23 oct. 2017

Medhi Krüger: 'l'envie de croire est déjà une victoire"

Véritable funambule du verbe, se jouant des rimes et des jeux de mots avec un lyrisme, une grâce et une intensité impressionnants, Mehdi Krüger a été l'une l'une des révélations du festival "Chansons & Mots d'Amou", cet été.
Accompagné par son fidèle complice Ostax à la guitare, il a touché le public, toutes générations confondues. Rencontre avec un artiste qui confesse lui-même dans sa biographie: "j'aime les mots, d'aussi loin que je m'en souvienne".  Nul doute, que le public d'Amou se souviendra longtemps de son passage dans les arènes...

Vous dites volontiers que vous préférez les rencontres aux rendez-vous ?
C'est vrai. Pour moi, la scène est avant tout une rencontre, dans le sens où mon propos est d'établir le dialogue.
Certains journalistes vous ont surnommé "le griot de l'asphalte et du béton". Vous êtes d'accord ?
Je ne sais pas trop. Je me suis parfois épuisé à définir ce que je fais. Les slameurs disent que je fais de la chanson car le slam est normalement a cappella. Ce qui est sûr, c'est que ma démarche a quelque chose d'urbain.
Vous avez pourtant tenté de vous définir en rédigeant vous-même votre biographie ?
Sans doute parce que je trouve que, souvent, les biographies ressemblent à des nécrologies ! Je préfère l'idée de raconter une histoire.
La vôtre est marquée par vos racines allemandes et algériennes ?
Oui. Comme je l'ai écrit, les mots ont été pour moi le moyen de rassembler les pièces de mon puzzle ! Mes deux grands-pères ont fait la guerre contre la France. Mon vrai pays, c'est la langue française. Celle avec laquelle je rêve, que je je parle avec mon fils.
Vous avez une vraie complicité avec votre compositeur et guitariste Ostax ?
Cela fait un moment que nous travaillons ensemble. Je ne pourrais pas défendre un texte avec lequel il ne serait pas d'accord. L'idée est que chacun s'exprime à sa manière. Lui avec les cordes de sa guitare, moi avec mes cordes vocales...
Vous vous défendez d'être didactique dans vos propos, non ?
Je n'ai pas envie d'accabler le public avec des jugements moraux ou des constats d'impuissance. L'envie de croire est déjà une victoire ! Ce qui m'intéresse c'est de passer par le jeu avec la langue, les glissements de sons et de sens. Et quelques tiroirs, parfois. Je mets à point d'honneur à ne jamais mettre de références dans mes textes. Je me suis toujours méfié des artistes qui mettent l'art au service d'une cause.  La parole n'est pas gratuite. Je me méfie tout autant du camp du bien qui conduit à une espèce de suffisance dans l'écriture. Je suis attaché à la liberté d'expression mais je veille à ne blesser personne. La vitalité de la démocratie, elle est là aussi. Je crois à l'empathie avec le public et j'aime me mettre en danger.
Comme lorsque vous demandez aux spectateurs de choisir les mots de votre prochain texte ?
Je viens de l'improvisation. C'est une manière de montrer l'envers du décor. Je ne sais jamais où cela va m'emmener.
Le parti-pris de l'écoute gratuite sur votre site, est aussi un risque assumé ?
Je suis convaincu que la musique doit circuler librement. Mes disques ("Luttopies",  "St-Germain-d'Après"...) sont en effet en écoute gratuite. Entre le moment où l'on écrit un texte et où il commence à exister il peut se passer deux ans. Moi je partage tout de suite. En procédant ainsi, j'achète ma liberté.
Parlez-nous de cette création avec le Quatuor Debussy ?
J'aime les projets pluridisciplinaires. J'ai participé en juillet dernier à la création d'un spectacle "Les Sept dernières Paroles du Christ en Croix" de Haydn", avec le Quatuor Debussy. Nous avons joué la première à l'Abbaye de Cruas (Festival "Cordes en Ballade").  L'idée était de faire ressortir l'aspect humaniste en gommant le côté religieux. Le pire danger dans notre métier, c'est de rester dans ses  zones de confort. Pour moi, la routine c'est un peu comme de la mauvaise herbe que l'on peine à arracher...

En tournée: le 28 octobre 2017 à Stavelot (Belgique), le 22 novembre au Festival "Le Quesnoy En Chanteur(s)", Le Quesnoy (59), le 25 novembre au Festival "Chansons Buissonnières", à Charnècles (38)...
















20 oct. 2017

Kimberose: la nouvelle voix de la soul

Il aura suffi d'un passage dans Taratata et d'un premier EP "It's Probably Me", sorti le 6 octobre dernier pour que l'on fonde littéralement pour le timbre et le charisme de Kimberose.
A l'Entrepôt où elle fêtait vendredi dernier ses débuts discographiques, cette interprète, auteur-compositeur de 26 ans a également fait preuve d'une impressionnante aisance scénique.
Accompagnée d'un solide quatuor de musiciens (guitare, batterie, synthé et contrebasse), elle a proposé un concert, à la fois joyeux et émouvant, enchaînant suaves ballades et morceaux plus rythmés.
Outre les titres de son EP "It's Probably Me", "About Us", "Alone in My Dreams" et le déjà populaire "I'M Sorry", elle nous a offert la primeur de deux titres, écrits dans la semaine, une reprise très inspirée de Sam Cooke "A Change Is Gonna Come" ou encore une poignante chanson "George", dédiée à son père, en version acoustique guitare-voix.
D'origine anglaise et ghanéenne, Kimberley Kitson Mills qui a passé ses premières années dans la banlieue de Londres, a fait quelques essais dans le trip hop puis un passage dans "Nouvelle Star" avant de trouver sa voix. Et quelle voix ! Un grain aussi mélodieux dans les graves que dans les aigus, avec des accents rauques qui rappellent les grandes vocalistes de la soul et du jazz.
"Je suis très impressionnée, vous êtes nombreux" s'est-elle étonnée lors du concert sold out à l'Entrepôt.
On prend le pari que le public devrait réserver un accueil tout aussi chaleureux à cette belle et vibrante artiste pour la prochaine date parisienne au Café de la Danse et son premier album attendu pour le début de l'année.

EP "It's Probably Me" (Freedonia Entertainment).
En concert: le 5 novembre 2017 au Charleston à Amiens et le 23 mars 2018 au Café de la Danse (5, Passage Louis-Philippe, 75011 Paris). Tél.: 01.47.00.57.59.


2 oct. 2017

Tous nos voeux de bonheur: une comédie drôle et grinçante

(c) Fabienne Rappeneau
L'histoire imaginée par Marilyne Bal n'est pas forcément inédite mais elle est traitée ici avec un humour incisif et dopée par l'énergie des deux comédiennes: Karine Dubernet et Marie-Hélène Lentini (en alternance avec Claire Gérard).
Sur scène, ces deux soeurs (Claire et Charlotte) que tout oppose se retrouvent au mariage de leur cadette... avec une autre femme ! Divorcée, rebelle à l'ordre établi et farouchement indépendante, Claire salue le choix de la soeurette. Mais Charlotte, l'aînée, a quelques difficultés à le cautionner. Mère et épouse comblée, son bonheur apparemment sans nuage, pour lequel elle a renoncé à sa vocation d'infirmière, la conforte dans ses certitudes. Des certitudes qui voleront bientôt en éclat à la lumière de révélations fracassantes.
Entre deux toasts, ponctués par une efficace bande-son (sur des musiques d'Hervé Devolder), les soeurs vont renouer des liens distendus depuis de nombreuses années.
La mise en scène de Jean-Philippe Azéma sert habilement les deux comédiennes dont le tempérament explosif donne toute sa saveur à une comédie douce-amère sur le mariage, la maternité, le mensonge, les trahisons... On se laisse aller à un bienheureux du fou-rire lorsque Marie-Hélène Lentini se métamorphose en furie aguicheuse pour affirmer son nouveau statut de femme libérée. Ce qui n'empêche pas de jolis moments d'émotion.
Pas de grand déballage ni de vulgarité gratuite dans ce spectacle, mais une série de saynètes drôles et touchantes qui, par petites touches, balancent aux oubliettes quelques a priori...

Du dimanche au mercredi, à 21 h et mat. le samedi à 15 h, au Théâtre Comédie Bastille, 5, rue Nicolas Appert, 75011 Paris. Tél.: 01.48.07.52.07. http://www.comedie-bastille.com/