteur, imprégné par la rage et l’humour grinçant de Muray,  nous embarque d’emblée dans des morceaux comme « Ce que j’aime », « Lâche-moi tout », « Sans moi » ou encore « Futur éternel de substitution ». L’heure est grave, mais pas vraiment désespérée ! En effet, les accents rock et énergiques que Bertrand Louis apporte aux sentences sombres de Muray donnent à l'ensemble un côté jubilatoire. A noter également, la lumineuse présence de la chanteuse Lisa Portelli. Petite facétie de l’artiste,  la doublure léopard de sa veste noire qu’il laisse entrevoir entre deux accords au piano. On n’est pas à l’abri d’un beau succès…
Annie Grandjanin

Ce soir, à 20h30 et les 13 et 15 Janvier 2014, à l’Espace Christian Dente/Manufacture de la Chanson, 124, avenue de la République 75011 Paris. Tél. : 01.43.58.19.94. www.manufacturechanson.org
Album « Sans moi » (MVS Records)

Frédéric Zeitoun : une belle et joyeuse leçon de vie

Il a baptisé son spectacle (coécrit avec François d’Epenoux)  « L’histoire enchantée du petit juif à roulettes »
 Après un début un peu déroutant, on entre rapidement au cœur du sujet : un spectacle sur la différence. Et, même si le chroniqueur musical balaye les embûches rencontrées d’un tour de roue parfois grinçant, le ton est le plus souvent celui de l’humour, de la tendresse. Que ce soit pour évoquer ses années d’écolier pas comme les autres, ses premiers émois d’adolescent où il jouait surtout le rôle du confident ou ses débuts à la télévision grâce à Jacques Martin. Entrecoupé de séquences d’actualités, de chansons drôles et touchantes comme « Mes vacances chez Franco », ce spectacle, mis en scène par Alain Sachs, nous interpelle, entre deux éclats de rire, sur le handicap, la religion, l’ignorance, le libre arbitre…
Accompagné par la violoncelliste Cécile Girard (qui incarne également Madame la Vie) et l’accordéoniste Anthony Doux,  Frédéric nous émeut et nous fait rire. Notamment  lorsqu’il raconte les vendredis soir en famille, les parfums épicés de son enfance ou encore l’arrivée d’un bébé à la maison, malgré la démission des cigognes. Une belle et joyeuse leçon de vie...
Annie Grandjanin

Jusqu’au 30 décembre, les dim. à 19h et les lun. à 21h, à la Gaîté Montparnasse, 26, rue de la Gaîté, 75014 Paris. Tél. : 01.43.22.16.18. www.gaite.fr

4 nov. 2013

Manu Katché: "mon destin est incroyable !"


Sa créativité, son groove, le son particulier de ses drums ont fait de Manu Katché l’un des batteurs les plus polyvalents et recherchés de sa génération. Il a accompagné les grands noms de la pop internationale et du jazz, de Peter Gabriel à Sting en passant par Marcus Miller, Herbie Hancock, Jan Garbarek… Des rencontres, qu’il évoque dans  « Road Book », un ouvrage sorti il y a quelques jours….
Comment qualifier ce livre : mémoires, souvenirs ?
- S’il s’agissait de mémoires, il ferait 600 pages ! Ce sont juste des anecdotes avec des artistes internationaux et une récapitulation très succincte de mes années françaises. L’idée était de témoigner de mon parcours. Celui d’un môme de banlieue qui a joué avec des dinosaures de la musique.
Vous n’avez pas la réputation de « brosser les gens dans le sens du poil ». Pourtant, ici, vous ne parlez que de gens que vous aimez ?
Généralement, quand vous évoquez vos souvenirs, ce sont les jolies choses qui vous reviennent. Même avec Mark Knopfler, un mec difficile d’accès, mais cela s’est arrangé à la fin…
On découvre notamment que vous avez refusé de travailler avec Mick Jagger ?
J’étais évidemment flatté qu’il m’appelle et je me souviens que lorsque j’ai dit non, il y a eu un blanc au bout du fil. J’ai beaucoup aimé les Stones. Mick est quelqu’un d’élégant et de sympathique mais, à l’écoute de la cassette, je ne voyais pas ce que je pouvais apporter de plus avec mon style. Nous aurions été frustrés tous les deux. Il faut connaître ses limites. C’est  d’ailleurs pour ça que je suis resté en France.
C’est-à-dire ?
Parce que je ne serais peut-être pas allé à l’essentiel. Je me serais banalisé.
Vous ne tarissez pas d’éloges sur Peter Gabriel en affirmant qu’il a déclenché ce que vous alliez devenir ?
J’ai eu la chance de suivre une formation classique. J’ai appris les rudiments de la musique avec une approche complètement neutre. J’avais quelques références dans le jazz et la soul mais, au début, je lisais les partitions. En séance d’enregistrement, on me disait de jouer comme untel. Lorsque j’ai rencontré Peter, il m’a demandé de jouer comme je le sentais. Cela m’a un peu paniqué car c’était la première fois qu’on me tenait ce discours. Il m’a fait confiance et est allé chercher chez moi ce qui était en gestation. C’est à partir de là que j’ai vraiment développé mon style. Peter est un humaniste, à l’écoute des autres.
Vous lui avez pourtant raccroché au nez deux fois ?
C’est vrai. Il m’a téléphoné alors que j’étais au ski avec des copains et j’ai cru à une blague de leur part. Ce n’est qu’au troisième appel que j’ai réalisé que l’accent de mon interlocuteur était vraiment très british. Je n’ai jamais su comment il avait trouvé le numéro de mon hôtel à l’Alpe d’Huez !
Vous terminez « Road Book » sur Herbie Hancock, que vous appelez le patron ?
Herbie, c’est toute mon enfance. Je suis dingue de lui depuis toujours. Mon destin est incroyable et le rencontrer, ce fut la cerise sur le gâteau.
Vous n’avez jamais raté de rendez-vous ?
Si, bien sûr. L’une de mes frustrations est de ne pas avoir joué avec Miles Davis !
Peut-on dire que ce livre prouve qu’on n’est pas forcément né du mauvais côté de la Manche ou de l’Atlantique ?
C’est en effet l’idée. Même si, dans le jazz, les musiciens européens n'ont rien à envier aux américains ! Bien au-delà de la bonne étoile, j'ai voulu montrer qu’il y a des rencontres qui doivent se faire. C’est la force du milieu artistique. Quand j’étais jeune, on ne parlait pas d’intégration. Si j'ai un message à faire passer, c'est qu'il faut bosser, se donner les moyens. Il n’y a pas de gens inaccessibles…
Propos recueillis par Annie Grandjanin

« Road Book » (Ed. Le Cherche Midi), 224 pages, 16,50 €.





31 oct. 2013

Serge Hureau : "la chanson est un objet qui rassemble"



(c) Pascal Lafay
On se souvient de ses excellents spectacles « Gueules de Piaf », « Au bon petit Charles » « Les habits du dimanche »…Des habits, Serge Hureau en a endossé quelques-uns depuis ses débuts : chanteur, comédien, professeur au Conservatoire National d’Art Dramatique où il enseigne la chanson, metteur en scène, fondateur en 1990 du « Hall de la Chanson »… Depuis que ce dernier s’est installé, au printemps, dans le Pavillon du Charolais à la Villette, il est devenu le dirlo, comme il se nomme lui-même, de ce théâtre de 140 places consacré à la chanson, du Moyen Âge à nos jours. Au programme : spectacles, concerts, installations sonores, conférences chantées… mais aussi des stages de formation, en partenariat avec l’Education Nationale. « Les musiques actuelles ont un avenir et un passé » confie-t-il. « Il y a quelques jours, nous avons proposé un spectacle sur  la chanson et Jean Cocteau, qui était fou de jazz. Il a écrit pour Marianne Oswald, « l’ancêtre » des slameurs ! ». Et ce sont toutes ces références et anecdotes sur le patrimoine qu’il connaît si bien qui font le régal des jeunes de l’Ecole Supérieure de Musique qui viennent ici. A découvrir, dès le 11 novembre,  « Parade Fauve », une création sur les chansons de la Grande Guerre. « Des textes intimes des poilus qui parlent du manque d’hygiène et d’amour, du désir, de la peur… ». Toujours en novembre, Mona Heftre et Michel Hermon interpréteront en alternance des titres de Léo Ferré. Des spectacles appelés à tourner dans toute la France.
« Nous, ce que l’on veut, c’est apporter un point de vue, un angle, un regard » ajoute Serge Hureau. Ainsi, il rappelle le sort peu enviable des femmes dans les chansons réalistes, la récupération par le folklore enfantin de morceaux pour adultes comme « Ah, vous dirais-je maman » ou encore le fameux «  Malbrough s’en va-t-en guerre ». «Une chanson adorée des enfants, qui parle de mort et de deuil. Mais qui a, en ce sens, une fonction éducative ». Et d’ajouter : «  la chanson est un objet qui rassemble. Elle est l’illustration d’une époque, d’une génération. D’ailleurs,  les anglais ne disent pas patrimoine, mais héritage ! »
(c) Pascal Lafay
Un héritage qu’il s’attache à transmettre et partager, avec une esthétique contemporaine, en insistant sur l’importance du métissage « Plus nous sommes mélangés, plus nous sommes cultivés !  Il faut des Peter Gabriel à la chanson française ! »
Annie Grandjanin

Le Hall de la Chanson, Pavillon du Charolais, Parc de la Villette, 211, av. Jean-Jaurès 75019 Paris. Infos et réservations : 01.53.72.43.01. Par mail : reservation@lehall.com 
site : www.lehall.com 

26 oct. 2013

Yodelice sort les riffs...


(c) Yann Orhan
Toujours coiffé d’un chapeau melon surmonté d’une plume, barbu et arborant un maquillage sur la joue, le chanteur semble tout droit sorti d’un film de Tim Burton, genre Johnny Depp dans « Charlie et la chocolaterie ». Un accoutrement singulier qui n’est pas la moindre des particularités du chanteur qui, à ses débuts, a notamment composé pour Jenifer et les L5 ! Quant à ce patronyme prometteur de voluptés ? « J’ai composé en Espagne, dans une maison qui s’appelait Yodelice. J’ai gardé ce nom qui me plaisait » expliquait Maxim Nucci  (son vrai nom) lors de la sortie de l’album « Three of Life », consacré par une Victoire de la Musique en 2010. Ancien étudiant (guitare et piano) du Music Institute of Technology de Londres, l’artiste affiche volontiers son goût pour la culture anglo-saxonne. « J’ai grandi avec elle. Chanter en anglais s’est imposé à moi, sans calcul. Je fais de la pop décomplexée ! » confiait-il alors. Après le réussi « Cardioid » Yodelice revient avec « Square Eyes »,  enregistré à New York avec son vieux complice  Xavier Caux (ingénieur du son) et le batteur Patrice Renson (Salif Keita, M…). Un nouvel opus dont les mélodies pop s’enrichissent cette fois de solides riffs rock avec des titres comme « Fade Away » ou « I Workship You ».
Annie Grandjanin

Album “Square Eyes” (Mercury /Universal), sorti le 21 octobre
En concert les 20, 21 et 22 janvier 2014 à la Cigale, 120 boulevard Rochechouart, 75018 Paris. Tél. : 01.49.25.89.99. http://www.lacigale.fr/

7 oct. 2013

Tout est bon chez Juliette !


Qu’elle nous invite à partager son « festin »,  nous ouvre sa boîte à « Bijoux & Babioles » ou nous embarque dans la Fantaisie Héroïque de « Mutatis mutandis », on a toujours eu pour Juliette les yeux de Chimène. Alors, quand elle lève le voile sur « Nour », on déchire l’enveloppe de ce nouvel opus avec la fébrilité d’un gamin le soir de Noël. Et, une fois de plus, la chanteuse est à la hauteur de notre attente. De la petite valse nostalgique d’« Au  petit Musée » qui présente ces collections qui ne valent pas un rond au tonitruant « Belle et Rebelle » en passant par les vaines tentatives de la  « Veuve Noire » pour se débarrasser d’un encombrant mari, les accents hard-rock de  « l’Eternel féminin » ou l’émouvante « Petite robe noire » qui dénonce en filigrane les violences conjugales, Juliette nous bouscule et nous transporte dans son univers fantasque, féroce et tendre. On s’amuse aussi lorsqu’elle tord le cou aux comptines enfantines avec «  La légende » (écrite par Jacques Faizant) ou revisite le chant marin dans « Jean-Marie de Kervadec » sur un texte signé François Morel. Insolente, elle s’autorise même un exercice assez scabreux en vantant les délices des « Doigts dans le nez ». « Cela faisait longtemps que j’avais envie de donner à un album mon nom de famille. Parce que je ne suis « connue » que par un prénom » confie-t-elle. Nour qui signifie Lumière de la religion est la première partie de Noureddine, un nom hérité d’un grand-père kabyle. Il est aussi et surtout, le titre phare de l’album. Une chanson qui irradie l’humanité et la tolérance pour ceux qui, lorsque la petite flamme devient vacillante, demandent le droit d’éteindre eux-mêmes la lumière…
Annie Grandjanin

« Nour » (Polydor/Universal)



4 oct. 2013

Le succès des Divalala

(c) My Marin
Plébiscitées par le public, les "Chansons d'amour traficotées" de ces trois demoiselles aux allures de divas, reviennent à l'affiche. L'occasion de voir ou revoir un spectacle qui mêle humour, émotion, charme et performances vocales (voir papier du 23 janvier dernier). 

Du 17 octobre 2013 au 4 janvier 2014, les jeudis, vendredis et samedis, à 20 h, à l'Essaïon, 6, rue Pierre au Lard, 75004 Paris. Tél.:01.42.78.46.42. www.essaion-theatre.com

13 sept. 2013

Et si on parlait d'Amou...

Niché au cœur de la Chalosse (Landes), le joli village d’Amou accueille depuis l’an dernier un festival baptisé « Chansons & mots d’Amou ». L’évènement qui s’est tenu les 9 et 10 août derniers a indiscutablement tenu les promesses de la première édition en rassemblant 2000 amoureux de la chanson et de la poésie. Un pari ambitieux et exigeant puisque les festivités ont débuté par une conférence passionnante de Stéphane Hirschi évoquant l’anticonformisme consensuel de Brassens ! Quelques heures plus tard, c’est la comédienne et chanteuse Céline Caussimon (accompagnée par son complice l’accordéoniste Thierry Bretonnet)  qui a donné le coup d’envoi des concerts avec un récital dans lequel elle évoquait, avec tendresse et un humour corrosif, l’amour bio, ses amis sur facebook,  les affres de la ménagère de moins de 50 ans… Avant de céder la scène à « La Fontaine & Brassens », un spectacle créé au Studio Raspail (voir papier du 2 juillet) qui prend ici une nouvelle dimension dans le cadre ludique des arènes d’Amou. Le samedi, Maurice Baud et sa violoncelliste Marie-Claude Douvrain ont fait frissonner et rire petits et grands avec le conte « Un roman de Renart », adapté par Bruno Cosson. Tout à tour récitant, mime, chanteur… le comédien a offert une époustouflante prestation qui donnait envie de réviser ses classiques en se replongeant dans la lecture des aventures de Tibert, Chantecler, Ysengrin, Hermelin…
Quant à la soirée de clôture, elle présentait, en première partie l’enfant du pays Daguerre (et sa violoniste Bertille), avant de résonner aux accents musette, chansons, jazz ou flamenco du tandem Yves Jamait et Daniel Fernandez. L’un s’invitant dans l’univers de l’autre pour de généreux et énergiques échanges musicaux. Un moment magique qui s’est prolongé jusqu’aux premières heures de la nuit.
Désormais, si vous passez dans cette belle région, il faudra écrire sur vos cartes postales : Amou,  son château, sa belle église Saint-Pierre des Luys, ses platanes centenaires… et son festival !
Annie Grandjanin




9 juil. 2013

Cécile McLorin Salvant: la nouvelle star... du jazz !


(c) John Abbott
Elle a tout juste 23 ans mais sa virtuosité, sa manière de se réapproprier les vieux standards, la chaleur et la puissance de son timbre (pas moins de 3 octaves), son aisance scénique, son sens de la théâtralité, l’originalité de son répertoire qui balaye trois siècles de jazz, de blues, de soul, de funk et de gospels…donnent le sentiment qu’elle maîtrise 40 ans de métier ! Pourtant, si Cécile McLorin Salvant affiche une technique impressionnante, elle le fait avec une authenticité et une fraîcheur désarmantes, à mille lieues des postures adoptées parfois par ses consœurs. En effet, alors que certaines vocalistes livrent sur scène une performance à l’identique de leur album, Cécile habite l’espace, s’empare du public avec une simplicité et une jubilation qui emportent immédiatement l’adhésion. Bien sûr, la demoiselle n’est pas tout-à-fait une débutante. Née à Miami, d’une mère française et d’un père haïtien, elle a commencé le piano classique à 5 ans, le chant à 8 ans. En 2007, elle a étudié le droit, le chant lyrique et baroque au Conservatoire Darius Milhaud à Aix-en-Provence avant de se produire dans des clubs, festivals et salles de spectacles en Europe et aux Etats-Unis. En 2010,  alors qu’elle était la plus jeune de la compétition, elle a remporté le très convoité Concours Thelonious Monk à Washington. Côtoyant la crème des musiciens comme Rodney Whitaker, Jacky Terrasson, Archie Shepp, Aaron Diehl… elle fut également l’invitée de Wynton Marsalis et son Orchestre Jazz au Lincoln Center.
 Il y a quelques jours, dans un Café de la Danse bourré à craquer, pour présenter son album « Woman Child », sorti il y a quelques semaines, elle a ressuscité un traditionnel folk comme « John Henry », rendu un hommage à la poétesse haïtienne Ida Faubert avec  « Le front caché sur tes genoux », nous a envouté sur la ballade « There’s A Lull in my Life » ou l’étonnant « You Bring out The Savage in Me » de Sam Coslow et convoqué tout à la fois Billie Holiday, Sarah Vaughan et Ella Fizgerald ! La nouvelle étoile du jazz vocal se nomme désormais Cécile McLorin Salvant.
Annie Grandjanin

Album « Woman Child » (Mack Avenue Records/Universal Jazz)
En tournée: le 9 juillet à Vienne, le 12 juillet au Festival de Jazz de Gand, le 24 juillet à Vannes, le 25 juillet à Marseille, le 26 juillet au Sunset/Sunside, 30 juillet au Tremplin Jazz d’Avignon, le 12 mai 2014 à la Cigale...



2 juil. 2013

Arbon fait rimer La Fontaine et Brassens


(graphisme Victoria Strauss)
L’idée peut sembler insolite et pourtant, lorsqu’on découvre le spectacle  « La Fontaine/Brassens », conçu et composé par Arbon, l’alliance est évidente ! A trois siècles de distance, le fabuliste et le chanteur sétois affichent une passion commune pour la langue, l’indépendance et une certaine légèreté. Une légèreté qui n’a évidemment rien de frivole comme l’a écrit Jean de La Fontaine en préface de ses Fables : « C’est ce qu’on demande aujourd’hui : on veut de la nouveauté et de la gaieté. Je n’appelle pas gaieté ce qui excite le rire, mais un certain charme, un air agréable qu’on peut donner à toutes sortes de sujets, même les plus sérieux… ». Et c’est bien ce charme, cette gaieté, cette manière d’aborder avec humour des thèmes graves comme la mort, la bêtise ou l’abus de pouvoir, qui donnent à ce « La Fontaine/Brassens » toute sa substance. Dans une sobre (trop sobre peut-être ?) mise en scène de Pierre Fresquet, le chanteur Arbon revisite ainsi  « L’Auvergnat », « La non-demande en mariage », « Les trompettes de la renommée » « Mourir pour des idées », « Je m’suis fait tout petit »… tandis que la comédienne Marie-Christine Barrault, rayonnante et inspirée, lui donne la réplique avec « Le lion amoureux », « Le chêne et le roseau » ou encore « Le savetier et le financier ». Et il faut bien avouer que la connivence d’esprit est incroyable. Les mots s’entrechoquent et s’entrecroisent avec une harmonie, une musicalité et une intelligence qui gomment les années. On imagine sans peine que si leurs chemins s’étaient miraculeusement croisés ils seraient devenus « deux amis ». Présenté au Studio Raspail à Paris, le spectacle prend ses quartiers d’été au  « Festival Chansons et Mots d’Amou »  en août. Et l’on ne saurait trop vous conseiller d’y faire un tour. Comme l’assurait La Fontaine « deux sûretés valent mieux qu’une » et la rencontre poético-musicale de ces deux univers est  absolument réjouissante…
Annie Grandjanin

Le 9 août à 21 heures, dans le cadre du Festival Chansons & Mots d’Amou, qui se déroule dans les Arènes d’Amou (40) les 9 et 10 août. A l’affiche également : l’apéro de Tonton Georges animé par Stéphane Hirschi, Céline Caussimon, « Un roman de Renart », Yves Jamait invite Daniel Fernandez, Daguerre. Infos et billetterie : 05 58 89 02 25. www.chansonsetmotsdamou.fr


24 juin 2013

Le joyeux swing de Lucy Dixon

Son nom ne vous est peut-être pas très familier mais vous connaissez sûrement sa silhouette ! Lucy Dixon a en effet intégré la troupe de Stomp à ses débuts en 1995 et assuré notamment la première tournée européenne. Mais cette pétillante anglaise n’a pas toujours chaussé les godillots de ces virtuoses de la danse et des percussions. Auteur, compositeur, chanteuse, chorégraphe… Lucy affiche un sacré cursus. « Quand je suis sortie de l’école, mon premier engagement a été pour le Lido à Paris. Je suis partie au bout d’un an car je ne voulais pas jouer la Bluebell toute ma vie ! » Elle rejoint alors le « West End » de Londres où on la retrouve à l’affiche de Cats, Follies, Metropolis, le Ballon Rouge…En province, elle incarnera également Sally Bowles dans le Cabaret mis en scène par Tim Flavin.
«Lorsque j’étais en tournée avec Stomp, j’ai écrit un certain nombre de chansons dans les chambres d’hôtels, se souvient-elle. C’est un ami qui m’a poussée à les enregistrer ». Elle sort donc un premier opus en 2006 « Me Is You Now » (Cristal Records) bien accueilli par les radios, puis en 2011, « One Too » (Plus Loin), un projet basé sur l’improvisation jazz, électro et pop, concocté avec la complicité de l’iconoclaste Professeur Inlassable.
Mais l’artiste rêve d’autre chose : « Ce qui me passionne, c’est de faire vivre les chansons sur scène». Entourée de solides musiciens issus du jazz manouche, elle a donc cherché… et trouvé une formule qui colle à son sens aigu du rythme et du show. Swinguant avec une belle et joyeuse énergie, elle revisite des standards de jazz des années 40 (qu’elle mêle de compositions personnelles) tout en s’accompagnant de percussions et de numéros de claquettes. Et le charme opère dès les premières mesures ! En attendant la sortie d’un nouvel album, prévue en janvier prochain, Lucy Dixon se produit le 3 juillet, dans le cadre intimiste de l’Orphée. Un bar qui fut paraît-il la garçonnière de Cocteau et Jean Marais…
Annie Grandjanin

Les 10 septembre, 14 octobre et 21 novembre, à 20h30, au Sunset, 60, rue des Lombards 75001 Paris. Infoline: 01 40 26 46 60. 

18 juin 2013

Johnny Hallyday: respect

A Bercy, où il donné trois concerts et célébré ses 70 ans, c’est le mot qui vient tout de suite à l’esprit. Respect pour un artiste qui entretient généreusement la flamme depuis 50 ans. Fidélité aussi car les chanteurs qui bénéficient d’une telle cote de popularité auprès de leur public et depuis si longtemps ne sont pas légion ! Des incontournables sosies aux admirateurs de la première heure, ils étaient tous là pour fêter leur idole. Une idole qui s’est offert un bain de foule sur « « Que je t’aime » avant de rejoindre la scène où l’attendaient ses musiciens. Tout de cuir vêtu, Johnny a enchaîné les classiques : « Allumer le feu », « Ma gueule », « Marie » ou encore « Je te promets », un titre sur lequel on a perçu quelques faiblesses vocales. Grandiloquent sur « Diego », interprété avec l’Orchestre de Paris, dirigé par Anne Gravoin, il s’est même offert quelques déhanchements suggestifs… avec son pied de micro ! Après un hommage appuyé à son ami Michel Berger avec le superbe « Quelque chose de Tennessee », Florent Pagny est venu lui donner la réplique sur « 20 ans » (écrit par Miossec) tandis que des photos de ses jeunes années défilaient sur un écran géant. « Grâce à vous, on a toujours 20 ans » confesse-t-il à la foule qui l’acclame, avant de céder la scène à ses trois choristes, excellentes dans une reprise du symbolique « Respect » d’Otis Redding. Un titre qui donne le ton d’une seconde partie plus convaincante. Car, c’est bien  lorsqu’il revient à ses fondamentaux, des morceaux avec lesquels il a débuté sa carrière, que Johnny touche au cœur. Sur une scène mobile, en formation acoustique, dans une tenue un poil plus sobre,  il retrouve ses accents de  crooner dans une séquence « souvenirs, souvenirs » avec un clin d’œil à Elvis Presley et quelques succès des années 60 : « Retiens la nuit » (de Charles Aznavour), « Tes tendres années », « Laisse les filles » « Si j’étais un charpentier », « Joue pas de rock’n roll »…
Accompagné au piano par Yvan Cassar, il termine son concert (plus de deux heures !) par un vibrant « Quand on a que l’amour ». Car c’est incontestablement l’amour qui porte Johnny depuis plus de cinq décennies. Celui qu’il n’a jamais cessé de prodiguer  à ses fans…qui lui rendent au centuple. Et qu’importe les rendez-vous ratés, les soucis de santé, la « gueule » burinée et le poids des ans. Sur scène, l’artiste ne s’est jamais économisé. Car, comme l'indique le titre de sa tournée Born Rocker Tour, il est né pour ça !
Annie Grandjanin

En tournée :  le 18 juin à Vienne, le 21 à Rouen, le 23 à Namur, les 25 et 26 à Monaco et le 27 à Nîmes.

16 juin 2013

Cinq de Coeur rafle la mise


Avec sa dernière création « Métronome », ce quintette a cappella (2 sopranos, 1 contralto, 1 ténor et un baryton-basse) nous embarque une fois de plus dans son univers débridé. Embarquer n’étant pas à prendre au pied de la lettre puisque l’histoire raconte justement les mésaventures de cinq usagers bloqués dans le métro!
Sur le quai : une femme d’affaires, une fliquette, une dépressive, un touriste candide et un crooner raté, reconverti dans l’animation de banquets de mariages, attendent désespérément une rame. L’occasion pour ces victimes de la grève, de se livrer à de réjouissants intermèdes musicaux. Habilement mis en scène par Pascal Légitimus, les chanteurs et comédiens puisent dans un répertoire aussi vaste qu’éclectique : Verdi, Nino Rota, Pergolèse, Claude François, Michael Jackson, Ravel, Gainsbourg, les Bee Gees, Donna Summer, Pierre Vassiliu, Quincy Jones…Il faut les voir passer du « Messie » de Haendel à « Laisse-moi kiffer » de Diam’s pour réaliser à quel point ces virtuoses, dotés d'une parfaite technique vocale, ne se prennent décidément pas au sérieux. Ajoutez à cela un humour très urbain qui évite toute vulgarité, et vous comprendrez que se retrouver bloqué avec Cinq de Cœur est loin d’être une galère…
Annie Grandjanin

Jusqu’au 4 août, du mardi au samedi à 19 h, mat. dimanche à 15 h, au Théâtre Rive Gauche, 6, rue de la Gaîté 75014 Paris. Tél. : 01 43 35 32 31. www.theatre-rive-gauche.com

28 mai 2013

Les 2G, artistes de music-hall: doublement réjouissant


Imaginé par Jean-Luc Revol, qui se produit ici avec Denis d’Arcangelo, ce spectacle est un hommage au music-hall des années 30. Un hommage truffé de références et de clins d’œil à Charpini et Brancato mais aussi à Dranem ou  Félix Mayol. Endossant la queue-de-pie de Georges et Gaëtan, des artistes qui font leurs adieux à la scène, après 40 ans de carrière, ces iconoclastes nous offrent un show follement décalé : numéro de ventriloquie, chansons animalières, parodie surréaliste de Pierre et Marie Curie découvrant le radium… le tout entrecoupé de chorégraphies et  de gags délirants. Jean-Luc Revol et Denis d’Arcangelo forcent évidemment le trait mais ils le font avec talent et un sens aigu de l’autodérision. Accompagnés par deux musiciens, en live, ils mêlent avec bonheur des chansons de Mistinguett ou Bernard Dimey et des textes d’auteurs comme François Morel, Juliette, Pierre Notte, Frédéric Botton, Pierre Philippe…Un pur moment de music-hall, irrévérencieux et totalement réjouissant.
Annie Grandjanin

Du mardi au vendredi à 21h, le sam. à 16 h et 21 h et le dim. à 17h, au Théâtre du Petit Saint-Martin, 17, rue René Boulanger 75010 Paris. Loc. au 01 42 08 00 32.


25 avr. 2013

Féfé: "J'aime surtout le son !"



(c) JMLubrano
Après la séparation du collectif Saïan Supa Crew en 2007, Féfé a attendu trois ans avant de se lancer enfin en solo avec « Jeune à la retraite ». Un premier album très justement salué par les critiques, dans lequel il prouvait ses qualités de chanteur et l’étendue de son registre, du hip hop à la soul en passant par le blues, la pop, le reggae...Le 20 mai prochain, il sort « Le charme des premiers jours » un nouvel opus qui va encore plus loin dans l’exploration musicale.
- Pour ce nouvel album, vous vous êtes posé autant de questions qu’avec le précédent ?
Non, beaucoup moins. Avec « Jeune à la retraite », je testais une nouvelle manière d’aborder la musique. Je me demandais si j’en avais le droit et si je faisais bien. Pour « le charme des premiers jours », mes interrogations portaient plus sur le répertoire proposé : « suis-je trop personnel ? », « Cet album est-il trop adulte ? »
- Il paraît que vous vous êtes inspiré à la fois des Beach Boys, de Black Keys et de Dylan. C’est une palette assez large, non ?
Et encore, vous en omettez les ¾ ! Je pense qu’il y a eu beaucoup de trouvailles de sons, de voix, de mélodies, de textes… Tout cela à la disposition de qui veut ou peut l’entendre. Moi, je ne peux pas m’empêcher de l’entendre. Je voulais qu’on ait l’impression qu’il a du vécu.
Pourquoi avez-vous enregistré à San Francisco ?
C’est là que vit et travaille le producteur que j’affectionne Dan The Automator. C’est dans son studio qu’on travaille les musiques et structures des chansons. De plus, j’aime être loin de tout et de tous quand je peaufine un album.
A l’époque du Saïan Supa Crew, on vous surnommait le rappeur technique. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Je me suis toujours senti l’âme d’un artisan. Que ce soit en rappant techniquement qu’en écrivant des chansons d’amour. Rap ou ballade, je mets tout au même niveau dans ce disque. Je confirme que j’aime surtout le son…
Propos recueillis par Annie Grandjanin

Album « Le charme des premiers jours » (Polydor/Universal). Sortie le 20 mai.
En tournée dans toute la France et à l’Olympia, le 14 octobre 2013.

4 avr. 2013

Lyrique et envoûtante Jorane


Depuis ses débuts à la fin des années 90 avec des albums comme « Vent fou » et « 16 mm », cette chanteuse et musicienne occupe une place à part sur la scène québécoise. Au point de passer avec la même aisance du Festival de Jazz de Montréal à un duo avec Anne Sylvestre, tout en tenant le public en haleine avec de longs morceaux instrumentaux. Après une tournée en solo, avec son violoncelle pour compagnon de route, elle a eu l’heureuse idée d’inviter le joueur de marimba Julien Compagne et le violoncelliste Valentin Moussu pour présenter à l’Européen, le 2 avril dernier, son nouvel opus « L’instant aimé ». Du coup, son univers singulier a encore gagné en intensité et lui donne une nouvelle liberté sur scène. Jouant de sa voix comme d’un instrument, Jorane affiche une parfaite maîtrise vocale, aussi expressive dans les graves que dans les aigus. Qu’elle revisite « Le temps passe » de Pauline Julien, nous fasse découvrir la poésie de René Char avec « Allégeance »,  nous raconte les songes qui l’envahissent dans sa « Chambre », s’installe à la harpe…cette artiste nous envoûte avec une virtuosité et une simplicité qui sont l’apanage des vrais artistes. Et que dire de sa reprise, quasiment a cappella et tout en musicalité de « J’ai demandé à la lune » qui nous  pousserait presque à reconsidérer les œuvres d'Indochine !…
Annie Grandjanin

Le 4 avril au Théâtre Le Péludive à Chatenay-Malabry, le 6 avril au Pavillon des Arts de Coaticook (Canada)…
Album « L’instant aimé » (Avalanche Productions)

2 avr. 2013

Orlika et Georges Moustaki en duo


Leur rencontre était une évidence, car ces deux artistes ont en partage des influences culturelles métissées et une vision humaniste du monde. Lui, né d'une famille grecque d'Alexandrie, auteur de succès comme "Milord" pour Edith Piaf, "Le Métèque", "Ma liberté", "Bahia", "Le temps de vivre"... Un amoureux de la chanson française, mais aussi des rythmes afro-cubains et sud-américains. Elle,  franco-israélienne a déjà trois albums à son palmarès ("J'imagine", "Be Ahava", "Orlika").  Son timbre cristallin fait merveille sur des titres comme "Je m'envole " ou le vibrant "Shalom Salam".Ils ont enregistré ensemble "Il est trop tard", un titre de Moustaki qui prend une résonance particulière, quand on sait que l'artiste a choisi de se retirer de la scène. Un beau duo, servi par des arrangements acoustiques, dans lequel leurs voix se mêlent et se répondent avec tendresse et émotion.
Annie Grandjanin

Disponible sur Believe Digital et BYA.

21 mars 2013

La Grande Sophie: au sommet


Rares sont les artistes qui se révèlent aussi enthousiasmants sur albums que sur scène ! La Grande Sophie fait partie de ces chanteuses que l’on peut écouter,  avec un égal bonheur (et en boucle !), lové sur un canapé ou debout dans une salle surchauffée !
(c) Audoin Desforges
C’était le cas hier, à la Cigale, pour sa dernière escale parisienne, avant de reprendre la route. Durant presque deux heures, cette ancienne élève des Beaux Arts a montré toute la palette de ses talents. Tour à tour, émouvante, enjouée, nostalgique, alternant chansons et morceaux rock, la Grande Sophie a assurément fait bien du chemin depuis l’époque où elle mitonnait ses histoires de filles rigolotes et mélancoliques dans sa cuisine ! Issue du circuit alternatif, elle s’est frottée à tous les publics et y a gagné une maîtrise et une exigence qui la placent aujourd’hui dans la cour des grands. Eclairée par de belles projections en fond de scène, elle a  repris quelques-uns de ses succès comme « Du courage »,  mais aussi et surtout des titres de son dernier  opus « La place du fantôme », sacré meilleur album de l’année lors des dernières Victoires de la Musique. Nous, on lui décernerait volontiers aussi celle du concert le plus électrisant de la saison ! A noter également un joli duo avec Ornette sur "Laisse-tomber les filles" (une chanson écrite par Gainsbourg pour France Gall). Le public a réservé une ovation à cette artiste qui, sur de belles mélodies aux sonorités anglo-saxonnes, a évoqué ses fantômes : ceux des amours fantasmées, des amis disparus, du temps qui abîme et qui file…Et lorsqu’en rappel, elle chante « Je ne changerai jamais » (extrait de « La Suite »), on ne peut qu’applaudir !
Annie Grandjanin

En tournée :  le 28 mars au Théâtre Municipal de Seclin, le 29 mars au Mans (Festival LM Cité chansons), le 30 mars à la Maison de la Culture de Nevers. En avril : le 5 à l’Espace Jeliote d’Oloron Sainte Marie, le 6 au Festival Elfondurock de Marcoussis,  le 19 au Théâtre des Sablons de Neuilly (Festival Chorus des Hauts-de-Seine), le 27 au Festimai de Tarnos…

4 mars 2013

Les Fouteurs de Joie : pari tenu !


Dans un décor assez sobre, éclairé de quelques guirlandes de lampions qui donnent à l’ensemble un petit air de fête foraine,  les cinq complices se présentent tout d’abord comme des musiciens. De véritables touche-à-tout puisqu’ils jouent de la guitare, du ukulélé, de la contrebasse, du banjo, de la clarinette, du tuba, du saxophone, de la guitare manouche, de la scie musicale…
Mais au-delà de ce réel talent  pour passer d’un instrument à l’autre, ils proposent un répertoire singulier, à la fois déjanté et un brin militant. Que ce soit pour défendre l’ouvrier opprimé, les mecs largués, les douceurs du « Rocking chair » ou les bienfaits de « L’andouillette » sur fond de rock endiablé ! En un peu plus d’une heure ils passent ainsi de l’humour trash des « Enfants de la centrale » à l’éloge décalée de « Oh mon patron » tout en s’autorisant de beaux moments de tendresse avec « Elisabeth » et le touchant « Sortie d’usine ». Sans oublier, un clin d’œil aux Moody Blues avec une version très personnelle et irrésistible du fameux « Nights in White Satin ». Des titres qui figurent pour la plupart sur leur dernier album « La Belle Vie » (sorti le 4 mars). Au final, ces saltimbanques remarqués dans de nombreux festivals de rue, entonnent, la main de cœur, un hymne sous forme de confession : « We are not The Rolling Stones, we are not Metallica, we are not Yvette Horner ». Ce qu’ils sont ? Des saltimbanques qui portent un regard ironique, cocasse et sensible sur le monde, sans jamais se prendre au sérieux. Et, incontestablement, ces Fouteurs de Joie tiennent leurs promesses…
Annie Grandjanin

Tous les lundis à 20 h 30 (et à 21h30 chaque dernier lundi du mois), jusqu’au 24 juin. Au Grand Point Virgule, 8 bis, rue de l’Arrivée 75015 Paris. Tél. : 01 42 78 67 03.

13 févr. 2013

Juliette fait salon


« On dit que je suis une chanteuse réaliste. C’est faux ! Pour les textes, je me suis souvent inspirée de mes lectures. En fait,  je suis une chanteuse romanesque ! » s’amuse Juliette en préambule de son spectacle de lectures «Le Tigre Mondain ». Un exercice auquel elle s’était déjà livrée en octobre 2000, sous les voûtes historiques de la Conciergerie. A l’époque, elle avait puisé dans des fabliaux paillards du Moyen-âge. Cette fois, dans le cadre plus conventionnel d’une scène de théâtre -mais peut-on parler de convention lorsqu’il s’agit de Juliette ?-, elle nous invite dans son salon, façon boudoir rococo. Bien sûr, l’artiste ne se prend ni pour Madeleine de Scudéry, ni pour la Marquise de Rambouillet ! Ce rendez-vous est avant tout l’occasion de  présenter quelques morceaux choisis parmi ses auteurs « chéris » : Geoffroy Monde, Jules Renard, Dino Buzzati… Des récits entrecoupés de petites sentences assassines, d’apartés cocasses ou d’anecdotes qu’elle distille avec un talent certain de comédienne. Mutine, elle s'inquiète de la présence d’enfants dans la salle avant de feuilleter l’impudent « Manuel des civilités pour les petites filles à l’usage des maisons d’éducation » de Pierre Louÿs. Evidemment, cette épicurienne qui goûte les bons crûs autant que les mots d’esprit, ne résiste pas au plaisir d’ironiser sur l’ouvrage « Moi Zlatan Ibrahimovic ». Un « auteur » suédois plus populaire dans les tribunes des stades de foot que dans les rangs de l’Académie Française ! Un prétexte pour attirer notre attention sur un autre versant de l’écrit sportif avec la désopilante et onirique épopée de « La Passion considérée comme course de côte » d’Alfred Jarry.
 Un vrai festin littéraire dont les ingrédients changent chaque semaine, puisque Juliette pioche, au gré de sa fantaisie et de son humeur, parmi les ouvrages qui l'entourent. On songe évidemment à cette citation de Jules Renard: « Quand je pense à tous les livres qu’il me reste à lire, j’ai la certitude d’être encore heureux »…
Annie Grandjanin

Chaque lundi à 20h30 jusqu’au 25 mars. Théâtre des Mathurins, 36, rue des Mathurins 75008 Paris. Tél. : 01.42.54.90.00

7 févr. 2013

Idir, le passeur


(c) Klaus Roethlisberger
Assister à un concert d’Idir, c’est partager quelque chose de sacré, tant l’homme entre en totale communion avec son public. Au début du spectacle, une jeune fille vient d'ailleurs confier, en quelques mots, la place qu’il tient dans l’histoire et la culture kabyle. Outre le célèbre  « A Vava Inouva », le chanteur a en effet enrichi le répertoire de morceaux empreints d’humanisme dans lesquels il exprimait notamment son amour et son respect pour les femmes. Des femmes qui se sont pressées en nombre, certaines en costumes traditionnels, lors de son premier concert à l’Olympia, le 4 février dernier. Une date qui coïncidait avec la sortie de son nouvel album éponyme, le premier en solo depuis 1993 !
Autant dire que la ferveur était au rendez-vous ! Entouré de ses musiciens complices, de danseuses et d’un quatuor à cordes, il a revisité d'anciens succès et présenté ses nouvelles chansons. Des titres essentiellement en kabyle, évoquant sa montagne ("Adrar Inu"), son rêve d'un monde meilleur ("Targit"), sa maman récemment disparue ("Tayemmatt")… tout en offrant de jolis moments de connivence avec sa fille Nina. Le propos semble un peu moins militant que par le passé, comme si, mettant de côté sa pudeur naturelle, il s'autorisait des émotions plus intimes.
Touchée, la salle a ovationné ce  « passeur » généreux et authentique, dont les messages de tolérance ont largement dépassé les frontières et les générations. Rares sont les artistes qui, en grattant juste deux ou trois notes sur leur guitare, peuvent se vanter de voir leur auditoire enchaîner couplets et refrains dans un même élan. On lui pardonnera donc quelques passages un peu bavards. L'émotion sans doute de retrouver des fidèles qui le suivent depuis si longtemps...
Annie Grandjanin

En tournée : « Le Théâtre » à Corbeil Essonne (9/02), Salle Mac Orlan à Brest (23/02), à l’Olympia de Montréal (15/03), Palais Montcalm à Québec (16/03), Salle des Fêtes de la Mairie de Montreuil (20/04)…

24 janv. 2013

Qu'est-ce qui fait courir Michel Jonasz ?


On l’aime comme un copain d’enfance avec qui on aurait joué aux billes en bas de son logement HLM. à Drancy. On l’a suivi au Golf-Drouot, dans sa « Boîte de jazz », rêvé d’être sa super nana, partagé sa peine en se repassant en boucle « Dites-moi » ou « Je voulais te dire que je t’attends ». On l'a écouté nous raconter la fabuleuse histoire de Mister Swing. Avec lui, on a même cherché où pouvaient bien aller les nuages…  

(c) Stéphanie Vivier
Bien sûr, le phrasé est moins net mais le timbre est toujours aussi prenant. Et les années n'ont pas émoussé ses facéties de gamin qui s'amuse du temps qui passe. Car chez Jonasz, la nostalgie n'est jamais larmoyante. Pour preuve, ses récents concerts au Casino de Paris qui clôturaient sa tournée autour de l’album « Les hommes sont toujours des enfants ». Subtilement éclairé, accompagné de deux choristes et de trois excellents musiciens : Guillaume Poncelet (claviers et trompette), Stéphane Edouard (percussions) et Jim Grandcamp (guitare), il s'est lancé dans des chorégraphies énergiques sur des notes de salsa, de rock, de jazz,…a repris "Hoochie Coochie Man"de Muddy Watters, chanté "Les Fourmis rouges" avec son public et enchaîné des anecdotes tendres et délirantes comme son imitation du Général de Gaulle déclamant « Viens poupée, viens danser le twist ». Au final, entouré par le groupe vocal Tale of Voices, il a ressuscité « Du blues, du blues, du blues »...
L'année 2013 s'annonce chargée pour Michel Jonasz puisque le DVD de la tournée devrait sortir au printemps et qu'il promet pour novembre une série de concerts piano-voix avec son complice Jean-Yves d’Angelo. Il est également à l’affiche de « Rue Mandar » avec Sandrine Kiberlain et Richard Berry. Le film d’Idit Cebula, sorti le 23 janvier dernier.
Annie Grandjanin

20 janv. 2013

Les délires musicaux d'Alain Bernard

Dans les années 80, il avait notamment fait les beaux soirs du Tintamarre avec "Phèdre à repasser" et "Le cave habite au rez-de-chaussée" puis accompagné Smaïn au piano. Cette fois, avec "Piano Rigoletto", l'humoriste et musicien Alain Bernard endosse le costume d'un professeur pour un cours très particulier (mis en scène par Pascal Légitimus) sur l'histoire de la musique, de la préhistoire à nos jours.
 En 1h15, jonglant avec virtuosité entre piano et casio, (avec boîte à rythmes intégrée), ce trublion se fend d'un cours magistral sur la chanson de geste, Chopin, Bob Marley, les artistes Rive Gauche, les castrats, les affres du musicien de piano-bar ou de l'animateur de baloche, les génériques de pubs et de séries télé...Entre deux citations de Nicoletta et même de Nietzsche, Alain Bernard enchaîne, sans temps morts, caricatures et délires devant un auditoire conquis par cette approche pas franchement académique de l'histoire de la musique. Un spectacle hilarant qui se termine par une jolie note de tendresse lorsqu'il interprète "La valise", une chanson composée par son papa, pour Bourvil.
Annie Grandjanin

Théâtre des Déchargeurs, salle Vicky Messica, 3, rue des Déchargeurs 75001 Paris. Tél.:01.42.36.00.50. Du mardi au sam. à 21h30, jusqu'au 31 janvier. Prolongations du 6 au 23 mars, du mar. au sam. à 19h30.