13 févr. 2020

La belle histoire du collectif Pockemon Crew

(c) Paul Bourdrel
Il était une fois... des potes issus des quartiers de Lyon, à la recherche du terrain idéal pour se livrer à quelques figures de hip-hop. Ce sera le parvis de l'Opéra de Lyon !
Leur patronyme, ils l'adoptent en référence au dessin animé qui fait fureur auprès des jeunes à la fin des années 90 et y ajoute crew (qui signifie troupe ou groupe en anglais)...
Une vingtaine d'années plus tard Pockemon Crew, dirigé par le chorégraphe Riyad Fghani, est devenu le groupe de breakdance le plus primé. Il a tourné un peu partout dans le monde avec des spectacles comme "Silence on tourne", inspiré du cinéma des années 30-40, "Hashtag 2.0" évoquant l'omniprésence des réseaux sociaux...
Quant aux membres, ils couvrent quasiment trois générations puisque la plupart ont rejoint le collectif à l'âge de 13/14 ans. Au fil des années,  Pockemon Crew a su intégrer la rigueur des danseurs classiques et les prouesses du hip-hop.
Il fêtera son vingtième anniversaire à Bobino avec le spectacle "Empreinte", une création confiée à Rachid Hamchaoui.

Du 19 au 22 février 2020 à Bobino, 14-20 rue de la Gaîté, 75014 Paris. Tél. 01.43.27.24.24. 
Loc. points de vente habituels. Places: de 19 à 37 €. http://bobino.fr/


12 févr. 2020

Robin McKelle: "J'essaie de mettre l'émotion avant la perfection

(c) Frank Bullitt
Depuis ses débuts, elle s'est imposée comme une vocaliste  aussi impressionnante dans le répertoire jazz que dans le blues, la soul ou le rhythm'n'blues.
Pour son nouvel album "Alterations" (dans les bacs vendredi prochain),  Robin McKelle s'offre un grand écart entre les générations et les styles avec des reprises de Sade, Amy Winehouse, Dolly Parton, Billie Holiday, Lana Del Ray, Carole King, Joni Mitchell, Janis Joplin, Adèle...
Un exercice dont elle se sort avec une égale virtuosité.
Des chansons enregistrées, à New York, dans les conditions d'un live, en une seule prise. Un huitième opus qui bénéficie également de brillants arrangements et d'une solide section de musiciens.
Entretien en français, quelques jours avant ses deux concerts au New Morning, avec cette native de Rochester qui se partage entre la France et les Etats-Unis depuis une dizaine d'années.



- Il paraît qu'au début de ce projet, vous aviez sélectionné 200 chansons. Comment s'est fait le choix définitif ?
J'ai écouté longuement chaque titre et, à la fin, j'ai décidé de faire les chansons de femmes compositrices avec qui j'ai grandi et qui m'ont touchées. L'idée était également de choisir des genres différents parce que je voulais faire un album qui me représente. Toutes ces artistes m'ont permis de trouver ma propre voie.
- Vous écoutiez Dolly Parton lorsque vous étiez plus jeune ?
Oui. J'ai toujours adoré la chanson "Jolene". Elle fait encore des concerts et elle chante toujours très bien. Je trouve que c'est très inspirant.
- Quelle reprise a été le plus gros challenge pour vous ?
Pour moi c'était Adèle. La chansons "Rolling in The Deep" a été un énorme succès. C'est encore très proche dans l'esprit des gens. Du coup, j'ai longtemps hésité avant de me lancer.
- C'est un peu la même chose avec "Back To Black" d'Amy Winehouse, non ?
 Lorsque je l'ai entendue pour la première fois, j'ai été touchée par son grain de voix et les paroles. Elle a eu une vie tragique et elle nous a tout donné dans ses chansons. Sa manière de chanter m'a donné un petit espoir dans un monde plus ouvert à la pop, avec des artistes sans âme.
- Joni Mitchell disait que tout le monde pouvait reprendre ses chansons mais que ceux qui avaient un pied dans le jazz pouvaient mieux capturer ses croquis de vie. Vous, vous y avez plutôt les deux pieds ?
Absolument. J'ai découvert le jazz lorsque j'avais 14 ans. A l'époque, j'étais plus intéressée par la pop ou le R&B. Le jazz m'a donné envie de faire quelque chose de différent dans la musique.
- Vous avez dit lors lors d'une interview que, pour vous, chanter c'était comme peindre ?
Je m'en souviens, c'était pour la sortie du précédent album (NDLR "Melodic Canvas"). Lorsque je commence à chanter, je pense à l'atmosphère que je veux installer et je choisis des couleurs: bleu, noir, orange... Après, je me dis: c'est quoi le mood (ambiance) ? Et j'ajoute de nouvelles couleurs.
- Comme vous, vos musiciens ont étudié au Berklee College of Music ?
C'est vrai. Sauf le pianiste et co-producteur Shedrick Mitchell. Les autres ont en effet fréquenté le même établissement que moi, mais pas forcément en même temps ! Il y a vraiment quelque chose entre nous. Nous ressentons la musique de la même manière, avec le même feeling. C'était facile de faire cet album avec eux. Nous avons répété une seule fois en studio, la veille de l'enregistrement.
On dit qu'à vos débuts, la comparaison avec Janis Joplin vous agaçait ?
Je trouvais que sa voix "grattait" trop ! Quand on me disait que je faisais parfois penser à Janis Joplin, je me disais: My god, je ne veux pas faire ça !  J'étais jeune et je ne réalisais pas à quel point ce qui comptait avant tout pour elle, c'était l'émotion. Elle était juste complètement libre. Après 40 ans, on voit les choses différemment. Aujourd'hui, j'essaie de mettre l'émotion avant la perfection.

- album "Alterations" (Membran/Sony), disponible le 14 février 2020.
En concert à Paris les 16 et 17 mars 2020, à 21h, au New Morning, 7/9, rue des Petites Ecuries, 75010 Paris.  http://www.newmorning.com/
et en tournée: le 5 mars à Cambrai, le 7 mars à Dreux, le 13 mars à Wissous, le 14 mars à Montbrison, le 26 mars au Mégève Jazz Festival, le 15 avril à Colmar...






9 févr. 2020

Barbara Pravi : Je me sens comme un chef d'orchestre

On se souvient encore de sa bouleversante interprétation de la chanson "Seulement connu de Dieu" (de Claude Lemesle et Charles Aznavour) dans le spectacle musical "Un été 44". Son premier EP, sorti en juin 2018,  révélait de jolies mélodies pop et un incontestable talent pour l'écriture avec des titres comme "Pas grandir", "Deda" ou encore  "Le Malamour".
En attendant l'album promis, Barbara Pravi nous fait patienter avec un autre EP "Reviens pour l'hiver"
Cinq chansons teintées d'une délicate mélancolie, qui parlent de rendez-vous manqués ("Barcelone"), de la nostalgie des années folles ("Pigalle") ou des masques derrière lesquels on se dissimule trop souvent ("Personne d'autre que moi"). On tombe définitivement sous le charme...



- Lors de ton concert au Réservoir tu as dit que tu n'avais pas échappé à la règle de raconter ta vie dans un premier disque. C'est encore le cas pour celui-ci ?
Pour l'instant, je ne peux parler que de ce que je ressens. Je ne me sens pas juste si je raconte l'histoire de quelqu'un d'autre.
- Tu chantes encore sur scène la chanson "Le Malamour", sur la violence faite aux femmes ?
Bien sûr. Avec cette chanson, il s'est passé quelque chose qui m'a complètement échappé. J'avais besoin de reprendre confiance en moi et elle a eu cet effet là sur moi. J'ai aussi été invitée l'année dernière par Daphné Bürki dans le cadre de la journée de la femme. J'expérimente de plus en plus le pouvoir de la parole.
- Un héritage de ton père philosophe ?
L'amour des mots, sans doute. Mais les philosohes sont plus sur la pensée.
- Peux-tu nous parler de la photo de la pochette ?
Je suis fascinée par le ciel et les grands espaces. J'essaie toujours de réfléchir aux pochettes en terme de concept. J'aime cette idée de prendre les commandes... Je me sens parfois comme un chef d'orchestre. Cela m'a également fait penser aux Rochambelles, ces ambulancières et infirmières dont on a salué le courage dans le spectacle "Un été 44".
- Avec le recul, jouer dans ce spectacle a été bénéfique pour toi ?
Je ne serais pas la femme que je suis aujourd'hui si cela ne m'était pas arrivé. Je travaille d'ailleurs avec l'ingé son d'Un été 44. Il me suit depuis le début.
- Dans la chanson "personne d'autre que moi", tu parles de te mettre nue ?
J'ai du mal avec le mensonge. Sans doute parce que j'en ai abusé lorsque jétais petite. Aujourd'hui, je suis franche et directe, mais j'y mets les formes !
- le titre "La fête" est assez déroutant. On est loin des serpentins et cotillons ?
Je suis assez casanière. La fête pour moi, c'est voir quelques amis, lire ou observer la nature. Je suis une contemplative. C'est un titre que j'ai co-écrit avec mon complice Vincha.
- Dans le carnet où figure la liste des choses que tu rêves de faire, tu as pu en réaliser de nouvelles ?
Je suis allée au Canada. J'en rêvais depuis des années. J'ai aussi trouvé un tourneur. Je commence à m'intéresser au théâtre. J'avais aussi envie d'écrire pour d'autres. Je l'ai fait pour Chimène Badi, le Concours Eurovision Junior et j'ai aussi signé un texte ("Baraka") dans l'album "Bleu indigo" de Yannick Noah...Je me souviens que les premières années, j'étais malgré moi dans un esprit de conquête. Je me sens beaucoup plus sereine aujourd'hui.

- EP "Reviens pour l'hiver" (Capitol/Universal), sortie digitale le 7 février dernier.

7 févr. 2020

Bai Kamara Jr: "J'ai mis toute mon âme dans cet album"

(c) Michael Chia
Originaire de Sierra Leone, il a vécu toute sa scolarité en Angleterre avant de s'installer en Belgique. Pour l'album "Salone" (qui désigne sa terre natale en langue Krio), enregistré avec son nouveau groupe The Voodoo Sniffers, Bai Kamara Jr a puisé dans ses racines africaines. Dès les premières notes de "Can't Wait Here Too Long",  la chanson qui ouvre ce bel opus, son timbre envoûtant vous embarque dans un voyage musical où le blues se teinte aussi de sonorités soul et world.
Rencontre à Paris (devant une spécialité auvergnate !), avant son concert au Jazz Club Etoile, le 14 mars prochain..

- Le blues exprime souvent de la tristesse, de la douleur. Ce qui n'est pas le cas dans "Salone" ?
Je suis un grand fan de John Lee Hooker qui pouvait être très drôle. Les textes me sont venus facilement. Ce que je raconte concerne la vie quotidienne et chacun peut s'y retrouver.  Le blues a toujours été là mais l'envie est devenue plus forte avec l'âge et l'expérience. Cet album, j'y songeais depuis au moins 8 ans. J'ai attendu le bon moment. C'est une une musique authentique et c'est ce que je veux faire jusqu'au bout...
- Avec une mère ambassadrice et un père politicien, votre chemin n'était pas un peu tracé ?
C'est vrai. Après deux ans à l'université, j'ai dit à ma mère que je voulais faire une pause... qui dure encore ! Une vie d'artiste ce n'est pas évident parce que c'est long et dur.  Il faut rester fidèle à son art. J'ai commencé la musique en écrivant pour des groupes locaux. Quand j'ai dit à ma mère que je voulais être artiste, elle a été compréhensive... et méthodique ! Avec elle, il faut venir avec des propositions et des arguments. A la fin, elle m'a dit que si cela me rendait heureux, j'avais sa bénédiction.
- C'est vrai que vous avez aussi fait l'acteur ?
Un homme est venu me voir alors que je jouais dans un club en Espagne. Il était intéressé par ma musique et souhaitait mettre deux de mes chansons dans un film. Je me souviens qu'à l'époque, mon entourage m'a dit de ne pas me faire trop d'idées. Quatre jours plus tard, j'ai reçu un mail de ce réalisateur (NDLR Paco Torres pour le film  "El Vuelo Del Tren" )  me confirmant sa promesse et il m'a même proposé un petit rôle. Celui d'un musicien africain de passage en Espagne... C'était dans mes cordes !
- Pouvez-vous nous parler du groupe qui vous accompagne ?
C'est un groupe multi-culturel : il y a un batteur qui vient du Togo, le bassiste du Burkina Faso, un autre musicien vient de l'Idaho mais a été élevé en Afrique de l'Ouest, il y a aussi un belge avec des racines italiennes...
- Dans le titre "Homecomming", on entend les sonorités typiques du "fingerpicking" ?
J'ai toujours aimé ça. Je trouve que cela apporte un côté organique et assez hypnotique.
- Vous avez dit que vous vous sentiez toujours comme un étudiant en ce qui concerne le blues. Qui sont vos maîtres ?
Quand tu es un guitariste autodidacte comme moi, tu passes ta vie à apprendre. Je suis inspiré par des artistes comme John Lee Hooker, Big Bill Broonzy, Ali Farka Touré... mais aussi Marvin Gaye ou Jimi Hendix.
- Chanter le blues, c'est forcément en anglais pour vous ?
C'est surtout parce que je m'exprime mieux dans cette langue. J'ai mis toute mon âme, toute mon énergie dans cet album. J'ai aussi mis en avant mes racines africaines parce que cela fait la différence avec le blues américain. "Salone" n'est ni africain, ni américain. Il est universel.

- album "Salone" (Moosicus/UVM), sortie le 21 février 2020 (disponible depuis le 24 janvier en digital).
En concert, le 14 mars 2020, à 20h30, au Jazz Club Etoile, 81, Boulevard Gouvion Saint-Cyr, 75017 Paris. Réservation au 01.40.68.30.42. Infos sur le site http://www.jazzclub-paris.com/fr/groups