16 juil. 2021

Les pétillants délires de "Bonjour ivresse !"

 

(c) Sandra Sanji




Dès le premier tableau, on comprend pourquoi cette comédie, écrite par Franck Le Hen, tient l'affiche depuis  8 ans et cumule déjà  plus de 2000 représentations.  "Avec cette pièce, j'avais envie de mélanger mon amour pour le boulevard français et les sitcoms américaines" confie l'auteur qui incarne également le personnage de Benoît, depuis la création de "Bonjour Ivresse !" en 2010.
Le propos ? Benoît se prépare à fêter son quarantième anniversaire en compagnie de Wanda (Clair Jaz),  sa truculente meilleure amie et Marie (Eléonore Sarrazin), sa soeur, inconsolable depuis la fuite inexpliquée de son premier amour. En guise de cadeau, cette dernière lui apporte un petit coffre à jouets dans lequel il remisait ses souvenirs d'enfant et d'adolescent. Entre une photo dédicacée de Jakie Quartz, un ourson et un kiki, il découvre une feuille contenant la liste des choses qu'il se promettait de faire avant ses 40 ans: trouver l'amour de sa vie, avoir un enfant, coucher avec une fille, s'excuser auprès de Raphaël et tout avouer à Marie. Hormis les deux derniers voeux  plus énigmatiques, le reste est plutôt conventionnel. Sauf que Benoît fête ses 40 ans le lendemain et qu'il est gay ! Un peu court et compliqué pour réaliser ses objectifs...

Clair Jaz et Cyril Garnier (c) Sandra Sanji

Voilà pour l'esprit boulevard car la situation prend évidemment des tournures inattendues, enchaînant  quiproquos et mises au point.  Quant au côté sitcoms à l'américaine, on le retrouve dans l'évocation d'une adolescence rythmée par les tubes des années 80/90, les tenues délirantes et l'insouciance des personnages campés avec talent par le quatuor de comédiens.  D'après une mise en scène de Christine Hadida et Franck Le Hen, le spectacle se déroule sur un rythme effréné. Les dialogues percutants puisent à l'occasion dans certains clichés, mais c'est pour mieux en rire et les banaliser. 
Invité inattendu, Raphaël (Cyril Garnier) l'amour de jeunesse de Marie, fait alors on apparition...  

Franck Le Hen et Eléonore Sarrazin
(c) Sandra Sanji

On ne lèvera pas davantage le voile sur les multiples rebondissements, mais on vous promet un moment aussi réjouissant et pétillant que les bulles qui circulent généreusement tout au long de "Bonjour ivresse !". 

Jusqu'au 11 septembre 2021, les vendredis et samedis à 21h30, matinée le samedi à 17h30, 
au Théâtre Trévise, 14, rue de Trévise, 75009 Paris. 
Réservations: 01.48.65.97.90 et points de vente habituels. www.theatretrevise.com
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9 juil. 2021

Pascal Forneri : " Mon père menait sa vie avec droiture"

Pascal Forneri
(c) COCO

Deux ans après la disparition de Dick Rivers (le 24 avril 2019), un DVD intitulé "L'essentiel" célèbre les 50 ans de carrière du rocker niçois. Au total 2h30 de séquences filmées lors de ses passages à la télévision, des années 60 à 2000 et réunissant 56 chansons: "Est-ce que tu le sais ?" avec Les Chats Sauvages, "Marilou", "Dans le ghetto" (reprise d'Elvis Presley), "Roule pas sur le Rivers", "Nice, baie des anges", "L'homme sans âge"... mais aussi des duos avec Eddy Mitchell ("Rock Around The Clock"), Francis Cabrel ("Summertime Blues") et le Golden Gate Quartet ("Ainsi soit elle"). 
Entretien avec son fils Pascal Forneri, scénariste, réalisateur de documentaires, de fictions, de clips,  auteur de BD... qui a participé à la conception de ce témoignage exceptionnel et inédit.

- Comment avez-vous procédé pour réunir et choisir ces enregistrements télévisés ? 
Ce sont essentiellement des archives de l'INA (Institut National de l'Audiovisuel). J'ai travaillé avec Christophe Renaud, un documentaliste qui est fan de mon père. Il a réalisé un boulot incroyable. Il a fallu se limiter et faire des choix car le répertoire de mon père compte trois fois plus de chansons !

- Quelle est la période que vous préférez ?
J'aime plus spécialement les années 70/80 où les titres sont très rock et la période assez soul et R'n'B de la fin des années 60.

- Il y a eu aussi cette  belle tournée "Rock'n Roll Show" avec Francis Cabrel et le groupe Les Parses, en 1990 ?
Il y avait une belle relation entre eux. Ils partageaient un goût commun pour le rock, même si Francis était plutôt Chuck Berry alors que mon père allait vers Elvis Presley. C'est drôle parce que l'album de leurs duos vient de ressortir, trente ans après.

- Pouvez-vous nous parler de l'amitié entre votre père et Alain Bashung ?
Comme tous ceux de sa génération, mon père était un peu perdu durant la période post-68. Il s'est mis à faire des albums encore plus rock. C'est à ce moment là qu'il a rencontré Bashung. Ils aimaient les mêmes choses et ont passé beaucoup de temps ensemble. Ils ont même monté un groupe "The Rock Band Revival" et ont enregistré deux albums où ils reprenaient des standards du rock américain. Mais leurs vrais noms de figurent pas sur les enregistrements car ils étaient tous les deux sous contrat.  Bashung a écrit la chanson "Marilou" pour mon père. Leur complicité a duré des années puis ils se sont perdus de vue. La seule fois où je les ai vus ensemble, c'était à l'avant-première d'"Arthur et les Minimoys", le film de Luc Besson dans lequel ils faisaient des voix. 


- Sa passion pour le rock remontait à son adolescence  à Nice ?
Son père était boucher dans le vieux Nice et lui a grandi en regardant du côté de l'Italie. Pour lui, les meilleurs musiciens étaient là-bas. Ils avaient deux ans d'avance, ce qui est énorme dans le rock ! Il admirait des artistes comme Adriano Celentano.  D'ailleurs, à ses débuts avec Les Chats Sauvages, son objectif était d'aller à San Remo. Lorsqu'il et arrivé à Paris, il était presque déçu. Il avait conservé un côté provincial. Sa grande distraction était le prendre un métro et de faire le trajet dans les deux sens ! Lorsque je retourne à Nice, je croise toujours quelqu'un qui me raconte des histoires sur mon père ou mon grand-père.

- Vous n'avez jamais été tenté de suivre ses traces dans la musique ?
Faire comme lui ne m'a jamais effleuré. Moi, je suis du côté audiovisuel. C'est comme une sorte de complément parce que pour mes documentaires et les clips, je sais comment fonctionnent les artistes.

- Justement, vous avez dit à propos de Gainsbourg qu'il gérait sa vie comme une oeuvre d'art. Comment votre père gérait-il la sienne ?
Je dirais qu'il menait sa vie avec droiture. Il n'a jamais décroché de sa passion pour le rock. C'était à double tranchant car, contrairement à d'autres artistes, il ne se mettait pas au diapason. Du coup, il avait moins d'exposition. 

- Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Sur une série pour Arte qui s'appelle "Citizen 0.1". Un truc sans rapport avec la musique. Et pour France 3,  deux documentaires qui sont programmés en prime, à la rentrée: "Rochefort Marielle Noiret: les copains d'abord" et "Chroniques de l'Âge Tendre". 

 - Vous avez réalisé des documentaires musicaux, notamment sur Julien Clerc. Vous projetez d'en faire un sur votre père ?
Je le ferai un jour. Sans doute sous cet angle provincial qui le différenciait des artistes de sa génération. C'est une clef pour comprendre son parcours.

 - Il paraît qu'une rue et un espace public devraient porter le nom de Dick Rivers à Nice ?
Pour l'instant, je ne peux pas vous en dire plus mais le maire m'a indiqué que c'était son souhait.
 
- DVD "Dick Rivers L'Essentiel" (Marianne Mélodie), disponible depuis le 15 avril 2021.
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7 juil. 2021

Riopy: "Dans le monde de la musique, je suis perçu comme un mouton noir !"

(c) Raphaël Lugassy

Son nom ne vous est peut-être pas familier, pourtant Riopy (de son vrai nom Jean-Philippe Rio-Py) fait un carton sur les plateformes digitales.  Parmi les rares renseignements récoltés à son sujet, on peut lire que les clips de ce pianiste français auraient atteint 200 millions de connexions ! Discret sur son parcours, on sait qu'il vit à Londres depuis une quinzaine d'années, qu'il est un papa comblé et que pour échapper à la solitude et au traumatisme d'une enfance passée dans une secte, il a trouvé l'apaisement dans la musique. Voilà pour la petite histoire... 
Pour la grande, ce passionné devient intarissable. "Dans le monde de la musique, je suis perçu comme un mouton noir: ni classique, ni jazz, ni pop... je n'entre dans aucune case. J'ai quitté la France parce que je n'avais rien ici et donc rien à perdre". Un exil que Riopy a mis à profit pour développer son goût pour la méditation et la thérapie par la musique. "La musique, c'est ce qui t'aide à t'évader quand tu souffres, que tu es seul. Certains adoptent un chien ou s'inscrivent à des cours de tennis, moi j'ai mon piano !". Un Fazioli qu'il a fait accorder à 432 Hz . Pour les néophytes, il s'agit de l'unité de fréquence du son qui est habituellement à 440 Hz. "Ce sont des fans qui me l'ont suggéré. Je suis quelqu'un de très ouvert et j'adore aller où il ne faut pas aller. J'ai enregistré sur cette fréquence et j'entends la note comme une goutte d'eau !".

A l'écoute des morceaux de "Bliss", son troisième album, on réalise en effet que la musicalité de ce jeune compositeur est surprenante. Que ce soit avec le bien nommé "Sweet Dream",  "La Vernatelle", "Be a Prelude", "Sky Opus Fire", "Joy"... on a le sentiment d'être plongé dans une bulle de douceur. Un véritable remède contre  le stress ambiant. Lui-même confesse pourtant "Je ne voulais pas faire cet album. La pandémie m'a impacté comme tout le monde. Mais la musique m'a sauvé et j'ai envie de redistribuer tout ce qu'elle m'a apporté".  Des scientifiques et des psychanalystes se sont d'ailleurs intéressés à son travail. " J'ai fabriqué des ondes binaurales (qui permettent d'atteindre un état de profonde relaxation) et créé un morceau de 22 minutes avec des techniques d'hypnose".
 Il a aussi composé pour le cinéma, la télévision, les publicités... et son album est au top des ventes aux Etats-Unis. Depuis une dizaine d'années, son nom est populaire en Chine. Pour autant, Riopy demeure un électron libre. "On m'a demandé de copier d'autres musiciens ou de m'habiller en pingouin, mais j'ai refusé de jouer le jeu. L'essence de l'être humain, c'est la vérité". 
On peut évidemment trouver le propos idéaliste mais, en ces temps troublés, un artiste dont le credo est d'apporter un peu de bonheur et de sérénité, cela donne simplement envie de mettre "Bliss" sur la platine et de se laisser aller à rêver.. 


- Album "Bliss" (Warner Classics). Disponible depuis le 2 juillet 2021.
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5 juil. 2021

Le rock envoûtant de Belfour

 
(c) Jean-François Robert

Leur EP auto-produit "Si la rivière coule" est arrivé comme une belle promesse, dans le paysage musical français. Outre l'hymne à la liberté et à l'amitié qui donne son titre à l'opus, on se laisse littéralement happer par la poésie onirique et l'esthétisme rock-folk de "Un coup ou deux", "On verra bien", "Les corolles", "Juste une seconde"... Des chansons qui parlent de montagnes éternelles, de l'usure du manque d'amour mais aussi d'espoir, du jour qui passe entre les fissures. Réunis sous le nom de Belfour, Lucie Mena chante et écrit tandis que Michael Sacchetti compose et joue de la guitare. Une osmose parfaite pour ce duo originaire de Clermont-Ferrand qui a notamment assuré les premières parties de Bertrand Cantat en 2018.  
Entretien dans un café de Montreuil, l'autre point d'ancrage de Belfour, quelques jours après leur concert parisien aux Trois Baudets. Le temps d'évoquer un parcours jalonné de fructueuses rencontres et de belles histoires...

-  Quel est le lien entre votre duo et Robert "Wolfman" Belfour, un bluesman du Mississippi, disparu en 2015 ?
M.S. J'étais parti aux Etat-Unis avec ma guitare. A l'époque, je me cherchais musicalement. Un soir, dans un magasin de disques, un mec m'a fait écouter Belfour en m'indiquant qu'il se produisait pas très loin, dans une petite salle.  J'ai tout de suite été fasciné par ce mélange entre l'Afrique et la musique américaine. J'ai décidé d'aller l'écouter. Lorsque j'ai poussé la porte, je suis tombé sur lui et il m'a invité à venir jouer quelques notes. De retour en France, je l'ai fait découvrir à Lucie.
L.M. Michael a fait le voyage de mes rêves ! J'ai toujours écouté du blues et là, j'ai vraiment adoré. Nous chantions encore en anglais à ce moment là et nous cherchions un nom de groupe. Belfour est venu tout naturellement...
- Pourquoi avez-vous opté pour le français ?
L.M. En fait, j'avais des difficultés avec l'anglais et cela faisait un moment que nous songions à aller vers le français. Le déclic est venu avec Laurent Benitah, un musicien que nous avons hébergé en Auvergne. Il nous a complètement coachés et nous a convaincus de chanter en français. 
- Et comment avez-vous décroché la première partie de Bertrand Cantat ?
L.M. C'est grâce à Pascal Humbert (ex-Détroit et 16 Horsepower), l'acolyte de Cantat. Il était venu nous voir et il lui a parlé de nous.
- L'annulation de certains concerts a dû vous couper dans vote élan, non ?
L.M. Oui et non. Nous n'étions pas prêts. Mais j'avoue que j'ai été déçue d'apprendre que nous ne passerions pas à l'Olympia. J'avais travaillé au service merchandising de cette salle et y revenir à l'affiche était l'un de mes rêves.
-  "Si la rivière coule" est une oeuvre collective ?
L.M. C'est surtout nous deux mais il y a des participations (Laurent Benitah, Pascal Humbert, Toma Milteau, Nicolas Couret). Nous avons besoin de collaborer pour éviter d'être trop enfermés sur nous-mêmes ! Quand j'écris, je montre mes textes à Michael. Il m'apporte son  regard masculin.
M.S. J'ai une double casquette de musicien et d'ingénieur du son. Nous sommes complémentaires.
(c) Jean-François Robert

- Vous avez fait d'autres belles rencontres pour ce EP ?
L.M. Notre histoire est faite de rencontres et d' aventures humaines. Nous avions 2 clips mais nous trouvions que le résultat ne nous correspondait pas. J'avais aimé le travail de la réalisatrice Elizabeth Marre sur "Manon sur le bitume". Lorsque j'ai appelé Walter Films pour demander son contact, je suis tombée sur le directeur qui a fait le lien. Nous avons tourné au coeur des volcans d'Auvergne et le clip a été sélectionné pour des festivals dont celui du court-métrage de Clermont-Ferrand. Pour le graphiste Jérôme Witz qui a notamment fait la pochette de "Bleu Pétrole" pour Alain Bashung, nous lui avons juste parlé au téléphone et il a donné son accord. Quant au photographe Jean-François Robert, il habite à 100 mètres de chez nous ! 
- "Si la rivière coule" a été enregistré dans plusieurs lieux ?
 Oui. La première session, par exemple,  a été faite dans les dépendances de la maison de Nino Ferrer, dans le Lot. Sa femme et son fils sont d'une incroyable gentillesse. Ils nous ont accueillis dans une sorte de home-studio où nous avons croisé Arthur H, Jean Fauque...
- Sur scène, vous évoquez l'idée de laisser des traces comme votre arrière-grand-père qui plantait des arbres ?
L.M. Il a notamment reboisé le plateau de Millevaches et écrit, je pense, le premier ouvrage d'écologie en France. Il s'appelle "Le manuel de l'arbre" et a été distribué dans les écoles. 
- Mettre une citation de Sénèque dans le livret de votre disque n'est pas banal ?
L.M. J'ai toujours aimé cette phrase : "La vie ce n'est pas d'attendre que l'orage passe, c'est d'apprendre à danser sous la pluie". Quand tu décides de vivre de tes rêves, tu n'es pas à l'abri des mauvaises rencontres. Avec Michael, on aurait pu arrêter 1000 fois de faire de la musique, mais nous sommes des battants !


- album "Si la rivière coule", disponible depuis le 4 juin 2021.

En tournée: Le 8 juillet 2021 à La Bourboule (63), le 17 juillet au Festival Art'Air - Château de la Batisse (63), le 22 juillet à Mazeyrat d'Allier (43), le 23 juillet à Lavoûte-Chilhac (43), le 20 août à l'Oasis de Clairette - Moustiers Ste-Marie (04), le 21 août à la Ferme Marine des Aresquiers - Vic La Gardiole (34), le 17 septembre à Albi (81), le 18 septembre au Festival Détour de Chant à Toulouse (31), le 19 septembre au Festival Pignol'Arts de Pardines (63), le 9 novembre à Cébazet, avec Miossec et Dani pour Sémaphore en chanson (63), le 13 novembre à Ceyssat (63)...
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